Au Mucem, des objets racontent notre histoire du premier confinement

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Au Mucem, des objets racontent notre histoire du premier confinement

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Masque en origami, maquette de musée, pantin baptisé “Corona”, calendrier aux dates barrées, grelots pour faire du bruit au moment du 20 heures... les objets en cours d’analyse au Mucem illustrent le quotidien du confinement.
Masque en origami, maquette de musée, pantin baptisé “Corona”, calendrier aux dates barrées, grelots pour faire du bruit au moment du 20 heures... les objets en cours d’analyse au Mucem illustrent le quotidien du confinement.
© Radio France - Benoît Grossin

Reportage. Des banderoles de soutien aux autorisations de sorties, en passant par des créations artistiques, une centaine d’objets, issus d’une collecte lancée par le musée de société marseillais, sont en cours d’analyse. Coup de projecteur sur un quotidien enfermé, à travers quatre grandes catégories.

Ils commencent à être triés, étiquetés, intégrés dans des bases de données et scrutés de près, en vue de leur possible entrée dans les collections du Mucem, musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille. Une centaine d’objets, classés et stockés dans de simples étagères, au centre de conservation et de ressources, illustrent le quotidien de personnes enfermées, du 17 mars au 11 mai 2020, lors de l’inédit confinement national mis en place en réponse à la pandémie de Covid-19.  

La grande opération participative "Vivre au temps du confinement", lancée au printemps dernier, a permis en réalité, pour le Mucem, de recevoir plus de 600 propositions de dons, venant de toute la France. Beaucoup d’entre elles ne répondaient donc pas aux exigences requises, notamment pour des questions de conservation, comme les denrées alimentaires : paquets de biscottes ou sacs de farine.

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A partir des quatre photos ci-dessous, la responsable du département recherche et enseignement du Mucem, Aude Fanlo, détaille quatre grandes catégories d’objets, analysées par le docteur en sociologie de l'université de Caen, Simon Le Roulley. Il a été recruté pendant deux ans pour cette enquête-collecte, afin de produire une étude socio-anthropologique de la vie quotidienne en temps de confinement. 

Un merci collectif aux professions en première ligne

 Premier objet significatif du premier confinement : cette banderole de soutien au monde professionnel tenue par Aude Fanlo, responsable du département recherche et enseignement du Mucem et le docteur en sociologie Simon Le Roulley.
Premier objet significatif du premier confinement : cette banderole de soutien au monde professionnel tenue par Aude Fanlo, responsable du département recherche et enseignement du Mucem et le docteur en sociologie Simon Le Roulley.
© Radio France - Benoît Grossin

Le Mucem a recueilli un éventail de banderoles qui "témoignent des manières de parler dans l’espace public quand on ne peut y aller et en particulier des banderoles de soutien sous toutes formes de solidarité confinée", explique Ande Fanlo. Avant de retracer le parcours de cette banderole envoyée par une habitante d’un village des Alpilles :

C’est une sorte de 'MERCI' quasi universel à tous ceux qui continuaient à travailler pendant le confinement. La donatrice a confectionné d'abord elle-même sur un bout de tissu ces cœurs, où elle signale le merci aux soignants, le merci aux professeurs, aux ouvriers, aux professionnels hospitaliers, aux pompiers, aux lingères, aux couturières bénévoles... et petit à petit, des voisins ont apporté leurs propres témoignages. La banderole est devenue une sorte de banderole collective de remerciements à tous ceux qui se trouvaient en première ligne, alors que la donatrice et la majorité des gens de son village étaient confinés. Cet objet d’abord accroché à l’extérieur de son domicile a ensuite été exposé à la mairie comme une "effigie" de toute l’activité de la commune.

Un des enseignements de cette banderole pour le sociologue Simon Le Roulley est la mise en valeur d’un grand nombre de métiers pendant le premier confinement :

On a souvent pris le pli d’imaginer le fait que les soignants étaient les seuls à être actifs, alors qu’en réalité tout un tas de professions se trouvaient à travailler. La banderole parle des ouvriers du textile. Elle parle aussi des éducateurs spécialisés. Elle parle des éboueurs, elle parle des couturières. Effectivement, ce sont des professions qu'on a souvent oubliées. Pendant le confinement, beaucoup de gens n'ont pas stoppé leur activité, et notamment dans les métiers les plus généralement disqualifiés.

