Avez-vous déjà vu... un spectacle qui se déroule pendant un repas, avec pour ambition de brosser les pires travers de la haute bourgeoisie égyptienne ? Dans la série "Le spectacle le plus...", on vous propose aujourd'hui le spectacle le plus satirique : The Last Supper , du metteur en scène égyptien Ahmed El Attar.

L'Autre Scène du Grand Avignon, Védène, à 10 kilomètres du coeur battant du festival. Pour la première de The Last Supper , le public s'est déplacé : la (grande) salle est comble.
Le titre est un simple clin d'oeil à la Cène car finalement, le seul élément qui y fasse penser est une grande table, au centre du plateau.
*Pour moi, la création commence toujours avec un lieu. Je suis tombé sur un livre avec toutes les représentations de la Cène dans l'histoire de l'art, et c'est à partir de cette image là que j'ai voulu construire le spectacle. * Ahmed El Attar
Tout le mobilier, comme la vaisselle, est en plastique transparent, comme une invitation à pénétrer dans l'intimité de la famille égyptienne qui occupe bientôt la scène, comme en témoigne Camille Mauplot, le directeur technique de The Last Supper .
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Il y a le père d'abord, un homme à lunettes gris et sévère, puis Mido, aux allures de geek trentenaire, Mayouche, sa jeune et coquette épouse qui passe son temps à lui flatter le dos, Hassan, le second fils impulsif dont le corps tendu témoigne d’un caractère brutal, Fifi, épouse gironde et voilée d’Hassan, deux enfants, et puis "le Général", lui aussi grisonnant, invité d’honneur de la famille.
Sur scène, c’est l’effervescence : les dialogues fusent, comme s’ils n'étaient pas destinés aux oreilles d'un tiers (le spectateur). Les mots, en arabe, s’entrechoquent, et le public a du mal (il en témoignera à la sortie) à suivre la conversation sur l’écran qui affiche des sous-titres pas toujours synchronisés.

Fifi est au téléphone. Elle parle avec agitation des cheveux d’une amie qui "depuis l’accouchement, sont un désastre ". D’emblée, les dialogues, creux, artificiels, cruels, précisent à qui l’on a affaire : une famille de la haute bourgeoisie dont les travers se révèlent tout au long des 55 minutes que dure la pièce. Intérêt pour les nouvelles technologies motivé par le narcissisme, mépris pour le peuple (les voituriers sont "des vermines ", les salariés, "du très mauvais personnel qu'il faut mener à la baguette " etc.), machisme et perversité (le Général à Hassan, qui raconte avoir pour habitude de violer des femmes : "Tu sais, elles veulent toutes, même si elles ne veulent pas ", ), passion pour l’argent et l'art d’en gagner facilement et rapidement, racisme ("Le problème aux Etats-Unis, c’est les Noirs ")...
Entre chaque tableau, un serviteur apporte des plats peu ragoûtants sur la table : comme une énorme tête de vache à la langue aussi pendue que celles des convives...
Et c'est un éloge du chien, décidément "meilleur que l'humain ", qui vient conclure cette surenchère de persifflages.
Ahmed El Attar explique pourquoi il a choisi de faire de sa pièce un huis clos autour d'un repas :
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Certains spectateurs se sont dits tout à fait acquis au dispositif scénique et au message transmis par* The Last Supper* :
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D'autres ont avoué être un peu désarçonnés par le fait que les défis politiques post- printemps arabes soient évoqués une seule fois dans la pièce : par Mido, qui grâce à ses relations haut placées croit savoir que tout ira mieux très rapidement, et par le Général, qui confirme ses dires : "ça va se calmer. Un mois ou deux et tout rentrera dans l’ordre. "
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Trouvant le spectacle trop consensuel, certains se sont demandé si Ahmed El Attar n'avait pas été victime de censure. Nous lui avons posé la question :
Ahmed El Attar explique n'avoir pas été victime de censure
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D'autres encore, s'interrogeaient sur le fait que cette haute bourgeoisie et ses odieux travers, brossée par Ahmed El Attar, aurait tout aussi bien pu être d'une autre nationalité. C'est tout l'intérêt, répond le metteur en scène, pour qui les révolutions ne devraient jamais précéder de profonds changements de mentalité dans nos sociétés :
Ahmed El Attar, sur sa critique de la bourgeoisie
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