"Notre maison brûle" toujours et peut-être plus encore aujourd'hui. Mais contrairement à l'an dernier, les milliers d'incendies en Amazonie ne suscitent pas le même émoi à la veille de l'Assemblée générale annuelle de l'ONU.
Après avoir été l’objet, l’an dernier, de toutes les attentions lors de l’Assemblée générale des Nations unies, la forêt native ne semble plus revêtir, aujourd’hui, un caractère aussi urgent pour les diplomates et chefs d’état qui assisteront virtuellement, mardi 22 septembre, à la grande messe annuelle de l’ONU. L’Amazonie brûle toujours et presque plus encore qu’en 2019. Mais cette année, aucun clash diplomatique, pas de fonds spéciaux débloqués, ni d’aide logistique affrétée des quatre coins du globe pour combattre ces feux.
Dans un état au moins aussi catastrophique que l'an dernier
Durant les 14 premiers jours de ce mois de septembre 2020, l’Institut National brésilien de Recherche Spatiale (INPE) a constaté 20 485 départs de feux, ce chiffre dépasse celui enregistré l’an dernier sur l’ensemble du mois de septembre. En juillet, une augmentation de 28% des incendies a également été observée par rapport à 2019. Pour éviter de se lancer dans une guerre de statistiques, on peut sans crainte affirmer que si l’état de l’Amazonie en 2020 n’est pas pire qu’en 2019, il reste, au moins, aussi catastrophique. Et ce, malgré la remise en question du financement du Fonds Amazonie par ses principaux bailleurs, la Norvège et l’Allemagne, malgré Greta Thunberg et l'indignation générale.
Certes, le sort du principal "poumon" de notre planète a remis en cause la signature de l’accord commercial UE-Mercosur. Selon les conclusions d’un rapport d’experts remis vendredi 18 septembre au Premier ministre français Jean Castex, l’application d‘un tel traité entre les deux régions provoquerait une augmentation mécanique de 5% de l’activité de déforestation sur les six premières années avec, au final, 700 000 hectares supplémentaires de forêt abattue.
Si l’on semble se préoccuper du futur, la situation actuelle de l’Amazonie ne semble plus autant émouvoir les responsables politiques.
L’an dernier, à la même époque, une violente passe d’arme diplomatique, entre le président brésilien Jair Bolsonaro et son homologue français Emmanuel Macron, sur les dizaines de milliers de départs de feux en Amazonie, a fragilisé cet accord UE-Mercosur signé deux mois auparavant.
"Notre maison brûle, littéralement", il y a déjà plus d'un an...
En août 2019, Emmanuel Macron s’est alarmé dans un tweet "Notre maison brûle, littéralement", et a commencé à douter de la volonté de coopérer de Jair Bolsonaro : "Je l’ai vu une première fois, il m’a dit la main sur le cœur, je vais tout faire pour la reforestation (…) pour pouvoir signer le Mercosur. Quinze jours après, il faisait le contraire en limogeant des scientifiques, il m'a menti !"
L'Amazonie, s'est retrouvée au coeur des discussions à la tribune des Nations unies, obligeant les leaders climatosceptiques à tomber le masque. Jair Bolsonaro, président brésilien, dans un discours traditionnel d'ouverture de la session décomplexé, affirmait que tous "ceux qui s'intéressent à l'Amazonie, le font pour les richesses qu'elle renferme", avant de souligner que "les attaques sensationnalistes dont (son pays) a été l'objet dans la presse internationale, a réveillé les sentiments patriotiques" et de pointer du doigt "un autre pays (...) au comportement irrespectueux et à l'esprit colonialiste".
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Des banques, notamment françaises, faciliteraient la déforestation
Depuis cette joute digne des moments les plus épiques de la guerre des étoiles, force est de constater que l'état de la plus grande forêt native du monde ne s'est concrètement pas amélioré. Pire, un rapport des ONG Stand.earth et Amazon Watch, publié au début du mois d'août, nous explique à quel point le financement de la déforestation se porte bien : 19 banques européennes dont 4 françaises continueraient de faciliter le commerce du pétrole extrait d'une des régions les plus protégées d'Amazonie. Le vice-président brésilien, le général d'armée Hamilton Mourao, de son côté, continue de nier les données quotidiennes alarmantes publiées par l'INPE et estime que les injonctions qu'il reçoit des pays européens pour lutter contre la déforestation "font partie d'une stratégie pour négocier des accords", reléguant l'Amazonie au rang de vulgaire argument commercial.