Elle avait 94 ans. L’écrivain britannique Doris May Lessing, née en Iran en 1919, est décédée ce 17 novembre, à Londres. Romancière, dramaturge, poète, Doris Lessing avait reçu le prix Nobel de littérature en 2007, se voyant récompenser pour une œuvre composée d'une soixantaine d’ouvrages extrêmement divers. Doris Lessing avait eu une réaction tendre et moqueuse lorsqu’une troupe de journalistes l’attendant en bas de chez elle, lui avait annoncé que le Nobel lui était décerné :
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Jeune esprit rebelle, réfractaire à l'autorité maternelle et à celle des religieuses de son pensionnat, Doris Lessing, qui a passé son enfance en Rhodésie du Sud (actuel Zimbabwe, où sa famille s'est installée en 1925), quitte l’école à 13 ans. Dès lors, elle se forme seule, à travers la lecture de grands auteurs tels que Stendhal, Balzac, Dostoïevski, Tolstoï…
L’écrivain connaît le succès dès la publication de son premier roman, écrit à Londres en 1950 (elle a quitté l'Afrique pour s'y installer en 1949) : Vaincu par la brousse . Un récit qui se déroule dans la Rhodésie de la fin des années 1940 et qui relate l'histoire d'un amour à la fois haineux et passionnel entre une citadine blanche et un domestique noir. Lessing annonce d’emblée la couleur : son oeuvre sera autobiographique et engagée. Dans les luttes contre l’apartheid et le colonialisme, notamment, mais également en faveur du marxisme. Car Lessing a pris sa carte au parti communiste dans sa jeunesse africaine, rompant ce lien politique en 1956 seulement, après l'insurrection de Budapest : "J'étais en Rhodésie du Sud, dans une société très réactionnaire, très inculte, très provinciale. Au début de la guerre, il y a eu un afflux de réfugiés, de communistes. Pour la première fois j'ai rencontré des gens qui avaient lu, qui avaient réfléchi et j'ai adopté leur point de vue sur l'affreuse condition des Africains. Avant, je n'avais rencontré personne qui pensait ainsi. C'était une réaction assez enfantine en faveur d'un monde nouveau, un tout petit parti communiste à Salisbury ." (Le Monde, 1981)
Le nom de Doris Lessing a aussi été étroitement rattaché à la cause féministe : dans Les Enfants de la violence , un cycle en cinq volumes parus entre 1952 et 1969, elle met notamment en scène Martha Quest, une adolescente avide de liberté à l’aube de la seconde guerre mondiale, alors que la condition de la femme laisse fortement à désirer.
La littérature, Doris Lessing l'a toujours pratiquée comme un exercice de haute-lucidité, afin de débusquer les mensonges et les maquignonnages qui se cachent sous le vernis de la comédie sociale. André Clavel, L'Express , 25-03-201
Autre titre essentiel de l'oeuvre de Doris Lessing, Le Carnet d'or . Considéré comme son chef d'oeuvre, cet ouvrage brosse le portrait d'une jeune romancière perdue dans une douloureuse quête d'elle-même et qui trouve le salut en relatant ses expériences dans les pages de quatre carnets colorés.
On demande souvent aux auteurs : "Comment écrivez-vous ? Avec un traitement de texte ? une machine à écrire électrique ? une plume ? à la main ?" Mais la question essentielle est celle-ci : "Disposez-vous d'un espace, de cet espace libre qui devrait vous entourer quand vous écrivez ?" A l'intérieur de cet espace, qui est proche d'une forme d'écoute, d'attention, vous viendront les mots, les mots que diront vos personnages, des idées : l'inspiration. Doris Lessing, discours de réception du Nobel, 2007
Parmi la soixantaine de livres rédigés par Doris Lessing, dont une trentaine ont été traduits en français, figurent aussi bien des romans que des poèmes, des récits de voyage, des essais sur une multitude de sujets (Le temps mord , 2011), des écrits autobiographiques (Dans ma peau , 1997)... L'écrivain s'est même essayée, toujours avec succès, à l*'heroic fantasy* (Mara et Dann , 1999), ainsi qu'à l’opéra avec l’aide du compositeur américain Philip Glass, à partir de son cycle de science-fiction *Canopus dans Argos : Archives * (1979-1980)
Dans son dernier livre,* L'Histoire du général Dann* (2013), fiction prospective qui se déroule à une époque indéterminée, dans un monde figé par la glace et privé de son ancienne civilisation, Doris Lessing délivre un dernier message. Ecologique, cette fois.
> Ce matin, Sandrine Treiner, directrice adjointe de France Culture en charge des programmes, rendait hommage à Doris Lessing dans Les Matins , de Marc Voinchet :
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> Dans la Grande Table, en 2011, Caroline Broué et Hervé Gardette revenaient sur l'oeuvre de Doris Lessing, en compagnie de Geneviève Brisac, Anne-Laure Brevet et Christine Jordis :
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