Coronavirus : le "Quoi qu’il en coûte" en 6 questions
Par Marie ViennotBulle économique. Pour limiter la crise économique liée au coronavirus, les gouvernements alignent les plans "Quoi qu’il en coûte". Le montant de la facture, on ne le connaît pas encore. Qui va payer au final ? Aurait-on trouvé une source d’argent "magique" ?
Pluie de milliards sur le monde pour endiguer la récession liée à la Covid-19. Depuis la mi mars, les plans se succèdent, tous les pays du monde en adoptent. La France en est à son quatrième projet de loi de finances rectificative, ministres et Président affirment que "500 milliards d’euros" ont été mobilisés pour notre économie.
"Quoiqu’il en coûte" : tel était l’engagement que j’avais pris devant vous dès le mois de mars (…). Nous avons décidé des plans massifs pour les secteurs les plus durement touchés : l’industrie automobile, l’aéronautique, le tourisme, la culture, la restauration, l’hôtellerie, et nous poursuivrons. Au total, nous avons mobilisé près de 500 milliards d’euros pour notre économie, pour les travailleurs, pour les entrepreneurs, mais aussi pour les plus précaires. C’est inédit. Emmanuel Macron, le 14 juin 2020.
Publicité
Après des années à compter les millions qu’il fallait économiser ici ou là, voici venu le temps des milliards déversés sur l’économie pour limiter la fièvre coronavirus et minimiser les conséquences néfastes (sur le plan économique) du confinement. A ces milliards annoncés par les Etats s’ajoutent les milliards des Banques centrales.
"Quoi qu'il en coûte", la formule s'inspire du "Tout ce qu'il faudra" de la Banque centrale européenne qui avait permis de "sauver" la zone euro. Mais le "Quoi qu'il en coûte" des Etats n'est pas celui des Banques centrales, et leurs milliards ne pèsent pas la même chose pour le citoyen et la citoyenne comme nous le verrons plus loin.
Essayons d’y voir plus clair, et pour cela appliquons une méthode, simple et basique, celle des 5 et même 6 W des journalistes.
- Why : Pourquoi ce "quoi qu'il en coûte" a surgi ?
- How much : Combien cela coûtera ?
- What : De quels coûts parle-t-on ?
- Where : Où trouver l'argent ?
- Who : Qui va payer ?
- When : Quand faudra-t-il payer ?
- Question bonus : quelles solutions possibles pour éviter la crise après la crise ?
NB : Cet article a été publié dans sa première version le 28 mars 2020, il a été profondément remanié le 23 juin 2020, puis le 6 novembre. Il est très long car il combine les informations factuelles (sur les dépenses pour répondre à la crise), et des explications sur le circuit de ces milliards, qui ne sont pas tous les mêmes. Il y a milliards, et milliards, et ceux qui sont annoncés ne sont pas toujours ceux qui sont dépensés !
"Quoi qu'il en coûte", POURQUOI ce nouveau mantra ?
La santé n'a pas de prix. Le gouvernement mobilisera tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies quoi qu'il en coûte. (…)
Nous n'ajouterons pas aux difficultés sanitaires la peur de la faillite pour les entrepreneurs, l'angoisse du chômage et des fins de mois difficiles pour les salariés. Aussi, tout sera mis en œuvre pour protéger nos salariés et pour protéger nos entreprises quoi qu'il en coûte, là aussi. Emmanuel Macron lors de son adresse aux Français du 12 mars.
Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.
Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.
"Quoi qu’il en coûte…" est depuis cette intervention du chef de l'Etat devenue une expression récurrente du gouvernement.
Nous aiderons toutes les entreprises dans lesquelles l’Etat a des participations, Air France, Renault, et qui sont chahutés sur les marchés boursiers. Quoi qu’il en coûte, nous serons à leur côté. Bruno Le Maire, ministre des Finances, vendredi 13 mars, sur RMC.
Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.
Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.
Quelques jours plus tard, le Premier ministre présente lors du Conseil des ministres du 18 mars la déclinaison législative des mesures mises en place pour répondre à la crise.
Le cadre fixé par le président de la République est clair : quoi qu’il en coûte, soutenir nos entreprises, soutenir les salariés français, soutenir les indépendants, soutenir les emplois, soutenir les actifs, aider les plus vulnérables. La solidarité nationale doit jouer à tous les niveaux pour en limiter les conséquences tant pour les entreprises que les salariés et permettre à l’économie française de surmonter ce moment difficile...
Edouard Philippe, le 18 mars 2020.
Plus qu’un élément de langage, cette expression "quoi qu'il en coûte" est une formule "anti-panique", destinée à montrer à tous (et notamment aux marchés financiers) que l’Etat sera là, quoi qu’il arrive et DONC, quoi qu’il en coûte.
