L’Eclair : "On aimerait être un groupe de club"

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L’Eclair : "On aimerait être un groupe de club"

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L'Eclair à Rennes le 07 décembre 2019 | G. Chantepie
L'Eclair à Rennes le 07 décembre 2019 | G. Chantepie
© Radio France

Recontre à Rennes avec le jeune sextet adepte de groove progressiste qui dévoile deux nouveaux titres enregistrés avec The Mauskovic Dance Band.

Vendredi 6 décembre, l’Ubu à Rennes. A l’affiche de la seconde soirée des Trans Musicales dans cette salle aussi fameuse que biscornue, les six jeunes Suisses de L’Eclair armés de leurs mellotron, guitare wah et bongos scrach vont emmener une petite heure durant un public conquis dans leur funk instrumental et sans frontière. Rencontre avec ces jeunes loups du label Bongo Joe, auteurs d’un nouveau 45 tours enregistré avec leurs frères d’armes hollandais The Mauskovic Dance Band.

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Vous venez d'achever votre premier concert aux Trans, aviez-vous déjà joué dans une telle salle par le passé ?

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C’est une super salle qui sonne très bien, mais il y avait effectivement ce truc bizarre depuis la scène de ne pas voir une partie du public, puisqu’il y a cette sorte de mur qui nous sépare d’eux. A priori, il y avait beaucoup de monde, on en a vu une partie. Les gens ont bien groové mais surtout, il y avait de l’attention, ils étaient respectueux, réceptifs, et ils se sont agités tout le long. C’était chouette de jouer devant une audience aussi appliquée.

L’Éclair, c’est un son assez funk, purement instrumental, mais avec des influences très larges, des Caraïbes à l’Afrique… Où placez-vous le curseur entre l’expérimentation et le désir de faire danser les gens ?

Ce sont en fait les deux choses qu’on essaie d’approfondir simultanément avec notre musique, que ça soit intéressant musicalement tout en étant vraiment rythmé et accessible à tout le monde. On essaie de faire de la musique assez inclusive, qu’elle contente à la fois le fan de musique aguerri et la personne qui se retrouve là un peu par hasard.

Vous en donnez votre propre définition en parlant de « proto-groove ». Quand on recherche en ligne cette expression, on tombe sur un DJ écossais qui fait de la bonne house mais pas sur vous pour l’instant…

Ça tombe bien finalement, puisqu’on essaie de voir un peu comment aurait pu être la musique électronique avant qu’elle n’arrive. C’est ça qui nous rapproche de cette scène de Chicago, ce genre de trucs. C’est sûr que c’est une musique qu’on écoute et qui nous intéresse, et Elie vient de le dire, L’Eclair c’est finalement de la house organique. Essayer de trouver ce bon twist des musiciens live, qui peuvent faire une musique dansante, voire amalgamée à de la musique électronique, mais avec cet esprit de véritables musiciens, et avec un son le plus vivant possible, avec une vraie batterie, où tous les synthés ont un grain ou une personnalité. C’est ça qu’on essaie de développer dans nos concerts et dans notre son de manière générale.

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Avec autant d’influences, laissez-vous le hasard du studio faire bien les choses ou y a-t-il une écriture initiale qui domine la composition de chaque morceau ?

Ça varie souvent entre les deux phénomènes. On peut avoir travaillé certains accords, avec un thème qui va par-dessus, ou une idée de groove, parfois une sorte de structure, mais qui n’est pas encore là et qu’on ramène en répétition comme ça. Ou alors, on est en répète et durant cinq minutes, on s’est égarés autour d’une idée, qui après coup ça se retrouve en morceau. On a donc des titres très improvisés, mais on essaie aussi de faire la part des choses. De ne pas se laisser aller dans des jams infinis, mais plutôt de se rapprocher de la méthode de Can qui faisait du collage d’enregistrements. Nous, on fait du collage de parties qui n'ont parfois rien à voir mais qui se retrouvent en cohérence au final. 

