Extrême Europe 2014

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Extrême Europe 2014

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Parlement de l'UE
Parlement de l'UE
© Radio France - A.Ipatovtsev

On lit les dépêches… A neuf mois des élections européennes, près de six Français sur dix jugent négatif l'impact de l'Europe des Vingt-Huit sur la France, selon un sondage de l'institut CSA… Ils ne sont que 19% à estimer que l'UE a un effet positif et 9% pour lesquels elle n'a pas d'impact… Les plus pessimistes sont les sympathisants du Front de gauche (81%) et ceux du Front national (88%). Le Front National, qui est devenu le premier parti de France, est crédité de 24% des voix pour les prochaines Européennes, deux points au-dessus de l'UMP et cinq au-dessus du PS… Pas étonnant, dans ce contexte, de lire également que « les députés européens sont en panique face à la montée de l’extrême droite ». Eh oui, les partis anti-européens risquent d'entrer en masse au Parlement Européen en mai 2014. N’oublions pas les 21,4% du Parti de la Liberté (FPÖ) autrichien lors des législatives fin septembre. N’oublions pas les sondages en Grande Bretagne, donnant un très bon score au Parti pour l’Independance du Royaume -Uni (UKIP). N’oublions pas l’Aube Dorée en Grèce… Oui, on ne va pas oublier que l’assassinat récent du rappeur anti-nazi Pavlos Fyssas est attribué a l’un des militants du parti grec qu’on qualifie de « néo-nazi », dont le leadeur historique et plusieurs membres ont été récemment arrêtés, mais qui a toujours ses députés au parlement national. D’où la question terrible : est-ce qu’on peut imaginer un député néo-nazi à Strasbourg en mai 2014 ? Dans un seul organisme fédéral de l’Union ? Au sein de l’Union basé sur l’idée de surmonter les nationalismes, sources des guerres, par la fédéralisation progressive ? Si, personnellement, je n’ai pas trouvé les eurodéputés « paniqués », j’ai vu, lors de mon passage récent au Parlement de l’Union, que le sujet les préoccupe beaucoup. « Ce serait une ironie de l’histoire si après les prochaines élections européennes nous nous retrouvions ici, à Strasbourg, un lieu emblématique pour la réconciliation des peuples européens, avec les représentants du passé le plus sombre de l’histoire européenne », dit l’eurodéputé grec Georgios Koumoutsakos (PPE). L’assassinat du rappeur a créé un précédent lors d’ un débat de la session plénière du Parlement Européen du mois d’octobre consacré à « la montée de l’extrémisme de droite en Europe ». Les incidents racistes et xénophobes sont en hausse et « la montée de l’extrémisme est une préoccupation centrale de l’Union européenne », a rappelé la vice-présidente de la Commission européenne en charge de la justice et de la citoyenneté, Viviane Reding. Vytautas Leškevičius, vice ministre des affaires étrangères de la Lituanie, pays qui préside l’Union, a indiqué que « même si le Conseil Européen n’a pas évoqué spécifiquement cette question, les ministres concernés ont eu une réunion informelle à ce sujet en janvier 2013 » et en mai les ministres ont « soulignés l’importance des droits fondamentaux et l’état de droit ». En revanche, ce n’est pas au Conseil Européen de prescrire une recette universelle contre la maladie de l’extrémisme pour tous le monde, mais aux gouvernements nationaux de trouver des réponses. Si tous le monde est d’accord pour condamner l’extrémisme, plusieurs eurodéputés conservateurs, démocrates-chrétiens ou libéraux, s’étonnent qu’on parle de l’extrémisme « de droite » uniquement. Le conservateur polonais Ryszard Antoni Legutko s’insurge des attaques contre les prêtres et autres actions extrémistes par Les Femen, par exemple. Les eurodéputés espagnols ou irlandais sont toujours prêts à rappeler à Jean-Luc Melenchon, ("on ne peut pas citer un meurtre ou en attentat perpétré par un extrémiste de gauche"), que l’ETA n’est pas une organisation estampillée « extrême-droite », et l’Armée Républicaine irlandaise, non plus. Condamnons, donc, tous les extrémismes. C’est facile à dire. Pas très compliqué d’appliquer les lois, non plus. Un sacré question, en revanche, reste. Peut-on aisément emprunter la voie créée par l’ assassinat du rappeur grec, pour venir condamner non pas uniquement les actes extrémistes, mais aussi les partis extrêmes ? Pour l’eurodéputé portugais Paulo Rangel, oui. « Il y a certains mouvements qui utilisent la démocratie mais qui ont une attitude profondément antidémocratique ». Par exemple, en Grande-Bretagne, UKIP, qui, « très souvent, montre les Bulgares et les Roumains comme les responsables des crimes à Londres. Certains partis ne s’identifie pas comme d’extrême droite mais ont des attitudes, des comportements, qui stimulent, très clairement, l’extrémisme dans les sociétés ». Pourtant, le parti britannique le plus eurosceptique n’a rien à voir avec l’Aube Dorée, personne ne va le cataloguer de néo-nazi. « Comment peut-on oser appeler le Parti de la Liberté, qui a obtenu plus de 20% aux élections, et qui a fait plusieurs fois parti de la coalition gouvernementale avec les socialistes ou les conservateurs, un parti extrémiste ? », s’insurge l’eurodéputé autrichien et membre de FPO, Andreas Molzer. Ne nous comparez pas avec les Grecs ! Mais, pour le député PPE grec, Georgious Papanikolaou, c’est, précisément, ce qu’il faudrait faire. « Le problème de l’extrémisme, quelque soit son origine, est un problème grave, mais il n’est pas nouveau. Et ce n’est pas un phénomène qui existe uniquement en Grèce. Pensons au Parti de la Liberté en Autriche, au parti extrémiste au Pays-Bas…Bien sûr, l’attention de tout le monde est tournée vers la Grèce actuellement à cause de l’Aube Doré. Mais au lieu de mettre en exergue les efforts du gouvernement grec pour faire face à l’extrémisme, et reconnaître les efforts de la justice indépendante grecque, il y a des déclarations malheureuses, comme celle de Mr. Svoboda ». **Hannes Svoboda, président du Groupe des Socialistes & Démocrates au Parlement européen, en prévision de la présidence grecque du Conseil de l'Union européenne en 2014 a qualifié cette ** présidence d’ « inacceptable », si « le gouvernement grec et le Premier ministre Samaras s'avéraient incapables de mettre fin aux comportements haineux d'Aube dorée et d'autres groupes fascistes ». Personne ne soutien l’extrémisme. Très peu de politiques acceptent l’étiquette « extrême » pour leurs formations politiques. Surtout s’il s’agit de « l’extrême-droite ». Pourtant les formations politiques mettant, disons poliment, la souveraineté nationale loin devant l’unité européenne risque de devenir une force hétéroclite mais majeure au prochain Parlement, rendant le fonctionnement de notre Union inachevée et imparfaite encore moins facile. Se battre contre les eurosceptiques à l’échelle de l’Union en les accusant, même implicitement, d’ « extrémisme », risque d’être contreproductif. Les Français en savent quelque chose. Ils ont testé la méthode au niveau local. Dois-je rappeler la côte de popularité du Front National ?