La banderole s’inscrit dans la catégorie du soutien, au centre de conservation et de ressources du Mucem. Cette catégorie du soutien au monde professionnel rassemble des affiches, des pancartes, des masques et surblouses distribués aux soignants et confectionnés par des gens, au moment de la pénurie en début de confinement, ainsi que d’autres objets significatifs, à l’image de cet appareil à grelots que décrit Aude Fanlo :

C’est un des objets dits du 20 heures qui servaient à faire du bruit depuis son balcon, dans le mouvement de soutien. Comme la banderole, il appartient également à ce qu’on appelle la catégorie transversale des objets auto-fabriqués, auto-bricolés, du "do it yourself". Le donateur a utilisé des grelots datant du XVIIIe siècle, venus d’Inde, qu’il possédait et qu’il a accrochés avec un fil Leroy-Merlin et une fourche Monoprix. C’est devenu son instrument quotidien, utilisé tous les soirs. Il y a une inventivité, de la création artisanale pour les banderoles et pour de nombreux masques dont certains en origami, de la création technique pour un appareil à désinfecter les masques par exemple, des créations ludiques et artistiques, plusieurs manières de se débrouiller avec les moyens du bord, chez soi et en confectionnant des objets avec ce qui est à portée de main.

Les banderoles et les autres objets dits du 20 heures ont permis, souligne Simon Le Roulley, de "baliser" chaque journée de confinement :

Ce moment de la sortie au balcon ou aux fenêtres, pour les gens, était un moyen de ponctuer le quotidien, comme une façon aussi, tous les jours, de se rappeler du temps qui passe et de se dire que la journée était finie quelque part et qu'on passait à autre chose. Ce moment des remerciements était important symboliquement, au-delà du soutien, dans une autre thématique qu'on retrouve souvent dans notre collecte : le passage du temps et le comptage du temps.

Un "junk journal" pour raconter le quotidien

Deuxième objet significatif du premier confinement : ce journal de bord, objet du comptage du temps au quotidien, fabriqué avec des coupures de presse notamment, “parle de soi” avec une “dimension d’exutoire”, selon l'équipe du Mucem.
Deuxième objet significatif du premier confinement : ce journal de bord, objet du comptage du temps au quotidien, fabriqué avec des coupures de presse notamment, “parle de soi” avec une “dimension d’exutoire”, selon l'équipe du Mucem.
© Radio France - Benoît Grossin

Le passage et le comptage du temps sont particulièrement perceptibles dans une autre catégorie de l’enquête-collecte au Mucem, celle des objets à dimension autobiographique. Le journal de bord, ce "junk journal" envoyé par une institutrice du Finistère, est très caractéristique des différentes manières, pour Aude Fanlo, de raconter son quotidien : 

Ce "junk journal", comme la donatrice l'a intitulé, a été fabriqué avec des coupures de presse, des morceaux de manuels de jardinage, des bouts d’étiquettes de paquets colissimo qu’elle a reçus pendant le premier confinement. Le document est très parlant, très humoristique, très virulent parfois. Il témoigne de la diversité des registres. Ça commence par des photographies de Chine : "l'Empire grippée", suivi de : "Hôpital, une crise qui dure" et ensuite la liste du kilo de poireaux, de radis et de chou-fleur qu'il faut acheter, ou encore cette page marseillaise avec des dépliants autour du professeur Raoult. Et puis, juste après, une coupure de presse sur le climat, des morceaux de lectures et de bibliothèques, des pinceaux pour bricoler... il y a une grande diversité qui est très personnelle, très individuelle et qui, en même temps, traduit une expérience collective, en disant des tas de choses, de tout ce de ce qu'on a tous vécu, entendu, compris ou pas compris pendant la période. J’aime beaucoup ce "junk journal", parce qu’il montre bien que parler de soi, c'est aussi parler du déversoir d'actualité que l'on recevait chaque jour et qui était un peu le seul lien qu'on avait avec l'extérieur. J'y vois un moyen très simple et très quotidien de parler à la fois du rapport à son corps, du rapport à ses activités, du rapport au monde tel qu'on le reçoit de manière un peu abrupte.

