États-Unis : le genou à terre, symbole contre la discrimination raciale et les violences policières

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États-Unis : le genou à terre, symbole contre la discrimination raciale et les violences policières

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Montage photo. A gche : le joueur de football américain Colin Kaepernick genou à terre, le 18 sept 2016, à Charlotte, Caroline du Nord. A dte : des policiers faisant de même à Coral Gables, en Floride, le 30 mai 2020, après la mort de George Floyd.
Montage photo. A gche : le joueur de football américain Colin Kaepernick genou à terre, le 18 sept 2016, à Charlotte, Caroline du Nord. A dte : des policiers faisant de même à Coral Gables, en Floride, le 30 mai 2020, après la mort de George Floyd.
© AFP - Grant Halverson / Getty Images. Eva Marie Uzcategui

Mettre genou à terre. Le geste se multiplie après la mort de George Floyd à Minneapolis. Souvent de la part de stars du sport et désormais ailleurs aussi dans le monde. Une attitude initiée en réponse à l'hymne national par le joueur de football américain Colin Kaepernick, en 2016.

Les images ont fait le tour des réseaux et du monde. Des dizaines de policiers américains ont mis un genou à terre en signe de solidarité avec George Floyd, mort à Minneapolis étouffé par un de leurs collègues. Tout comme le candidat démocrate à la Maison Blanche et ancien vice-président Joe Biden, ou encore le footballeur Marcus Thuram, dimanche, après un but, en Allemagne. Ce geste, né en 2016 de la colère d'une star déchue du football américain avant un retour en grâce, revient à la une de l'actualité, dans la tradition des poings levés aux JO de 1968 de Tommie Smith et John Carlos.

"Je ne vais pas afficher de fierté pour le drapeau d’un pays qui opprime les Noirs"

Tout commence par un affront assis. Le 26 août 2016, Colin Kaepernick, quarterback et cerveau des 49ers de San Francisco, ne se lève pas pendant l'hymne national lors d'un match préparatoire à domicile. Le champion qui avait par le passé emmené son équipe jusqu'à la finale du Superbowl ne se tourne pas non plus vers la bannière étoilée, la main sur le cœur, comme le veut la tradition. Début de polémique pour le meneur de jeu métis de 28 ans qui avait déjà dénoncé des actes racistes sur Twitter sous le mot-clé #BlackLivesMatter ( BLM, la vie des Noirs compte, mouvement né en 2013). D'anciens fans vont jusqu'à se filmer en train de brûler son maillot. 

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Le 1er septembre 2016, à San Diego, Kaepernick s'agenouille en réponse à l'hymne, rejoint par son coéquipier Eric Reid. Et comme le raconte le New York Times dans une chronologie très complète, il annonce également qu'il fera un don de 1 million de dollars à des organisations caritatives. "Encore une fois, je ne suis pas anti-américain", répète-t-il. "J'aime l'Amérique. J'aime les gens. Voilà pourquoi je fais ça. Je veux aider à rendre l'Amérique meilleure.

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Celui qui se retrouve hué tout au long du match avait déjà déclaré quelques jours auparavant : "Je ne vais pas afficher de fierté pour le drapeau d’un pays qui opprime les Noirs. Il y a des cadavres dans les rues et des meurtriers qui s'en tirent avec leurs congés payés." Fils d'un père biologique noir avant d'être adopté par un couple de Blancs et élevé en Californie, celui qui dit avoir souffert enfant de discrimination ajoute :

Il y a beaucoup de problèmes à régler dans ce pays, beaucoup de gens opprimés, des gens qui ne sont pas traités équitablement, qui n'ont pas les mêmes opportunités. Et il y a la violence policière, qui est un problème majeur et qui doit être réglé.
Quand il y aura des changements significatifs et que je sentirai que ce drapeau représente ce que ce pays est censé représenter, je me lèverai.

Le quart-arrière se retrouve alors en Une du magazine Time.

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Obama puis Trump s'en mêlent

Le 5 septembre 2016, le président Barack Obama défend Kaepernick en déclarant : "Je pense qu'il se soucie de certains problèmes réels et légitimes dont il faut parler." Plusieurs autres joueurs s'agenouillent ou lèvent le poing pendant l'hymne national dans les jours suivants. Avant que Megan Rapinoe, star de l'équipe nationale féminine de football des États-Unis, et l'ensemble de l'équipe féminine de basket Indiana Fever ne s'agenouillent de la même façon, tout comme d'autres athlètes du pays.