L’économie est aussi (et surtout en période de crise) une affaire de confiance. Voilà pourquoi on est passé en un éclair de "il faut limiter les dépenses publiques, c'est une responsabilité vis à vis de nos enfants qui vont sinon payer l'addition", à "ouvrez toute les vannes, pas de limites aux dépenses publiques !".
"Quoi qu'il en coûte" : ce sera COMBIEN ?
Disons le tout de suite, on ne sait pas ce que va « coûter » la crise du coronavirus. Pour les Etats, ce qui se profile, c'est ce qu'on appelle l’effet ciseau. Moins de recettes, d’impôts, de taxes prélevées, puisque les revenus de tous diminuent, et en même temps plus de dépenses.
Côté dépenses, le gouvernement en est à son troisième "remaniement" budgétaire, alors qu'il n'a pas encore présenté, ni budgété, le plan de relance global dont a encore parlé le Président de la République le 14 juin.
Côté recettes, impossible de savoir à ce jour de combien elles auront chutées par rapport aux prévisions faites fin 2019 pour l’année 2020 dans la Loi de finance initiale.
Ce qui permet d’avoir une idée de l’ampleur de ce coût, c’est la mesure du PIB et de sa chute en 2020 (car les recettes de l'Etat et de la Sécurité sociale sont proportionnelles à l’activité économique), or, les prévisionnistes avouent eux même être dans le brouillard et l’incertitude. La chronique ci-dessous détaille leurs hypothèses, doutes et certitudes pour les prévisions présentées ce printemps.
A lire/ écouter : 2020 : les prévisions les plus sombres et incertaines de tous les temps
Preuve de cette grande incertitude sur les prévisions, toutes celles qui avaient été faites à la fin mars (date initiale de publication de cet article) ont été largement sous estimées. L’OCDE estimait alors que pour chaque mois confiné, le PIB des grandes économies chuterait de 2%.
Si on considère que le confinement a duré trois mois, avec ce calcul, le PIB de la France aurait dû chuter de 4,7% (1,3% de croissance prévu avant la pandémie -6% = -4,7%), or l’estimation de l’OCDE dorénavant pour la France est -11,4% au mieux, et -14% au pire !
En mars, la Banque Centrale européenne prévoyait 5% de récession en 2020 pour la zone euro, lors de ses dernières prévisions (en juin), elle prévoit dorénavant 8,7%.
"Quoi qu'il en coûte" : de 45 milliards à 500 en trois mois
Pour comprendre comment on est passé de 45 à 500 milliards, il faut suivre en détail les projets de loi de finances rectificative (PLFR). Le dépôt d'un PLFR est une pratique courante (mais pas automatique), qui permet de corriger dans l’année la loi de finances initiale (LFI) votée en décembre par le Parlement.
Le gouvernement est obligé de présenter un nouveau projet pour entériner les nouvelles mesures annoncées, car c’est au parlement de voter les dépenses et les recettes de l’Etat.
- Le PLFR 1 (désolée pour les acronymes) est devenu une loi, le 23 mars 2020.
- Le PLFR2, est devenu une loi le 25 avril 2020
- le PLFR3 voté le 23 juillet.
- le PLFR 4, présenté le 4 novembre en conseil des ministres
Je vais commencer par détailler le PLFR 1, ainsi vous comprendrez la logique qui s'applique aux suivants. Il n'y a que les mesures et les montants qui changent.
PLFR1 : répondre à l'urgence
Dans le tableau ci-dessous, vous voyez clairement quelles sont les rentrées en moins pour le budget de l'Etat prévues par le PLFR n°1 : 10,7 milliards d'euros (2,2 Mds en moins pour la TVA, 6,6 milliards pour l’impôt sur les sociétés, 1,4 Mds pour l’impôt sur le revenu).
Côté dépenses en plus, le montant est estimé pour le moment à 6,3 milliards (5 milliards et demi pour le chômage partiel et 750 millions pour le fonds de solidarité). Rendez-vous sur le site du Sénat pour de plus amples détails sur ce PLFR.
6,3 milliards de "dépenses spéciales Coronavirus" budgétées, alors que le gouvernement parle lui d'un plan à 45 milliards d'euros, d'où vient la différence ?
On retrouve cet écart dans les deux PLFR suivants. Dans le PLFR3, il y a 13,6 milliards de crédits budgétaires mais le gouvernement parle d'un plan avec 40 milliards d'euros de dépenses en plus.
C’est là qu’il faut s’attarder un peu sur le QUOI, du quoi qu’il en coûte…
Il y a des milliards qui coûtent, d'autres on ne sait pas, d'autres dont on ne parle pas...
Dans ce QUOI, il y a des dépenses nettes, qu’on ne récupérera pas, typiquement le chômage partiel, et le fonds de solidarité, mais l’essentiel, 35 milliards, sont des reports de charges et d’impôts. Fin mars, l’Etat acceptait de ne plus collecter mais il n’effaçait pas les ardoises (ce qui a changé depuis dans le PLFR3).