Alors que le genre autobiographique a "explosé" pendant le premier confinement, selon Aude Fanlo, il ressort de l’ensemble des objets de cette catégorie en cours d’analyse au Mucem, des propositions en trois dimensions, souvent très originales et très inventives :

Des calendriers d'activités barrés, scotchés au bord du frigo, de véritables tableaux ou cassettes en bois où sont disposées chaque jour des activités, des journaux sous toutes formes - écrits, dessinés, brodés - et qui sont des manières d'organiser son temps, en notant les choses faites ou à faire et de mettre parfois aussi le temps derrière soi, comme ce calendrier, où on barre le jour et ce qu'on a fait au fur et à mesure. Et c'est aussi une façon d'avancer : un jour de plus et en même temps un jour de moins, dans cette période-là

Cette catégorie des journaux de bord et calendriers, pour le sociologue Simon Le Roulley, montre aussi que plutôt qu’une évasion, les gens reviennent dans le concret, avec ces productions :  

Ce qui fait le propre d’une communauté humaine, c'est de partager un rapport au temps commun. Sinon, il se crée ce qu'on appelle des dysrythmies ou une désynchronisation des rites communs. L'expérience du confinement a été un moment où les rythmes communs disparaissaient quelque part. On n'avait plus d'activités communes. Ce rapport à l'activité journalière, au comptage du temps, était donc nécessaire, à mon avis, pour les personnes. Afin de baliser, encore une fois, leur quotidien et éviter justement de devenir fou, ou en tout cas, que les choses leur échappent. Et pour ces journaux un peu créatifs, il ne s’agit pas d’une pratique artistique identique à celle qui existe en temps normal. Il s’agit d’une nécessité concrète pour les gens de compter le temps et de se rendre compte que ça passe. Tous les témoignages qui accompagnent les objets sont plutôt joyeux et non pessimistes, pour la plupart. Je pense aussi que de donner leurs objets était une façon pour les gens de mettre toute cette période de confinement derrière eux et de se dire : ça y est, en fait, c'est fini ! Dans ces objets du comptage du temps au quotidien, il y a cette même idée à chaque fois qu'on coche une case, de se dire :  "un de moins !", avec quelque chose d’un peu joyeux à ce moment-là. 

Une dimension d’exutoire, à l’image du “junk journal", dans tous les objets de cette catégorie, est évidente pour Aude Fanlo : 

Il y a de la colère et de l'exaspération, sous forme de catharsis. On a eu des lignes entières de punition : "Je dois rester à la maison, je dois rester à la maison, je dois rester à la maison..." une manière d’écrire et de décrire son quotidien, de passer le temps, mais aussi une manière de le sortir de soi sous toutes ses formes, soit en le distanciant ou en l’ironisant, soit en le griffant !  

L’extérieur peu accessible, jusqu’à rentrer à l’intérieur

Troisième série d’objets significatifs du premier confinement : ce plan de quartier et cette balançoire dans un appartement illustrent une “redécouverte” de l’environnement proche du domicile et un “besoin” d’extérieur, à l’intérieur.
Troisième série d’objets significatifs du premier confinement : ce plan de quartier et cette balançoire dans un appartement illustrent une “redécouverte” de l’environnement proche du domicile et un “besoin” d’extérieur, à l’intérieur.
© Radio France - Benoît Grossin

Le Mucem a reçu également de très nombreux documents sur l’espace de vie contraint et les moyens de pallier l’impossibilité de sortir de son domicile. Une catégorie regroupe des objets qui témoignent du rapport à l’extérieur, souvent inatteignable. Un des deux exemples mis en avant par Aude Fanlo, est un plan de quartier :

Il s’agit du périmètre dessiné au compas du fameux kilomètre de chez soi à ne pas dépasser mais qui a permis souvent une "redécouverte" de son environnement immédiat. On a reçu beaucoup de messages de gens portant une attention extrême au plan de leur quartier, aux espaces de circulation, aux détails du mobilier urbain. Et à partir d’une carte, un outil de sortie qui est un objet utilitaire, le donateur parisien de ce périmètre dessiné au compas, a fait un tirage numérique de grande qualité, qui est une manière encore de reconstruire son expérience et de la mettre à distance. Mais nous avons aussi des cartes IGN tout à fait basiques et des autorisations de sortie administratives.

