Les idées claires | Sommes-nous tous devenus intolérants au gluten ? C'est la question au cœur des Idées Claires, notre programme hebdomadaire produit par France Culture et Franceinfo destiné à lutter contre les désordres de l'information, des fake news aux idées reçues.
Impossible désormais de passer à côté. Depuis quelques années, dans les épiceries, dans les supermarchés, dans les restaurants ont fleuri les produits sans gluten. À tel point que l'on finit pas se demander si le gluten est bon pour la santé ? Ne s'agit-il pas d'un énième produit issu de l'industrie agro-alimentaire et dont on reconnaîtra l'effet néfaste des années après sa commercialisation ?
Pourquoi certaines personnes sont-elles allergiques au gluten et d'autres intolérantes ? Supprimer le gluten de son alimentation permet-il vraiment d'augmenter ses performances sportives comme le décrivent certains des plus grands sportifs mondiaux à l'image de Novak Djokovic?
Autant de questions que nous avons posé au docteur Christophe Cellier, gatro-entérologue et hépathologue.
Sommes-nous devenus tous allergiques au gluten ?
"Non, on n’est pas devenu tous intolérants au gluten. Il y a une partie de la population, environ 0,5 à 1 % qui a une maladie qui s’appelle la maladie cœliaque qui fait qu’on est intolérant au gluten et qu’on développe des anticorps contre ses intestins du fait de l'absorption de gluten."
Dans quels aliments trouve-t-on du gluten ?
"Le gluten est partout, non seulement dans le pain et les pâtes mais également dans toute l’industrie agroalimentaire. Il y a des traces de gluten dans la fabrication des chapelures, dans les charcuteries... et pour les patients qui veulent suivre un régime sans gluten c’est extrêmement complexe."
Comment savoir si je fais partie des 0,5 % d’intolérants ?
"On a parfois des maux de ventre, des douleurs abdominales, de la diarrhée et parfois on n’a pas grand-chose : juste de l’anémie, juste des maux de ventre, juste des douleurs articulaires. C’est très important de le diagnostiquer parce que ça peut avoir des conséquences sur le long terme, comme la mauvaise absorption de calcium, de fer qui va donner de l’anémie, de la déminéralisation, de la fatigue et une simple prise de sang permet de le diagnostiquer."
Si je ne suis pas intolérant ça veut dire que tout va bien ?
"Dans certains cas, il y a une entité mais qui n’est pas très clairement codifiée qu’on appelle l’hypersensibilité au gluten, quand on a éliminé la maladie cœliaque mais qu’on supporte mal le gluten, quand on supprime le gluten on va mieux, on se sent mieux, on est moins fatigué, on a moins de maux de ventre et quand on réintroduit le gluten, on redéclenche cette maladie. On l’appelle l’hypersensibilité au gluten mais il n’y a pas de critères de diagnostic. On ne sait pas exactement si c’est uniquement le gluten ou si c’est dû à d’autre aliments qu’on enlève en même temps que le gluten."
Y-a t-il des bénéfices à faire un régime sans gluten ?
"Il n’y a aucun bénéfice (en dehors des hypersensibles au gluten). Dans les autres maladies, maladies inflammatoires intestinales, rhumatologiques, psychologiques il n’y a aucun bénéfice démontré à supprimer le gluten et donc à démarrer un régime sans gluten."
Des sportifs qui font un régime sans gluten pour améliorer leurs performances, ça marche ?
"On estime que pratiquement 80 % des sportifs de haut niveau ont essayé le régime sans gluten, alors qu’aucune étude n’a montré un bénéfice très clair de ce régime sans gluten pour améliorer les performances sportives. On en parle beaucoup dans les médias, avec les stars, il y a de plus en plus de produits sans gluten, il y a probablement un effet de mode qui est indéniable sur le régime sans gluten mais pour l’instant on n’a pas de chiffres sur le sujet, ni même sur le mécanisme de cette hypersensibilité alors qu’on connaît très bien les mécanismes de la maladie cœliaque, qui je le rappelle et l’intolérance au gluten. "
Peut-on se passer de gluten sans danger ?
"Le gluten n’a aucun effet bénéfique en termes nutritionnels donc on peut le supprimer sans aucun problème. Par contre, avant de commencer un régime sans gluten, surtout si on a des symptômes, il est préférable d’éliminer préalablement une authentique maladie cœliaque en faisant une petite prise de sang. Après si on fait un régime sans gluten et qu’on est amélioré pourquoi pas. Le danger c’est de supprimer le gluten, le lactose puis plein d’autres choses et à ce moment-là on peut induire des carences. C’est ce qu’on appelle l’orthorexie qui fait qu’on mange de moins en moins de choses, on se carence et parfois on se désocialise donc ça peut être dangereux."
Alors pourquoi sommes-nous plus intolérants au gluten qu’avant ?
Ça existe depuis la nuit des temps, la maladie cœliaque était déjà décrite dans l’Antiquité grecque. On sait par exemple que la maladie cœliaque a augmenté. C’est probablement lié au fait que notre alimentation dans les pays développés est de plus en plus “aseptisée” dès l’enfance et donc on a moins l’habitude de se défendre contre les bactéries et on développe plus de mécanismes d'auto-immunité. C’est vrai pour toutes les maladies auto-immunes, y compris pour la maladie cœliaque.
Écoutez et abonnez-vous au podcast
Les Idées claires, c'est aussi une version à écouter d'une dizaine de minutes. À découvrir ici-même ou en vous abonnant pour ne pas rater un épisode.
Les idées claires sur le gluten
9 min
Pour Android et autres applications : abonnez-vous avec le fil RSS.
Sur iTunes et téléphones Apple : abonnez-vous ici