Voilà pourquoi il ne sert à rien de comparer les montants des plans annoncés en Italie, en France, en Allemagne, ou aux Etats Unis, car dans les milliards jetés sur la table, certains vont coûter, d’autres sont des prêts, et d’autres ne vont peut être rien coûter.
A lire / écouter : Coronavirus : où vont les milliers de milliards de dollars du plan américain
Le tableau ci-dessous publié en mars par Quartz, un site d’information économique américain, fait ce comparatif, mais il illustre parfaitement la difficulté à comparer les plans d’un pays à l’autre. Car dans les 800 milliards du plan allemand a été intégrée la garantie qu’apporte l’Allemagne pour les prêts bancaires. La France, aussi, apporte une garantie de l’Etat à tous les prêts qui seront contractés (entre le 16 mars et le 31 décembre 2020), pour 300 milliards. Or, pour ce graphique, ce montant n’a pas été pris en compte….
Pour comparer les plans entre eux, il ne faut donc pas comparer les montants mais les mesures prises. Certaines mesures vont coûter de l’argent (les aides directes, le fonds de solidarité, la compensation du temps partiel), d’autres on ne sait pas.
Quand l’Etat français annonce garantir les nouveaux prêts à hauteur de 300 milliards, cela peut lui coûter entre 0 et 300 milliards. 0, si aucun nouvel emprunteur ne fait défaut, 300 le maximum autorisé.
Lors du débat à l’Assemblée nationale qui a précédé le vote de ce premier Projet de loi de finance rectificatif (voté à l'unanimité au final), des députés se sont inquiétés que le gouvernement ne fasse aucune provision pour ces 300 milliards de garanties. Il n'en n'a pas fait non plus dans le PLFR2 ou le PLFR3, hypothèse très optimiste, car cela revient à considérer qu'aucune des entreprises qui a contracté un Prêt Garanti par l'Etat n'aura des difficultés à le rembourser.
Autre parti pris très fort de Bercy : la non prise en compte des conséquences de la crise sur les comptes des organismes de Sécurité sociale.
Il n’y a en effet pas que l’Etat qui va connaître l’effet ciseau. Cotisations sociales en moins, dépenses de santé en plus, chômage partiel à indemniser en partie (l’Etat prend à sa charge 5,5 milliards, mais l’Unedic va aussi être mis à contribution), malades plus nombreux… combien cela va coûter à la Sécurité sociale ?
A ce jour, le déficit estimé pour la Sécurité sociale est de 52 milliards d’euros, mais c’est une prévision pour l’année 2020, cela peut être plus, ou moins. 52 milliards de « trou », contre 5,4 milliards prévus avant la crise du coronavirus, 10 fois plus, mais le plus frappant, c’est que le gouvernement n’a pas encore présenté de Projet de loi de Financement de la Sécurité sociale rectificatif.
Il ne compte pas le faire, et a déjà réglé cette question du «trou » laissé par la dette Covid-19, en transférant 136 milliards d’euros à la Cades. Cela revient à augmenter les prélèvements sur les assurés sociaux mais après 2024. J’explique ce tour de passe-passe qui permet de dire qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôts dans l’immédiat.
A lire / écouter : Avenir de la Sécurité sociale : les arbitrages se font dès maintenant
Pour résumer le premier plan français pour faire face à cette crise :
- Chômage partiel : 8,5 milliards dont 5,5 pour l’Etat (coût estimé pour deux mois)
- Aide de 1 500 euros pour les entreprises ou indépendants qui ont perdu plus de 70% de leur chiffre d’affaires : coût de 1 milliard pour un mois (dont 250 millions financés par les régions)
- Report des charges fiscales et sociales : effort de trésorerie de l’Etat de 35 milliards d’euros ·
- Garantie des emprunts bancaires émis : 300 milliards. Pas de provision
- Pertes pour le budget des ASSO (Associations de Sécurité sociale) : 20 milliards d’euros (au moment du PLFR1).
Le premier Projet de loi de Finance rectificatif avait été construit en tablant sur le fait que le confinement allait durer un mois. Un deuxième a donc été présenté courant avril.
PLFR2 : la continuité du premier
Le nouveau plan du gouvernement français n’est pas très différent du premier pour les mesures qu’il met en place. S’il passe d’un montant global de 45 milliards à 100 milliards d'euros, c’est parce que les coûts budgétés il y a un mois ont été dépassé.
- Chômage partiel : 20 milliards au lieu des 8,5 milliards prévus dans le PLFR1.
- Fonds de solidarité : 6 milliards au lieu d’un milliard prévu dans le PLFR 1.