Simon Le Roulley précise que tous les axes qui sont en blanc, sur le plan, sont les axes de déplacement : 

C’est la mobilité du donateur. Il s’est suivi lui-même au GPS. Toutes les données recueillies lui ont permis d’obtenir un dessin du maillage et du tissu de ses déplacements pendant cette période de confinement. On voit des flux plus importants aux abords de chez lui et le fait aussi qu'il a découvert des endroits de son quartier qu’il ne connaissait pas, en le sillonnant, en prenant des petites rues et en se déplaçant un petit peu plus loin que d'aller simplement vers le métro, qui se trouve près de son domicile, et de partir. La zone du métro est d’ailleurs une des zones les moins empruntées.

Un autre objet significatif de cette catégorie est un des nombreux objets, issus de la collecte, conservés sous forme immatérielle : une balançoire dans un petit appartement. Le choix de la photographie s’est imposé, selon Aude Fanlo, puisqu’"elle n’aurait pas pu dire, seule en elle-même en tant qu’objet, sa fonction, son usage et son intérêt alors que l’image in situ porte en elle véritablement un discours et une information sur le confinement".  

Cette balançoire installée au domicile renvoie au rapport entre l’intérieur et l’extérieur et aussi à des inégalités, souligne Simon Le Roulley :  

Avec ou sans jardin à disposition, le confinement n’a pas été vécu évidemment de la même manière. Et là, typiquement, on a un petit deux pièces où on voit un ordinateur qu'on peut imaginer servant au télétravail posé sur le bar qui sépare l'espace cuisine de l'espace de séjour. On a un synthétiseur qui est posé aussi dans cet espace-là et on a cette balançoire qui a été, selon le témoignage, accrochée à une poutre de l'appartement pour une petite fille qui n'avait plus accès justement à l'extérieur. Cet aménagement de l'espace correspond à cette confusion aussi des temporalités entre temps de travail, temps de loisirs, temps de création, etc. La photo synthétise donc cette espèce de condensation des temporalités, dans un espace restreint et elle symbolise aussi les poly-usages au domicile, c'est-à-dire la façon dont une même pièce peut servir à différentes choses. Et cela quelle que soit l’endroit, en zone urbaine ou en zone rurale, la taille du logement est souvent relative au niveau de vie. 

D’autres témoignages du premier confinement montrent un besoin, ajoute Aude Fanlo, de rapporter à l’intérieur des éléments de l’extérieur :

Cela se voit dans des objets de loisirs ou de sport, comme cette balançoire ou des vélos auto-bricolés ou des faux chevaux de bois. Ce besoin d'extérieur et de nature s’est traduit aussi par des petits bouts de feuilles ou de bois ramassés sur le trottoir ! On a un témoignage immatériel également et tout à fait passionnant de quelqu'un qui a passé des heures à compter les petits animaux vivants chez lui, c'est-à-dire les mites, les papillons, les fourmis... ou comment encore on rapporte de la nature et du vivant, du monde extérieur à l'intérieur de chez soi.

Un colis alimentaire pour élargir la sociologie de l’enquête

Quatrième objet significatif du confinement : ce colis alimentaire, point d'appui d’un approfondissement de la collecte, pour que les populations précaires, souligne le sociologue Simon Le Roulley, “puissent écrire leur part du récit collectif”.
Quatrième objet significatif du confinement : ce colis alimentaire, point d'appui d’un approfondissement de la collecte, pour que les populations précaires, souligne le sociologue Simon Le Roulley, “puissent écrire leur part du récit collectif”.
© Radio France - Benoît Grossin

Une autre catégorie est en cours de constitution, dans le cadre de la collecte sur les objets du confinement. Elle porte sur les publics les plus précarisés. Un seul objet est pour l’instant conservé au Mucem : un symbolique colis alimentaire envoyé par les travailleurs d’un centre médico-social de Marseille. Il s’agit, explique Aude Fanlo, d’"une reconstitution, sans nourriture, sans aliment, il n’y a que des éléments en carton ou en plastique à l’intérieur, pour témoigner, selon les donateurs, des initiatives de solidarité qui ont eu lieu pendant le confinement".

