Alzheimer : une clé de la maladie décryptée par des scientifiques français

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Alzheimer : une clé de la maladie décryptée par des scientifiques français

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En France, la maladie d’Alzheimer touche directement ou indirectement 3 millions de personnes, et près de 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année
En France, la maladie d’Alzheimer touche directement ou indirectement 3 millions de personnes, et près de 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année
© Getty - Media for Medical/UIG

Les chercheurs du laboratoire des maladies neurodégénératives à Fontenay-aux-Roses viennent de découvrir le mécanisme qui contribue à la progression de la maladie d'Alzheimer. Comment la protéine TAU altère les neurones.

Les chercheurs du laboratoire des maladies neurodégénératives « mécanisme, thérapies, imagerie » (CNRS/CEA/Université Paris-Sud, MIRCen) de Fontenay-aux-Roses qui ont travaillé en partenariat avec Normale Sup et l'Inserm viennent de découvrir le mécanisme qui contribue à la progression de la maladie d'Alzheimer. Une avancée à partir de cultures de neurones de souris publiée ce jeudi dans " The Embo journal".

On savait déjà que la protéine TAU était responsable de la dégénérescence progressive des neurones des personnes atteintes.

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A présent, ces chercheurs, sous l'égide du Professeur Ronald Melki, ont mis en évidence comment cette protéine TAU se fixe sur les neurones - avant de pénétrer à l'intérieur de ces cellules - et comment elle altère, en conséquence, leur fonctionnement.

Ces découvertes permettront sans doute de concevoir un jour des thérapies capables de protéger notre cerveau.

Une protéine pure mise en contact avec des neurones cultivés dans une boîte de pétri

Il y a une dizaine d'années, les chercheurs injectaient à des petits rongeurs des agrégats de protéine TAU qui étaient directement prélevés dans le cerveau d'animaux atteints d'Alzheimer. Ils constataient ensuite la propagation de la maladie.

A présent, ils savent produire des protéines fibrillaires de TAU qui ont schématiquement la forme d'une fibre et ils parviennent à mettre en contact cette protéine pure avec des neurones cultivés dans une boîte de pétri.

C'est ainsi qu'ils ont pu montrer comment la protéine TAU se fixe à la pompe sodium/potassium, une autre protéine, présente dans la membrane des neurones et essentielle à leur fonctionnement, puisque cette pompe crée la différence de potentiel qui génère l'influx nerveux des cellules du cerveau.

La protéine TAU, une fois fixée au neurone, génère donc une réorganisation anormale de la pompe sodium/potassium mais aussi des récepteurs du glutamate, qui eux sont responsables -pour faire simple- de la communication entre nos neurones.

Enfin, le laboratoire a aussi montré comment la protéine TAU pénètre à l'intérieur de la cellule neuronale, avant de la délaisser pour en "contaminer" une autre.

© AFP - JACOPIN / BSIP

L'espoir de pistes thérapeutiques d'ici 5 à 10 ans

C'est donc un mécanisme en trois temps qui a été décortiqué.

L'objectif de ces recherches est maintenant de fabriquer des leurres qui ressembleront à un fragment du récepteur de glutamate par exemple, afin d'attirer et de fixer les protéines TAU qui seront alors prises au piège et incapables d'attaquer les neurones.

Le neurobiologiste Ronald Melki, directeur de recherche au CNRS, qui travaille au sein du laboratoire François Jacob du CEA à l'origine de ces découvertes, espère concrétiser ces pistes thérapeutiques d'ici 5 à 10 ans.

Ronald Melki : "Je suis convaincu que mes recherches peuvent aboutir à un traitement, en fonction de l'avancement de la maladie"

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Dans Le Quotidien du Médecin, le Dr Stéphane Haïk, directeur du laboratoire de recherche sur Alzheimer et les maladies à Prion à l'Institut du cerveau et de la moelle épinière, parle d'une "étape essentielle". S'il salue les résultats, Luc Buée, directeur de recherches CNRS et vice-président de la Société des neurosciences, rappelle toutefois à la revue spécialisée que l'animal n'est pas l'homme. Les chercheurs de Fontenay-aux-Roses étudient désormais le processus sur des neurones humains in vitro.