On vous imagine bien comme un vrai groupe de studio, adeptes de la musique de librairie, à la manière des requins d’antan…

C’est clairement notre rêve, revenir en arrière et remplacer les machines et certaines entités humaines dans cette industrie. Je vois mal revenir à la mode le musicien de session, mais je signe si ça arrive. C’est un modèle qui nous fascine, ces musiciens qui étaient enfermés 24/7 dans un studio, payés pour enregistrer un maximum de trucs possibles. C’était peut-être le plus beau métier du monde, et tout ce rapport à la library-music qu’on a pu avoir avec les labels April Orchestra ou KPM, c’est quelque chose qui fait rêver et qui nous inspire. On aimerait avoir autant de temps et de liberté pour expérimenter, et en tous cas on aimerait le prendre à l’avenir pour un prochain projet en studio. 

Vous sortez un 45t aujourd’hui enregistré avec les Mauskovic Dance Band, que trouve-t-on sur ce nouveau disque ?

On y gagne une voix, ce qui va satisfaire toutes les personnes autour de nous qui l’appelaient de leurs vœux (rires). Des percussions aussi, et on a de notre côté rajouté des mélodies dans leur morceaux c’est un échange à partir d’une idée qui partait de l’un des groupes pour chacun des deux titres. Avec des lapsteel bien sûr, car on adore cet instrument.

D’autres formations en vogue de votre génération se passent de voix ou l’exploitent, comme Khruangbin, sous forme de murmures, de chuchotements…

Se passer d’une voix classique permet de laisser de la place à d’autres choses, à plus d’inventivité. Par contre, ce qui pourrait être intéressant, c’est d’appréhender la voix moins comme un chant mais comme un instrument, qu’on peut moduler, travailler, pour faire des mélodies ou autre chose, des accords. Travailler avec la voix oui, mais incorporer des paroles, ça ne ferait pas beaucoup de sens parce ça n’a jamais été une bonne idée nos paroles (rires). La musique instrumentale nous plait à la base, rapport à ce qu’on disait sur la library-music, laisser la place au son, à l’imagination. On oublie souvent aussi que la musique instrumentale est la musique des clubs. Et on aimerait justement remplacer les djs, être un groupe de club, et la musique lorsqu’elle est instrumentale fonctionne parfaitement dans ce genre d’ambiance.

Vous avez signé votre dernier disque Sauropoda sur le label Bongo Joe, quel regard portez-vous sur ce disquaire et label genevois ?

Bongo Joe a redynamisé cette ville, le lieu comme le label ont permis plein de belles choses. Mais aussi de réunir des gens, c’est l’essence d’un lieu comme ça, réunir des musiciens différents, des influences différentes. Et comme le label est aussi éclectique que le shop, cela permet d’avoir cette rencontre qui est aussi chouette que pointue. Ça a vraiment fait une différence à Genève lorsque Bongo Joe est arrivé dans les parages, déjà ils ont fait baisser le prix du vinyle ce qui est une assez belle prouesse, surtout en Suisse. Et puis il y a aussi toutes les soirées organisées par le label, il y a d’excellents djs dans leur équipe, ça fait vraiment un bouillon de culture qui fait beaucoup de bien à la vie diurne et nocturne du label.

Quels sont les autres jeunes groupes de la scène genevoise à connaitre selon vous ?

Il y a nos grands clasheurs L’Orage qui se sont appelés comme ça en réponse à l’Éclair. Mais du coup on s’est rabibochés, on a fait un super groupe qui s’appelle La Tempête lorsqu’on joue ensemble (rires). Côté électronique, on pense aussi à notre ami Laxxiste qui a travaillé sur notre le dernier album. Donc il y a des groupes mais aussi de super producteurs, des hommes de l’ombre qui font beaucoup de bien aujourd’hui à la scène et au son genevois.