- Report de charges fiscales et sociales. Dépenses exceptionnelles : 7 milliards au lieu de 2 milliards
- Déficit estimé pour 2020 : 185,5 milliards au lieu de 109 milliards dans le PLFR1, et 93 milliards en Loi de Finance Initiale (LFI)
- Croissance du PIB pour 2020 estimée à -6% et non plus -1% dans le PLFR 1
PLFR3 : une communication trompeuse
Ce troisième plan budgétaire acte une dégradation plus grande de la conjoncture économique. La récession estimée pour 2020 passe de -6% à -11%, et le déficit prévisionnel de 185 milliards à 211.
Dans la continuité des deux précédents, le PLFR3 accroît les dépenses prévues pour le chômage partiel et le fonds de solidarité. Il met également en œuvre des décisions prises au niveau européen et mondial (le FMI ayant besoin de nouvelles ressources pour aider les pays pauvres les plus en difficultés). Il prévoit aussi des mesures pour les jeunes et les précaires pour un milliard au total, et la compensation à la Sécurité sociale pour 3 milliards d’euros des exonérations de cotisations accordées dans les différents plans de soutien (culture, tourisme ...).
Au total les nouveaux crédits budgétaires totalisent 10,7 milliards d’euros (et non 13,6 comme cela avait été annoncé en amont de la présentation du projet).
Pourtant, l e chiffre mis en avant dans le document officiel de ce PLFR3 (et dans les différentes interviews de Gérald Darmanin, et Bruno Le Maire) est de 43,6 milliards.
- le plan tourisme, qui permet la mobilisation de 18 milliards d'euros au profit du secteur,
- le plan de soutien au secteur automobile de 8 milliards d'euros,
- le plan de soutien au secteur aéronautique de 15 milliards d'euros,
- le plan en faveur du secteur des startups et entreprises technologiques, pour un montant total de 1,2 milliards d'euros dont 700 millions d'euros issus de fonds publics,
- le plan en faveur du secteur culturel, pour un total de 1,3 milliards d'euros.
Mais dans ces montants, on trouve aussi bien des subventions, que des exonérations de cotisations, ou des prêts garantis par l’Etat.
Ajouter toutes ces mesures c’est ajouter des choux et des carottes, mais cela permet d’annoncer des « gros » chiffres. Plus gros encore, le chiffre de 500 milliards d’euros que met en avant Emmanuel Macron dans son intervention du 14 juin.
Pour arriver à ce chiffre, le Président intègre 327 milliards d’euros de dispositifs exceptionnels, dont 300 milliards de prêts Garantis par l’Etat, alors que moins de 90 milliards ont été accordés à la présentation de ce PLFR 3, et que ces milliards sont des prêts, pas des crédits budgétaires.
Au niveau national, le dispositif de prêts garantis par l’État (PGE) à hauteur de 300 Md€ se poursuit, avec près de 86 Md€ de PGE validés au 8 juin. PLFR 3.
Difficile de s’y trouver entre ces milliards qui sont de diverses natures, mais on peut trouver le montant des dépenses exceptionnelles faites par la France (ou qu’elle prévoit à ce jour de faire en 2020) dans le tableau ci-dessous. J’ai entouré en orange la colonne sur laquelle s’attarder.
Le montant à retenir est 56,9 milliards, dont 51 milliards pour le plan d’urgence, 4,5 milliards de nouveaux crédits aux ministère, 1,9 milliards pour l’UE.
Dans le détail :
- 31 milliards dont 20,5 à la charge de l’Etat, et 10,5 pour l’Unedic
- 8 milliards pour les dépenses de santé (achat de matériel, prime aux soignants, indemnité aux professionnels de santé, arrêt maladie etc… ).
- 8 milliards : fonds de solidarité pour les entreprises
- 3 milliards pour financer les exonérations de cotisation sectorielles
- 3 milliards de crédits pour le secteur automobile
- 1 milliard : prime pour les indépendants
- 1,5 milliards de « crédits supplémentaires d’urgence portés par l’État ».
- 1 Md€ en faveur des jeunes et des précaires
- 500 millions : décalage de la réforme de l’assurance chômage et la prolongation de droits pour les demandeurs d’emploi
- 500 millions d’avances remboursables pour soutenir les PME
Entre les 500 milliards "mobilisés", et les 57 milliards qu’il est prévu de "dépense", la marge est donc très grande.
Alternatives Economiques s’est aussi penché sur le sujet, et remarque notamment que pour les dépenses prévues pour les collectivités locales, le chiffre de 4,5 milliards que l’on retrouve partout dans la communication de Bercy n’est en réalité que de 2,5 milliards, le reste devant être « inscrit dans le ou les budgets ultérieurs ».
Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.
Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.
L’examen de ce troisième PLFR3 a commencé le 23 juin à l’assemblée, il a été adopté le 23 juillet. Ici le texte voté.