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Mais la polémique atteint un pic l'année suivante, à cause notamment de la violence meurtrière à Charlottesville, en Virginie. En particulier fin septembre, en Alabama. Dans un discours très nationaliste de soutien à un candidat républicain, le désormais Président Donald Trump va jusqu'à traiter les joueurs qui "manquent (ainsi) de respect au drapeau" de "fils de pute". Il demande à leurs responsables de les licencier sur le champ et à la Ligue de les discipliner. Injonction doublée de deux tweets.

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Des dizaines de joueurs continueront à ignorer l'hymne, à s'agenouiller ou à croiser les bras sur la touche, rejoints, dans certains cas, par des propriétaires d'équipe. Les protestations se poursuivent tout au long de la saison et Trump continue de reprocher à la ligue de ne pas avoir discipliné les joueurs. Colin Kaepernick déposera plainte contre la Ligue pour mise à l'écart avant de devenir en septembre 2018 le visage et la voix d'une campagne de Nike. La Ligue qui établira des sanctions contre qui s'inspirerait de son geste.

La star de l'équipe de football Megan Rapinoe s'agenouille pendant l'hymne des Etats-Unis le 18 septembre 2016 avant un match contre les Pays-bas, à Atlanta.
La star de l'équipe de football Megan Rapinoe s'agenouille pendant l'hymne des Etats-Unis le 18 septembre 2016 avant un match contre les Pays-bas, à Atlanta.
© AFP - Kevin C. Cox / Getty images north america

Deux institutions sacrées offensées

Le sport et l’hymne national sont attaqués. "Les deux défendent les valeurs et démontrent la supériorité des Etats-Unis. Les deux exacerbent l’identité nationale, la fierté d’appartenance au pays. Les deux sont d’ordinaires intouchables", explique la journaliste Marine Desnoue, dans un article pour Yard

Elle précise aussi pourquoi le geste de Kaepernick a évolué, avec une attitude moins provocante pour les soldats et les vétérans dans ce pays si patriote. Cela "résulte d’une discussion - médiatisée - avec Nate Boyer, ancien béret vert reconverti en footballeur". Pour Nate Boyer, vétéran d'Irak et d'Afghanistan, "Il ne s’agissait pas de renoncer à son combat, mais de ne pas blesser gratuitement. Ce genou à terre, c’est un symbole fort. Nous, militaires, effectuons aussi ce geste en marque de respect à nos frères qui sont tombés au combat, devant leur tombe." La journaliste souligne enfin que le genou à terre se veut "surtout plus puissant, photogénique et fédérateur. L’expression est plus militante, affirmée, moins passive". 

Comme l'indique Guillaume Gendron dans Libération, cette colère transparaît aussi dans "ses chaussettes où figure un cochon coiffé d’une casquette de police, ou son refus de soutenir Hillary Clinton à cause de propos sur les ados noirs 'superprédateurs' tenus il y a vingt ans, et dont elle s’est depuis longtemps excusée".

Un geste réaffirmé après la mort de George Floyd

"Voici...Pourquoi." Ces trois mots en anglais dominent un montage de deux photos posté le 26 mai sur Instagram par la star de basket Lebron James. Le joueur des Lakers de Los Angeles montre à gauche l'arrestation et l'étouffement par un policier avec son genou de George Floyd et à droite le désormais fameux genou à terre de Colin Kaepernick. D'ajouter en légende : "Vous comprenez maintenant ??!!??!! Où est-ce encore flou pour vous ?"

D'autres sportifs vont reprendre ce genou à terre et être particulièrement relayés sur les réseaux sociaux, en particulier le fils de Lilian Thuram puis les joueurs de Liverpool, champions d'Europe en titre.

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Très vite aussi, des dizaines de policiers américains, à Miami, Portland, Oklahoma City, New York ou devant l'hôtel Trump à Washington, vont ainsi s'incliner, en fraternisant avec les manifestants contre les discriminations et les violences policières. Souhaitant se démarquer de Dereck Chauvin, leur collègue à l'origine de la mort de George Floyd.

Deux policiers genou à terre à New York le 31 mai 2020.
Deux policiers genou à terre à New York le 31 mai 2020.
© Getty - Lev Radin/Pacific Press/LightRocket

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Avant le candidat démocrate à la présidentielle Joe Biden.

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Enfin, de simples citoyens, comme ici à Houston : des Blancs demandant pardon avec beaucoup d'émotion à leurs voisins noirs. Et des manifestants à Paris, à Madrid ou à Nairobi, à propos dans le même temps des violences policières au Kenya.