Fernandel : "J'ai eu Jésus comme partenaire : qui a eu Jésus ? Personne. Il n'y a que moi."
1954. Fernandel était interviewé sur le plateau de tournage du film "Mamzelle Nitouche" d'Yves Allégret en 1953. Il racontait comment il avait commencé au cinéma, après s'être consacré au music-hall. A cette date, il avait déjà une vingtaine d'années de carrière derrière lui.
Dans cet entretien, Fernandel raconte ses débuts en 1930 dans le film de Marc Allégret, Le Blanc et le Noir puis comment le succès est venu, alors qu'il n'avait pas du tout prévu une carrière au cinéma. Fernandel excellait en effet sur les scènes des cabarets et se préparait "exclusivement" à continuer les tours de chant. "Je suis devenu une vedette sans m'en rendre compte", affirme-t-il en 1953 au moment de l'entretien.
Fernandel raconte sa carrière dans une interview diffusée le 21/04/1954.
16 min
[Marc Allégret] m'a montré la bobine du "Blanc et le Noir" où j'interprétais le rôle du chasseur et c'est à ce moment-là que j'ai compris pourquoi je faisais rire sur la scène lorsque je rentrais : j'avais comme on dit vulgairement, une drôle de gueule... je ne l'avais jamais vue, c'était la première fois que je la voyais !
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Avec le film Angèle en 1934, Fernandel commence sa collaboration avec Marcel Pagnol qui s'avèrera prolifique. Sa fidélité au music-hall et au comique troupier l'a détourné d'une carrière au théâtre, comme il l'explique.
Je n'étais pas du tout attiré par la comédie car ayant débuté au music-hall, je tenais surtout à ce qu'on garde de moi ce souvenir impérissable du comique troupier car j'ai été un des derniers à garder ce costume que Polin avait illustré et si je l'ai quitté petit à petit c'est que j'ai évolué avec les années, la guerre aussi n'est-ce-pas... est passée et je trouve que le costume militaire maintenant n'est plus drôle sur la scène.
"Artiste de l'instinct", voilà comment il se définit, expliquant qu'il ne travaille pas chez lui, devant la glace. "Au cinéma je n'apprends pas, j'ai une mémoire extraordinaire. Je lis mon scénario une fois et je l'ai là, dans la tête, et je tourne." L'acteur connu pour ses rôles comiques parle de son jeu dans la série Don Camillo. A l'époque de l'entretien, il en a déjà tourné deux épisodes (sur les cinq achevés) et il explique comment il a voulu interpréter ce personnage devenu légendaire, car un curé "n'est pas un personnage comique, il peut être truculent, amusant mais ce n'est pas un type drôle, ça n'a rien à voir avec un comique troupier." De tout temps, dans sa déjà longue carrière cinématographique débutée au début des années 1930, Fernandel a souhaité changer de style, ne pas toujours jouer la comédie, "il faut se mettre au goût du public, c'est la seule manière de durer", affirme-t-il.
Tout le monde a vu "Don Camillo", enfin presque tout le monde, mais je dois dire que dans la vie d'un acteur lorsque l'on a la joie et la chance de tomber sur un personnage pareil, car il y a un sujet exceptionnel, un grand metteur en scène qui est Jean Duvivier et un personnage que beaucoup aurait voulu faire, il est tombé sur moi et je lui en suis grandement reconnaissant. J'ai eu Jésus comme partenaire : qui a eu Jésus ? Personne, il n'y a que moi.
- Première diffusion : 21/04/1954
- Collection : RDF
- Production : Lise Elina
- Archive Ina / Radio France
- Indexation web : Odile Dereuddre, documentation de Radio France