PLFR 4 : pour finir l'année et financer le deuxième confinement
Ce nouveau projet était prévu avant le deuxième confinement. Il tient compte de la très forte croissance du PIB au troisième trimestre (+18,2%) mais aussi de la mise à l’arrêt d’une partie de l’économie depuis le 30 octobre. A la clef 20 milliards de dépenses en plus.
- 10,8 milliards doivent aller au fond de solidarité (qui passe à 10 000 euros maximum par mois au lieu de 1500 auparavant),
- 3 milliards iront au chômage partiel,
- 3 milliards encore pour les exonérations de cotisations sociales,
- Quasi 2 milliards sont aussi budgétés pour l’augmentation des dépenses de santé
Le soutien aux plus précaires, étudiants, moins de 25 ans ne pèse pas lourd en regard, 1 milliards 100 millions pour ce 4ème budget rectificatif.
Si on additionne toutes les dépenses supplémentaires votées depuis le début de la crise sanitaire, ce 4ème projet de budget compris, le soutien à ceux et celles qui n’ont pas de travail stable représente 3,6 milliards sur 86 milliards de crédits débloqués par l’Etat.
Quand on additionne on tombe pile sur 20 milliards d’euros, mais en fait, l’exécutif a prévu de la marge, car les aides votées lors des précédents budgets n’ont pas été entièrement dépensées. Pour le chômage partiel, 31 milliards ont été budgétés mais 22 versés.
Bercy se défend d’avoir prévu large au cas où le confinement se prolongerait et explique que l’argent prévu en trop permettra de ne pas arrêter les aides du jour au lendemain.
Aucune nouvelle recette n’est prévue dans ce budget, la baisse des impôts permettra de relancer la croissance, c’est le credo du gouvernement.
Le précédent record de déficit de 2009, 138 milliards d’euros est largement dépassé, puisque ce dernier projet de loi de finances rectificatif table sur 248 milliards, financé par de la dette, qui n’est absolument pas une préoccupation du gouvernement, pour le moment.
"Quoi qu'il en coûte" : Où trouver l'argent ?
La France est déjà en déficit, elle n’a donc pas de "réserves" pour ces nouvelles dépenses et ces moindres recettes. Il va falloir les emprunter sur les marchés financiers. Cette procédure est habituelle. Chaque semaine, l’Agence France Trésor, logée à Bercy, émet des titres de dette de la France, les vends à des banques, qui ensuite, revendent ces "bons du trésor" à des investisseurs.
Si vous voulez savoir comment cela se passe plus en détail, trois chroniques à lire ET à écouter :
- 8 juin 2016 : La finance aime toujours la France
- 29 décembre 2016 : Menaces sur la dette française en 2017
- 1er juin 2017 : Macron Bonds : la nouvelle coqueluche des marchés
Pour tenir compte des nouveaux besoins de financement de l’Etat, l’Agence France Trésor a présenté à chaque PLFR un plan de financement. Le dernier en ligne ici.
En 2020, l’Agence France Trésor devait emprunter 205,5 milliards d’euros (selon la Loi de la Finance Initiale) à moyen long terme, et après le 3ème PLFR, ce sera 260 milliards d’euros.
Elle va aussi émettre des titres de dettes à court terme (c’est-à-dire remboursable sur moins de 10 ans) pour 79,9 milliards. Les conditions d'emprunt restent toujours très favorables et les taux sont négatifs à court terme, autrement dit, ceux qui achètent de la dette française sont prêts à payer pour en acheter, et ne demandent pas d’intérêt.
Mi-mars , au plus fort du stress financier, l’agence France Trésor a pu emprunter, 8,4 milliards à 3 ans, 5 ans, 8 ans, et quasi 10 ans, et les taux sont restés négatifs.
Si les taux sont négatifs, cela veut dire qu’on va rembourser moins que ce qu’on aura emprunté… MAIS, il faudra quand même toujours rembourser. A moins que….
Et c’est là qu’il est temps de vous parler des banques centrales, et de leurs milliards à elles, pour que vous compreniez la différence entre les "milliards injectés" par les banques centrales, et les "milliards budgétés" par les Etats pour répondre à la crise. Ce qui nous mènera aux dernières questions, "Quoi qu'il en coûte", à qui ? et Quand ?
"Quoi qu’il en coûte" : d’où vient cette expression ?
En utilisant ce "Quoi qu’il en coûte", les autorités françaises s’inspirent du "Whatever it takes", (Tout ce qu’il faudra), prononcé par Mario Draghi, alors président de la Banque Centrale Européenne en pleine débâcle de la zone euro en juillet 2012.
Cette seule phrase avait eu un effet qu’on pourrait quasi qualifier de magique. Après qu’il l’eut prononcé, tous les fonds spéculatifs ont cessé de "parier" sur l'éclatement de la zone euro.
