"Apartheïd ethnique, ghetto". Les mots choc de Manuel Valls

Publicité

"Apartheïd ethnique, ghetto". Les mots choc de Manuel Valls

Par

Le Premier ministre a surpris, voire choqué, par les mots qu'il a employés depuis mardi à propos de certains quartiers et de la politique de la ville. Mais l'ancien maire d'Evry n'a rien renié et a vivement répliqué à N Sarkozy qui évoquait « une faute ». Cette polémique met fin à l'union nationale.

Jamais un chef de gouvernement n'avait usé de tels mots. Et en bon communicant, Manuel Valls l'a fait lors de ses voeux à la presse, mardi :

« Ces derniers jours ont souligné beaucoup des maux qui rongent notre pays ou des défis que nous avons à relever. A cela, il faut ajouter toutes les fractures, les tensions qui couvent depuis trop longtemps et dont on parle peu (...) la relégation péri-urbaine, les ghettos - ce que j'évoquais en 2005 déjà - un apartheid territorial, social, ethnique, qui s'est imposé à notre pays ».

Publicité

Un constat particulièrement fort après les attentats qui ont fait 17 morts et mené plus de 4 millions de personnes à manifester. Analyse de ces mots par Frédéric Métézeau :

Écouter

1 min

Mais ce "parler vrai" dont il se revendique est aussi un constat d'échec cuisant de la part de l'ancien maire d'Evry, en banlieue parisienne, et ex ministre de l'Intérieur selon Christine Moncla :

Écouter

1 min

Nicolas Sarkozy « consterné »

Ces propos ont déclenché quantité de réactions (voir la vidéo ci-dessus), en particulier autour du mot "apartheid". Des réactions parfois très critiques à droite, comme celle de Nicolas Sarkozy, lors de sa première intervention télévisée après les attentats, mercredi soir sur France 2. « Comparer la République à "l'apartheid" est une faute », a estimé l'ancien chef de l’État et ministre de l'Intérieur désormais à la tête de l'UMP. Compte-rendu de Stéphane Robert sur ce qui a mis un terme à l'unité nationale politique de ces derniers jours :

Écouter

1 min

Pour le Front national, Florian Philippot a évoqué dans un communiqué « une insulte à la France » et de l'« irresponsabilité ». Ajoutant que « Ses propos ne feront que jeter de l'huile sur le feu, en avivant le ressentiment et la haine entre des groupes de Français incités à se penser en communautés ».

Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.

Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.

La critique historique d'Alain Finkielkraut et de Pierre Nora

Sur Europe 1, Alain Finkielkraut a souligné qu'il n'aurait jamais employé le terme d'"apartheid". En citant Camus : A mal nommer les choses, on aggrave le malheur du monde. Avant de préciser : « L'apartheid, c'est le système politique et juridique sous lequel a vécu l'Afrique du sud entre 1948 et 1994. L'apartheid, cela veut dire développement séparé des races. »

Dans "Les Matins", de Marc Voinchet, Pierre Nora s'est montré plus bienveillant. L'historien connu pour ses travaux sur le « sentiment national » a d'abord dit avoir beaucoup apprécié la tenue et les discours de Manuel Valls à l'Assemblée et peu après les attentats. Mais il a aussi regretté le choix d'un mot historiquement « pas bienvenu » :

Écouter

2 min

Manuel Valls persiste et signe

« Peu importent les mots », a répété mercredi matin le Premier ministre , lors de la présentation des nouvelles mesures anti terroristes gouvernementales. « Moi, j'utilise les mêmes avec constance depuis près d'une dizaine d'années », a-t-il répliqué. Avant de conclure : « ce qui compte, c'est d'agir dans des territoires qui se sont enfermés sur eux-mêmes. (...) Pour ce qui nous concerne, il faut décrire, car les Français ont besoin de vérité, mais l'essentiel, c'est d'agir pour lutter contre ces inégalités insupportables ». Voilà pour la première réplique, avant ce jeudi de répondre à Nicolas Sarkozy.

Interrogé lors d'une conférence de presse de la ministre de l'Education nationale Najat Vallaud-Belkacem, Manuel Valls n'a pas manqué de déclarer : « Dans ces moments-là, tout le monde, et à commencer par les responsables politiques, ceux qui gouvernent, comme ceux qui hier ont gouverné, doivent être grands, pas petits, se hisser au niveau de l’exigence des Français, (…) participer à aucune polémique qui vise non pas à discuter du fond de la politique, mais à briser l’esprit du 11 janvier, à mettre en cause l’unité nationale ».

« Une politique du peuplement, contre la ghettoïsation »

Enfin, encore ce jeudi, le Premier ministre s'est de nouveau fait remarquer par sa volonté dans certains quartiers d'une « politique du peuplement, pas seulement politique du logement et de l'habitat. Politique du peuplement pour lutter contre la ghettoïsation, la ségrégation ». Et de confier ne plus « supporter, comme républicain, de voir cet enfermement, cette relégation dans un certain nombre de ces quartiers (...), que dans des écoles on ne trouve que des élèves issus de familles pauvres, souvent monoparentales, issues uniquement de l'immigration, des mêmes cultures et de la même religion ». Manuel Valls promet une mobilisation sans précédent de l'Etat, mais il faudra attendre début mars « un comité interministériel consacré à la lutte contre les inégalités, au combat pour l'égalité » dans les quartiers sensibles pour en savoir plus Christine Moncla :

Analyse de la politique de peuplement annoncée par Manuel Valls pour lutter contre la ghettoïsation. Par Christine Moncla

1 min

**Photo de la page d'accueil : François Lafite. Wostok Press / Maxppp **
**

L'« apartheid » en France ? Pourquoi les mots de Manuel Valls marquent une rupture. Lemonde.fr

**Par Luc Bronner, avant-hier.

Expliquez-nous ... l'apartheid. France Info

Par Gérald Roux et Stéphane Carteron.