Le monde dans le viseur. En Chine continentale, et notamment à Pékin, la météo Covid est au beau fixe. Une pandémie maîtrisée, assurent les autorités, au prix, parfois, de mesures drastiques. À l’instar de la "bulle sanitaire" imposée aux participants des JO d’hiver. Mais à Hong Kong, les images sont moins "cliniques".
Des patients âgés allongés sur des brancards, à l'extérieur d'un hôpital de Hong Kong. Des couvertures de survie, des paravents, des barnums… Le cliché dans un quartier pauvre de la ville capté par Peter Parks, photographe de l’AFP dans l’ex-colonie britannique, dresse un inquiétant tableau de la situation sanitaire. À l’opposé du traitement visuel clinique du reste du pays, et en particulier des compétitions sportives qui animent la capitale.
Ici, plus de 4 285 nouveaux cas ont été confirmés le 16 février, selon les autorités. La semaine précédente, les premiers décès en cinq mois étaient enregistrés. Dans une ville de 7,5 millions d'habitants où une personne de plus de 70 ans sur deux n’est pas vaccinée, le variant Omicron est plus que jamais visible.
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Ce 16 février, au centre médical Caritas, dans le district de Sham Shui Po, un quartier populaire de la ville, Peter Parks, rompu aux situations de crise, décrit l’urgence pour l’AFP. C’est d’ailleurs le travail d’un photographe d’agence : "Capter le regard et concentrer un maximum d’informations dans une photo", précise Jean-Jacques Jaffré, fondateur de la jeune revue Like. À l’évidence, l’hôpital de plus de 1 200 lits n’est plus en mesure de gérer l’afflux de patients infectés par le coronavirus. Pire, note le correspondant local de l’AFP, les barnums, qui ne devaient pas accueillir plus d’un patient à la fois, hébergent des familles entières.
Scènes de chaos
"Certains de mes collègues disent que nous sommes maintenant en mode champ de bataille", raconte un infirmier. Dans la photo de Peter Parks, l’embouteillage de lits le suggère. "Une forme de chaos plus ou moins organisé", note Jean-Jacques Jaffré. Des lits stockés en plein air, en marge des tentes, dans une forme de file d’attente alignée sur un mur, en plein air, cadrée en surplomb. Le choix d’une diagonale donne une direction, occultée : une entrée de l’hôpital.
Mais le désarroi des patients, couverts de façon hétéroclite, freine la dynamique. Ici, on attend, comme on peut, avec l’équipement hospitalier disponible : des couvertures de survie pour certains, des plaids bleus, verts ou marrons pour les autres. Et, visiblement, peu ou pas d’accompagnants. Un personnel hospitalier, on le devine, concentré sous les tentes, où l’on peut lire des numéros : 18, 19, 20, 21… "Comme s’ils étaient là pour soutenir les patients moralement, en l’absence d’appareillage technique visible : pas de respirateurs, pas d’écrans", commente Jean-Jacques Jaffré.
Où sont les autres ? Le reportage complet de Peter Parks le confirme : dans un autre sas, comparable à celui-ci, délimité par des paravents jaunes ou bleus, posés à même le parvis et dont l’entrée semble filtrée par un personnage au gilet kaki. On est bien loin du contexte hospitalier, de la blancheur clinique, de l’idéal d’asepsie. La scène, dressée là dans l’urgence, est ouverte à tous les vents. "Le photographe a capté une image dans laquelle les codes visuels de l’hôpital son absents", insiste Jean-Jacques Jaffré.
Et si le régime chinois, qui a repris la main sur l’ex-colonie britannique, parvient à contenir le mal, il a bien du mal à filtrer les images. Des photos qui racontent une submersion du système de santé, presque anachroniques, deux ans après l’apparition du virus, loin de la maîtrise sanitaire que Pékin cherche à afficher.
Photo volée ?
Pourtant, il n’en est rien. Ce cadrage, Parks l’a bien choisi. " cadrage. "En laissant apparaître le parapet de son poste d’observation, en hauteur, le photographe laisse penser qu’il a tendu le bras pour déclencher la prise de vue, commente Jean-Jacques Jaffré, ancien directeur artistique, rompu à la narration visuelle. Son cadrage donne un aspect clandestin à l’image, un sentiment de photo volée."
Pourtant, il n’en est rien. Ce cadrage, Parks l’a bien choisi. "Comme un peintre, il a composé son image." D’autres clichés, sous des angles différents, attestent de la liberté de mouvement du photographe dans le centre médical de Caritas. Ce qui, dans le contexte très particulier de Hong Kong, de tradition plus libérale que la Chine continentale, peut irriter les autorités du territoire, désormais proches de la ligne de Pékin.
Xi Jinping, le président de la République populaire de Chine, a appelé à "toutes les mesures nécessaires" pour maîtriser l'épidémie, après que Carrie Lam, la cheffe de l’exécutif de Hong Kong, a assuré à ses administrés qu’"aucun confinement partiel ou général [n’était] prévu". Pour l’instant, la "stratégie zéro Covid" choisie par la Chine, qui consiste à isoler strictement les malades et les cas contacts, ne trouve pas de solution localement, même si les autorités assurent chercher des lieux d’accueil. En même temps, le niveau de vaccination plafonne chez les personnes âgées – 57 % des 70-79 ans et 74 % des plus de 80 ans ne sont pas protégés –, alors même que les doses ne manquent pas. Faute d’avoir protégé, il faut donc traiter.
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Et la réponse à cette flambée de Covid est "loin d’être satisfaisante", a reconnu dans une conférence de presse la responsable de l’Autorité de gestion des hôpitaux, le docteur Sarah Ho. "Nous sommes vraiment désolés d’avoir laissé les personnes âgées attendre dehors dans de si piètres conditions." Les professionnels de santé dénoncent un système à bout de souffle. "Les hôpitaux sont un château de sable dans un tsunami", estime le docteur Siddharth Sridhar, de l’Université de Hong Kong. Et pas seulement à cause du Covid-19 : "Nous nous débattons même avec les pics de grippe", précise-t-il.
Mercredi, 12 000 personnes attendaient encore d'être hospitalisées, alors que les épidémiologistes hongkongais attendent pour le mois de mars des niveaux de contamination quotidiens six fois plus élevés.
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