Comme par enchantement ? Non. Parce qu’ils savaient qu’ils ne pouvaient pas lutter contre la Banque Centrale Européenne, si elle faisait "Whatever it Takes", tout ce qu’il faudra. Et Mario Draghi avait même ajouté : "et croyez moi, ce sera assez".
Les fonds spéculatifs, ou hedge funds, sont des fonds qui promettent de très forts rendements à ceux qui leur confient leur argent. Si vous voulez aller plus loin sur ce sujet et voulez entendre la formule utilisée par Mario Draghi in extenso, ci dessous, un billet économique consacré à ce qu'on a aussi appelé "Le Draghi Put".
Argent "magique" des Banques Centrales…
La grande différence entre le "Tout ce qu'il faudra" de Mario Draghi, et le "quoi qu’il en coûte" des Etats est que les Etats n’ont pas des moyens illimités, contrairement aux banques centrales.
Les banques centrales ont le pouvoir de création monétaire. Quand un banquier central dit "injecter des milliards dans l’économie", il n’a qu’un jeu d’écriture à faire, il n’a pas à récolter cet argent (contrairement aux Etats qui doivent collecter des taxes et impôts).
Dans la vidéo ci-dessous, Ben Bernanke, le président de la Fed pendant la crise de 2008 (la Fed, ou Réserve fédérale américaine, est la banque centrale des USA) explique en 30 secondes comment une banque centrale créé l’argent. Ben Bernanke est alors interrogé sur le sauvetage des banques qui a eu lieu en 2008.
Est-ce l’argent des contribuables que la Fed a dépensé ? demande le journaliste. Ce n’est pas l’argent des contribuables répond Ben Bernanke. Les banques ont des comptes à la Fed, un peu comme vous avez un compte dans une banque commerciale. Pour prêter à une banque, on utilise simplement un ordinateur, et on augmente le montant de ce qu’elle a sur son compte. C’est comme si on imprimait des billets, ce n’est pas littéralement ce qu’on fait (NDLR puisque tout passe par ordinateur et qu’on imprime pas les billets), mais c’est assez proche de cela.
Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.
Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.
Argent non magique des Etats…
Les Etats, eux, ont le pouvoir de lever des impôts et des taxes, mais ils n'ont pas le pouvoir de création monétaire. La France ne peut pas ainsi demander à la Banque de France de créer l'argent dont l'Etat a besoin pour financer directement ses dépenses. Le Traité de Maastricht voté par référendum en France en 1992 et transposé dans la loi française prévoit :
Ni la BCE, ni une banque centrale nationale, ni un membre quelconque de leurs organes de décision ne peuvent solliciter ni accepter des instructions des institutions ou organes communautaires, des gouvernements des États membres ou de tout autre organisme.
A partir de là, il devient formellement interdit aux Etats de faire financer leur déficit par l'émission monétaire. Ici un article de Check News très complet sur les différentes étapes qui ont mené à cette situation. Les Etats n'ont donc pas les clefs pour faire démarrer la "planche à billets". Voilà pourquoi il y a deux ans, le chef de l’Etat avait expliqué à une soignante qui l’interpellait sur le manque de moyens.
A la fin, les moyens, c’est vous qui les payez aussi vous savez ! Il n’y a pas d’argent magique (…) un pays qui contrairement à toutes les économies autour de lui, va vers les 100% de dette publique rapportée à son produit intérieur brut, il faut pas croire… C’est vos enfants qui payent quand c’est pas vous !
Emmanuel Macron, le 5 avril 2018, lors d’une visite au CHU de Rouen.
Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.
Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.
Quand les Etats disent "Quoi qu’il en coûte", ils ne peuvent pas, contrairement aux banques centrales créer les euros pour leurs dépenses. Les Etats ont des moyens budgétaires, pas monétaires, et ces moyens, ce sont leurs recettes : fiscales, et sociales. Autrement dit, les impôts, les taxes et les cotisations.
Cependant, depuis la crise de 2008, les banques centrales ont trouvé un moyen de contourner cette séparation stricte entre politique monétaire et budgétaire, au grand dam de l'Allemagne dans la zone euro.
"Quoi qu’il en coûte" : à QUI ?
La Banque centrale européenne ne finance pas directement les déficits des Etats de la zone euro mais elle le fait indirectement. Depuis 2015, elle achète des titres de dettes des Etats de la zone euro (c’est ce qu’on appelé le QE, Quantitative Easing, mesures d’assouplissement quantitatif), mais elle les achète aux acteurs financiers, une fois qu’ils ont déjà eux-mêmes acheté ces titres de dette. Comme ils savent qu’ils peuvent les revendre, ils les achètent plus volontiers.
A lire / écouter : Karlsruhe contre BCE : un combat plus politique que monétaire
Cette politique a contribué à faire baisser les taux d’intérêt auquel les Etats de la zone euro peuvent emprunter, et c’est ce qui explique en grande partie que ces taux soient négatifs.