La grande opération participative "Vivre au temps du confinement", lancée au printemps 2020, par le Mucem, par l’intermédiaire de ses comptes sur les réseaux sociaux, a pour l'instant touché en effet un public plutôt privilégié et cultivé. Ce symbolique colis alimentaire est donc un point d’appui pour élargir la sociologie de l’enquête vers les populations les moins favorisées, avec le concours pendant deux ans de Simon Le Roulley, spécialiste des mouvements sociaux urbains :

On s’est rendu compte de ce biais évident, pour la collecte, que des types de population ne soient pas dans le giron des musées et de la communication institutionnelle des musées. Et plutôt que d'aller chercher directement des précaires, nous essayons d'identifier des collectifs qui ont été, au plus fort de la crise, à l'initiative d’entraides alimentaires, mais aussi d'entraides sur les transports, sur des questions administratives et de logement. Des collectifs qui ont pu proposer une nouvelle forme de solidarité, en s'appuyant sur le tissu existant. Ce qui est intéressant, avec ces collectifs-là, c'est qu'ils se sont fait experts malgré eux d'une situation, en voyant quels étaient les besoins et les manques et quels étaient du coup aussi, les objets forts du quotidien des personnes les plus défavorisées. Tout l’enjeu de cette deuxième phase d'enquête est de comprendre ces dynamiques d'entraide, les formes d'organisation, le choix d’informalité de certains de ces collectifs, mais également d'identifier avec eux quels étaient les objets et donc de pouvoir augmenter la collecte.

Un collectif, dans un ancien fast-food de Marseille fait partie des trois collectifs étudiés en ce moment par le sociologue :

Au "McDo de Sainte-Marthe", dans les quartiers nord, ce collectif a mis en place une plateforme d'entraide alimentaire, d’accueil de dons et d’achat aussi de nourriture. Pendant le premier confinement, entre 12 à 20 tonnes ont été distribuées chaque semaine aux personnes les plus précarisées, via notamment des associations qui n'avaient plus d'aide des pouvoirs publics, à ce moment-là. On pourra identifier des objets sociaux et des objets matériels dont la nourriture fait partie. C'est ce que symbolise le colis alimentaire qui est ici, avec des denrées qui ont été mises en représentation. Mais les couches, les produits d'hygiène bébé et les produits d'hygiène féminine ont aussi beaucoup manqué. En objets sociaux, il y avait notamment l'aide administrative pour une compréhension de la situation sanitaire, avec des exigences, des attestations qui pouvaient changer toutes les semaines. C'était très compliqué. Et puis, il y a des objets qui n'en sont pas, mais qui ont une matérialité. Les autres collectifs sur lesquels j'enquête se sont notamment penchés sur la question du mal logement dans les quartiers populaires. Cette question n'est pas un objet identifiable, mais elle a pris une place particulière pendant cette période. Les populations les plus précaires avaient de grandes difficultés à trouver du travail et donc aussi à payer un loyer.

L’objectif dans cet approfondissement de l’enquête-collecte du Mucem est de permettre aux personnes précaires de témoigner à travers leurs objets des effets de la crise et surtout, souligne Simon Le Roulley, "d’écrire leur part du récit collectif du premier confinement". 

D'autres étapes seront à franchir avant une éventuelle exposition de l'ensemble des objets. Une commission d’acquisition devra d'abord donner son feu vert à leur entrée dans les collections du musée. Le Mucem travaille aussi à donner à ces objets du confinement une dimension internationale, en coopérant avec d'autres musées ayant entrepris des initiatives comparables, en Belgique, en Autriche ou encore au Royaume-Uni, sur une mise en commun des résultats de recherche et de collecte.

Le Reportage de la rédaction
4 min