Antisémitisme en France : des faits en hausse et une menace prégnante

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Antisémitisme en France : des faits en hausse et une menace prégnante

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Graffitis antisémites sur des boîtes aux lettres affichant un portrait de la défunte politicienne et survivante de l'Holocauste Simone Veil. Photo prise le 11 février 2019 dans le 13e arrondissement de Paris.
Graffitis antisémites sur des boîtes aux lettres affichant un portrait de la défunte politicienne et survivante de l'Holocauste Simone Veil. Photo prise le 11 février 2019 dans le 13e arrondissement de Paris.
© AFP - Jacques Demarthon

Les faits antisémites ont augmenté l'an dernier, selon le ministère de l'Intérieur. Même si les plus graves, les atteintes aux personnes, sont en net recul. Les menaces sont avant tout en question. Une récente étude inédite a d'ailleurs détaillé à quel point les juifs de France s'estimaient visés.

Ce lundi, 75 ans exactement après la libération d'Auschwitz, des survivants de l'Holocauste, toujours moins nombreux, ont lancé un avertissement au monde face à l'antisémitisme resurgissant. Venus du monde entier dans l'ancien camp nazi, ils étaient plus de deux cents à honorer les plus de 1,1 million de personnes qui y ont perdu la vie et à alerter sur un phénomène renaissant, en particulier en Allemagne. Le chef de la diplomatie allemande vient d'ailleurs de mettre en garde contre un départ "massif" des juifs. En France, toujours ce lundi, Emmanuel Macron a appelé au mémorial de la Shoah à "ne rien céder" face à "l'insupportable regain de l'antisémitisme qui rampe dans notre Europe, dans notre pays", ce "mal souterrain", "qu'il porte son visage de toujours ou qu'il emprunte les masques nouveaux de la haine islamiste de l'antisionisme". 

L'appel d'Emmanuel Macron à "ne rien céder" à "l'insupportable regain de l'antisémitisme". Reportage de Rosalie Lafarge

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Déclaration au lendemain de chiffres publiés par le ministère de l'Intérieur et peu après la publication d'une radiographie de l'antisémitisme en France révélant notamment qu'un juif sur trois interrogé se sent menacé.

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Répliques
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+ 27% de faits à caractère antisémite en 2019

Le ministère de l'Intérieur a rendu public ce dimanche dans un communiqué son bilan des faits racistes, xénophobes et antisémites pour l'an dernier. La place Beauvau a recensé 687 faits à caractère antisémite en 2019 contre 541 l'année précédente, soit une augmentation de 27%. Il en dénombrait 311 en 2017, année d'un recul comme en 2016. Le pic avait été atteint en 2004 avec 974 actes recensés. 

Ce chiffre pour 2019 est la somme de 151 "actions", catégorie qui regroupe les atteintes aux personnes et aux biens : dégradations, vols, violences physiques…, et de 536 "menaces", des propos ou gestes menaçants, inscriptions, tracts ou courriers.

D'après le ministère, la hausse globale "s’explique exclusivement par l’augmentation des menaces, à hauteur de 50 % par rapport à 2018, les actions ayant quant à elles diminué de 15 %. Les faits les plus graves, les atteintes aux personnes, sont même en net recul, de 44 %."

Outre plusieurs profanations de tombes juives, comme à Westhoffen, près de Strasbourg, 2019 a été notamment marquée par de nombreux tags antisémites en plein coeur de Paris, en particulier sur deux portraits de Simone Veil dessinés par l'artiste Christian Guémy, alias C215. Et par l'arbre planté à la mémoire d'Ilan Halimi retrouvé scié à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne).

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Ces données sont compilées par le service de protection de la communauté juive à partir des plaintes et des mains courantes déposées au commissariat. Ce bilan est ensuite vérifié par le ministère de l'Intérieur avant d'être communiqué chaque année. Au lendemain des profanations de Westhoffen, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner avait annoncé la création d'un "office national de lutte contre la haine" au sein de la gendarmerie, chargé "de l’ensemble des enquêtes sur les actes antisémites, antimusulmans, antichrétiens (…) en zone gendarmerie". Des enquêteurs et des magistrats sont aussi formés pour mieux faire front, racontait un récent reportage du Monde.

© Visactu

Un juif sur trois se sent menacé, 52% ont envisagé de quitter la France

Le constat de la place Beauvau est à mettre au regard de la radiographie de l'antisémitisme en France publiée mardi dernier. Une étude inédite de l'Ifop pour la Fondapol et l'American Jewish Committee, sur la base de "regards croisés" entre des Français de confession ou de culture juive (un échantillon de 505 personnes a été constitué) et le grand public (un échantillon de 1 027 personnes). On y apprenait notamment qu'un juif sur trois se sent menacé en France et que 70% d'entre eux disent avoir subi un acte antisémite dans leur vie. 64% des juifs interrogés disent aussi avoir subi une agression verbale dans leur vie, des insultes, des menaces. 23% ont reçu des coups, des gifles. Et 84% des jeunes juifs interrogés ont été moqués ou agressés.

"On ne savait pas que cet antisémitisme actif frappait à ce point les nouvelles générations", avait commenté le directeur de la Fondation pour l'innovation politique. Pour Dominique Reynié, interrogé par Pauline Renoir : 

Il y a clairement quelque chose qui s'est passé depuis le début des années 2000. Il y a aussi un nouvel antisémitisme qui se manifeste depuis ces années-là. C'est un antisémitisme qui s'alimente de l'islamisme, clairement. C'est d'ailleurs pourquoi on trouve plus de confrontation, d'expérience de l'antisémitisme actif, violent, parmi les jeunes générations que parmi les plus anciennes générations. Bien que le chiffre soit élevé dans les deux cas.  

Autre problème, selon Dominique Reynié, le silence des victimes et une "sous-déclaration considérable". Par peur ou par lassitude. Et, toujours selon cette étude, la crainte ou l’exposition aux violences antisémites conduit une partie des Français de confession ou de culture juive à envisager de changer de quartier (22 % et 31 % pour les victimes), voire dans une moindre mesure de ville (17 % et 24 %) ou de région (15 % et 21 %). Quand "52 % des juifs de France ont envisagé de quitter la France, dont 21 % en raison de craintes concernant l’avenir de la communauté juive".

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Les auteurs de cette radiographie soulignent enfin que "le grand public et les juifs de France s’accordent assez largement pour dire que l’antisémitisme est un problème pour tous et concerne la société dans son ensemble. Cette opinion est partagée à 73 % par le grand public et à 72 % par les Français de confession ou de culture juive."

Sentiment que l'antisémitisme est en augmentation ou en diminution en France. Extrait de la "radiographie" publiée la semaine dernière
Sentiment que l'antisémitisme est en augmentation ou en diminution en France. Extrait de la "radiographie" publiée la semaine dernière
- Ifop / Fondapol / American Jewish Committee

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