Entre mars 2015 et décembre 2018, la BCE a acheté chaque mois entre 15 et 80 milliards d’euros de titres financiers sur les marchés (pas que des titres d’Etat mais essentiellement). Puis elle a cessé cette opération (dite non conventionnelle qui a fait l’objet de nombreux recours juridiques en Allemagne auprès de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe), et l’a repris en novembre 2019.
Le jeu implicite qu’il y a entre les Etats et la BCE en ce moment est le suivant : je fais de la relance budgétaire pour contrer les effets de la crise, tu me les finances en achetant mes titres de dette. Si la BCE suit, cela va écraser les taux d'intérêt et les Etats pourront continuer de s'endetter à des taux négatifs même peut être au delà de 10 ans.
Emmanuel Carré, maître de conférence à l’université de Bretagne Sud, spécialiste de la politique monétaire.
Comme première réponse à la crise du coronavirus, la nouvelle présidente de la BCE Christine Lagarde a annoncé d’abord 120 milliards d’achats en plus jusqu’à la fin 2020.
Trop peu visiblement. Très vite, les taux d’intérêt des bons du trésor italien ont bondi, semant le doute sur la capacité de ce pays à financer les plans d’urgence annoncés pour contrer le Covid-19.
Le "Quoi qu’il en coûte" des Etats n’est crédible en ce moment que s’ils ont la BCE derrière eux. Pourquoi les Allemands sont contre ? Parce qu’on sait bien que si on le fait excessivement, on arrive à la situation du Zimbabwe ! Si la monnaie ne vaut plus rien, c’est l’hyper inflation, etc. Mais il est question de le faire en ce moment pour répondre à une crise particulière.
Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management
Quelques jours après ses premières mesures, la BCE annonce en pleine nuit un nouveau plan de 750 milliards d’euros et un nouveau programme : PEPP, Le Pandemic Emergency Purchase Program, ou Programme Pandémique d’Achat d’Urgence.
Aux Etats-Unis, la Fed fait exactement la même chose et son programme d’achat est même illimité, et va (comme celui de la BCE) bien au-delà de l’achat de titres de dette des Etats.
Dans l’immédiat, ce sont donc les Banques centrales qui vont en partie financer le "Quoi qu’il en coûte" des Etats. Devrons-nous les rembourser un jour ?
"Quoi qu’il en coûte" : Quand faudra-t-il payer ?
A la mi mars, ce n'était pas encore un sujet. Savoir qui va payer les dépenses budgétaires des Etats n’était pas une préoccupation affichée des pouvoirs publics. Même la Commission européenne a levé au début de la crise l’obligation des Etats de la zone euro en matière de déficit et de dette publique.
Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.
Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.
Quand on demandait au ministre des Finances français, à qui va coûter, le "Quoi qu’il en coûte", il pensait d’abord aux dégâts sur l’économie réelle, et pas au déficit de l’Etat.
QUESTION : Vous dites souvent "On va faire tout ce qu’il faut quoi qu’il en coûte", est ce que vous avez déjà une idée de A qui ça coûtera au final ?
Question posée lors de la conférence de presse téléphonique du 18 mars 2020
La crise, elle coûte terriblement à tous les entrepreneurs, tous les artisans, tous les commerçants, tous les commerces qui sont fermés. Ça coûte aux grandes entreprises dans les secteurs qui sont sinistrés, je pense à l’industrie aéronautique, je pense à l’industrie automobile. Donc nous, notre responsabilité, c’est d’apporter un soutien massif de la puissance publique à l’économie réelle qui est touchée de plein fouet, comme elle ne l’a pas été, sans doute, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Bruno Le Maire, ministre des Finances lors d'une conférence de presse téléphonique le 18 mars
Interrogé quelques jours plus tard sur France Info, Bruno Le Maire déclarait encore : "Je vais vous dire, c’est pas le sujet l’addition. A un moment donné, il sera bien temps de faire les comptes mais aujourd’hui, la mobilisation elle est totale pour sauver notre appareil de production, et garantir qu’il y ait le moins de faillite possible dans notre pays."
Début novembre, la dette, et son nécessaire remboursement est devenu au contraire l'un des messages récurrents du Ministre des finances à l'heure de présenter le quatrième projet de loi de finance rectificatif. La dette, sera selon lui remboursé par la croissance, un esprit de responsabilité vis à vis des finances publiques, et des réformes structurelles, dont la réforme des retraites.
Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.
Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.
Pas question en revanche d’envisager de nouvelles recettes. Au contraire, dans l’idée de stimuler les entreprises et d’encourager les relocalisations, le Projet de loi de finances qui a été présenté fin septembre prévoit des baisses d’impôts de production pour un montant de 20 milliards d’euros sur deux ans, sans contrepartie malgré les débats houleux qui ont pu avoir lieu à l’Assemblée à ce sujet.
