'Capillum' : recycler des cheveux pour en faire des produits naturels et écologiques

Publicité

'Capillum' : recycler des cheveux pour en faire des produits naturels et écologiques

Par
Clément Baldellou et James Taylor, les deux cofondateurs de Capillum recyclent les cheveux en tapis de paillage
Clément Baldellou et James Taylor, les deux cofondateurs de Capillum recyclent les cheveux en tapis de paillage
- Capillum

Demain l'éco. Une jeune pousse clermontoise s'est lancée en 2019 dans le recyclage du cheveu, matière première inépuisable aux qualités prodigieuses d'absorption. 'Capillum' la collecte, recycle et transforme en tapis de paillage, boudins anti-pollution et bientôt en produits biomédicaux à base de kératine.

L'économie circulaire n'a pas fini de nous surprendre. Le cheveu jusque là considéré comme un déchet sans importance qui partait directement à la poubelle est devenu une précieuse matière première pour les deux jeunes fondateurs de Capillum. Fraichement diplômés de l'ESC Clermont, Clémont Baldellou et James Taylor ont fait de leur projet étudiant une entreprise au développement rapide qui en moins de trois ans emploie déjà 8 salariés.

Conscience écocitoyenne

"Qui aurait cru qu'un jour on puisse créer de l'emploi avec nos cheveux ?" demande non sans un peu fierté dans la voix, Clément Baldellou. Avec son associé, il fait en tous cas preuve d'un bel enthousiasme qu'ils ont réussi à partager avec toute une profession. Car les cheveux, c'est bien en tout premier lieu sur le sol des salons de coiffure qu'on les trouve.

Publicité

On voulait retirer les cheveux du circuit des déchets, comme on n' allait pas prendre les cheveux sur la tête des gens, notre premier défi a été de fédérer les coiffeurs pour créer une filière de recyclage

Et quoi de mieux qu'un label pour créer une filière par l'apport volontaire des coiffeurs ? Capillum a donc imaginé un système de récompense surfant sur la prise de conscience écologique des citoyens. Pour 40 euros par an, les coiffeurs peuvent être référencés sur la carte interactive de leur site comme "coiffeurs écoresponsables" et recevoir un kit de recyclage avec notamment un bac pour stocker les cheveux. L'autre proposition coûte 99 euros par an et permet une collecte des cheveux directement au salon par Urby, la filiale logistique du groupe La Poste.

À l'image de Landry Desbre, coiffeur à Clermont-Ferrand, ils sont aujourd'hui plus de 300 professionnels chaque mois en France à rejoindre leur démarche.

Pour nous, coiffeurs, ce n'est pas bien difficile de stocker des cheveux au lieu de les jeter. Il n'y a pas de contrainte matérielle, peu de contrainte financière et nous pouvons valoriser notre action, comme un acte écoresponsable auprès de nos clients.

Le reportage d'Annabelle Grelier sur cette jeune entreprise de recyclage de cheveux

3 min

Les coiffeurs partenaires peuvent alors se démarquer à l'aide d'un kit de communication qui leur permet de toucher et attirer une clientèle plus soucieuse de la planète.

L'équipe de coiffeuses du salon Shine à Clermont Ferrand de Landry Desbre ont été les premières à s'engager dans la collecte de cheveux avec  Nina Méchabet et Clément Baldellou de Capillum
L'équipe de coiffeuses du salon Shine à Clermont Ferrand de Landry Desbre ont été les premières à s'engager dans la collecte de cheveux avec Nina Méchabet et Clément Baldellou de Capillum
© Radio France - Annabelle Grelier

Depuis leur création, Capillum a collecté et recyclé 70 tonnes de cheveux.

Le cheveu comme matériau d'avenir

Le cheveu peut absorber jusqu'à 8 fois son poids. Une qualité qui a été depuis longtemps éprouvée lors d'opérations de dépollution. Des boudins de cheveux, particulièrement absorbants, peuvent en effet aider à lutter contre les marées noires. La technique a déjà été utilisée en 2010 au large de la Nouvelle Orléans ou encore en 1978 lors du naufrage de L'Amoco Cadiz. Mais c'est en 2020 lors du naufrage du vraquier japonais au large de l'île Maurice,  que la jeune pousse clermontoise a fournit des boudins absorbants à deux structures françaises spécialisées dans la préservation des océans, l'ONG Octop'us et l'association Project Rescue Ocean.

Les tapis de paillage développés et brevetés par Capillum en cheveux et  laine sont biodégradables
Les tapis de paillage développés et brevetés par Capillum en cheveux et laine sont biodégradables
- Capillum

Capillum ne s'est pas arrêtée là. A la différence d'associations qui œuvraient déjà à collecter des cheveux pour aider des ONG dans un but humanitaire et écologique, la jeune entreprise a résolument décidé d'assoir le recyclage du cheveu sur un modèle d'affaire économiquement viable.

L'écologie est difficilement dissociable de l'économie. Pour avoir de l'impact, nous sommes convaincus qu'il faut donner de la valeur au cheveu et le transformer en ressource qui a son marché.

Capillum a pour objectif de développer des produits à base de cheveu. La petite entreprise vient ainsi de mettre au point des tapis de paillage biodégradables pour soutenir l'agriculture. Le cheveu est naturellement isolant, transformé en paillage il permet de limiter les arrosages, soit en ralentissant l'évaporation de l'eau des sols, soit en fixant l'humidité de l'air.

Naturellement isolant et absorbant, le cheveu est un bon matériau pour limiter la consommation d'eau et l'arrosage.
Naturellement isolant et absorbant, le cheveu est un bon matériau pour limiter la consommation d'eau et l'arrosage.
- Capillum

Capillum est la première entreprise à avoir crée un projet vertueux autour de la valorisation du cheveu affirme Clément Baldellou.

Les tapis de paillage que nous commercialisons n'est pas seulement une seconde vie pour un déchet. Nous avons trouvé une vraie application dans les espaces verts et jardins en remplaçant des produits plastiques ou pétrosourcés. Nos paillages sont 100% naturels et utilisables pour l'agriculture biologique.

Composé d'un mélange de cheveu et de laine, l'entreprise a déposé pas moins de trois brevets pour protéger son procédé. Proche des techniques de feutrage, la production est faite dans le Nord de la France. Clément Baldellou qui n'est jamais à court d'argument, prétend que leur innovation contribue même à garder des savoirs faire dans les régions en leur fournissant de l'activité.

La prochaine étape, leur "étoile polaire" comme disent les deux jeunes entrepreneurs sera d'extraire la kératine du cheveu pour élaborer des produits biomédicaux, comme de la crème pour accélérer la cicatrisation de la peau. Devant un tel potentiel, ils affichent leur ambition : monter à Clermont-Ferrand la première usine et industrie au monde de recyclage du cheveu.

> Découvrez ici tous les reportages de 'Demain l'éco' sur la transition économique