La double explosion dans le port de Beyrouth a frappé une ville déjà à genoux. Cette situation catastrophique a mis un coup d’arrêt au renouveau artistique qui s’était emparé de la ville depuis la révolution d'octobre 2019.
Depuis l’automne 2019, des manifestants libanais réclament le départ de tous les dirigeants jugés corrompus et défendent une vision du monde plus sociale, féministe et loin du système confessionnel actuel. Cette révolution appelé "Thawra", avait libéré la parole et donné un nouveau souffle aux artistes.
Pour Imane Assaf, cofondatrice de l'association Art of change : "Quand la révolution a commencé, il y avait beaucoup d’énergie positive, d’enthousiasme pour changer les choses et puis avec les explosions c’est comme si tout le monde était déprimé. Les artistes n’ont plus l’énergie pour peindre."
Un art inspiré de la révolution
Roula Abdo s’est engagée dans la “Thawra” dès les premiers jours en tant que militante et en tant qu’artiste .
Quand la révolution a commencé, c’est comme si quelque chose s'était réveillé en moi et m’a poussé à emmener mon art dans la rue. Roula Abdo, artiste libanaise
Elle a peint des mains qui forcent symboliquement une ouverture sur le mur érigé autour du Parlement pour éloigner les manifestants, une fresque qui a été partagée des milliers de fois sur les réseaux sociaux.
Ce que je faisais dans mon atelier n’était pas seulement personnel, en fait ça représentait les revendications de tous ces gens dans la rue. Roula Abdo
C’est la Thawra qui lui a donné la force d’exposer son art aux yeux de tous et qui est une source d’inspiration
À chaque fois que je dessine quelque chose c’est soit en réaction à un événement qui s’est passé pendant la révolution, soit lié au lieu où j’ai dessiné. Roula Abdo
Comme le portrait d'un manifestant peint par Roula Abdo à l'endroit même où il a été tué par des militaires.
Des artistes aux revendications communes
Au cœur de son travail : le noir et blanc, les yeux, les mains, etc.
J’ai toujours utilisé les figures humaines dans mon art, avant la révolution et maintenant. Quand j’ai commencé les dessins sur la révolution j’ai continué à penser que les gens avaient besoin de quelque chose auquel s’identifier. Roula Abdo
La street artiste fait partie d’une vague de jeunes artistes qui ont émergé avec la révolution, utilisant les murs érigés par le gouvernement comme moyen d'expression. On retrouve dans leurs œuvres des revendications communes :
- l'anticorruption
- la justice sociale
- le féminisme
- l'unité du peuple libanais
Des fondations comme Art of Change, regroupent ces artistes pour les faire travailler ensemble et rendre leurs œuvres plus visibles. Depuis les explosions, l’association utilise l’art pour soulever des fonds et redonner de l’espoir aux Libanais
Nous sommes tous traumatisés d’une façon ou d’une autre. Donc c’est vraiment difficile pour les artistes d’avoir des idées nouvelles ou créatives mais on espère qu’ils vont retrouver l’inspiration, parce qu’au Liban il faut toujours se battre et chercher de nouvelles sources d’inspirations pour survivre. Imane Assaf, cofondatrice d'Art of change