A lire / écouter : Contrepartie aux aides d’Etat : le diable dans les détails (sémantiques)
Le chef de l’Etat a lui mis un bémol au "quoi qu’il en coûte" qu’il avait lancé en mars à dès la mi mai, lors d’une table ronde avec des médecins à l’hôpital la Pitié Salpétrière. "Le 'quoi qu'il en coûte' prononcé un soir de mars ne peut pas durer perpétuellement", leur a dit Emmanuel Macron, selon des propos rapportés par BFMTV.
Alors que la deuxième vague épidémique commençait, le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale présenté en octobre, prévoit d’ailleurs des économies sur le budget alloué à l'assurance maladie.
Pour afficher ce contenu Twitter, vous devez accepter les cookies Réseaux Sociaux.
Ces cookies permettent de partager ou réagir directement sur les réseaux sociaux auxquels vous êtes connectés ou d'intégrer du contenu initialement posté sur ces réseaux sociaux. Ils permettent aussi aux réseaux sociaux d'utiliser vos visites sur nos sites et applications à des fins de personnalisation et de ciblage publicitaire.
Du côté des banquiers centraux, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, et Christine Lagarde, la présidente de la BCE se félicitent des politiques de soutien menées par les Etats, mais cette dette, il faudra la rembourser, disent-ils, pas question d’imaginer qu’elle puisse un jour être annulée.
Ce serait tellement simple de pouvoir se financer indéfiniment et ensuite de pouvoir ensuite annuler cette dette publique. D'abord, il se trouve que c'est interdit par les traités qui ont créé l'euro. Et c'est interdit pour des bonnes raisons, parce que c'est un élément de confiance dans la monnaie, aucun autre pays en dehors de l'Europe ne le fait. François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, sur France Info, le 9 juin 2020.
Néanmoins, quand il sera temps de faire les comptes, cela va être un désastre. L’un des indicateurs clés pour mesurer la solvabilité d’un pays (et donc donner envie à des investisseurs de lui prêter), c’est la dette, rapportée au PIB.
La dette va augmenter, on l’a vu plus haut, le PIB va s’effondrer (puisqu’il y aura une récession). Quand on va faire le ratio Dette / PIB, on dépassera largement les 100% actuels en France. Pour l’Italie, ce sera pire, puisqu’ils sont déjà à 137% du PIB.
On sait dorénavant, qu'au mieux, au sortir de cette crise, la France aura un endettement/PIB de 120%. Arrivera-t-elle a emprunter encore dans ces conditions là? Pour le moment, il semble que oui. Mais à moyen terme, est-ce tenable ?
Solutions : l'annulation des dettes détenues par la BCE ?
Encore plus impensable que la mutualisation des dettes européennes, l'idée d'annuler une partie des dettes rachetees par la BCE fait en revanche son chemin dans le débat public.
La monétisation de la dette, c’est le jour où la Banque centrale dit : je vous ai prêté ça, mais vous ne me le devez pas, c’est pour toujours. Ce serait possible parce que la Banque centrale ne doit rien à personne. Les engagements qu’elle a dans son bilan, c’est dans la monnaie qu’elle émet elle-même. J’ai l’impression qu’on va devoir en arriver à ce genre de choses, après la crise. Eric Dor professeur à l’Ieseg
Le monde d’avant la crise du coronavirus ne sera pas comme celui d’après, entend-on dire. Le chef de l’Etat lui-même a promis des ruptures. Mais annuler une partie des dettes est un tabou quasi absolu. Pourtant, ce n’est pas inédit, poursuit Eric Dor.
Une autre manière de voir les choses, si on prend l’histoire économique séculaire, et même millénaire, c’est que toutes les civilisations ont toujours été obligées de procéder, à certains moments à une remise des compteurs à zéro en ce qui concerne les dettes. L’insolvabilité des Etats est plus la règle que l’exception. Et donc ce qu’on a vu dans le passé, c’est que les dettes ont dû régulièrement être effacées pour permettre aux gens de repartir à zéro. Ça s’est fait par l’effacement des dettes ou par l’inflation, qui détruit la valeur réelle de la créance qu’on a.
QUESTION : l’un ou l’autre nous attend ?
Je le crains ! Parce qu’on est obligé actuellement de surcharger les finances publiques pour essayer à juste titre de maintenir l’économie à flot, mais le montant est tellement important, que simplement espérer que les différents Etats vont pouvoir financer ça sur les marchés est assez illusoire.
Pour le moment, l'idée d'annuler une partie des dettes contractées par les Etats de la zone euro pour répondre à la crise du coronavirus n'a pas la faveur des institutions, mais le débat est de plus en plus vif et fait l'objet de tribunes multiples entre partisans et opposants à cette solution. Je détaille leurs arguments dans la bulle économique ci-dessous.
A lire / écouter : Annuler les dettes : un choix politique, pas magique
Marie Viennot