L'asile pas à pas #5 : la relocalisation heureuse des Mousa

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L'asile pas à pas #5 : la relocalisation heureuse des Mousa

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Berivan et Alaa Mousa, la grand-mère Sultane et leurs deux petites filles, dont l'une est née à Troyes
Berivan et Alaa Mousa, la grand-mère Sultane et leurs deux petites filles, dont l'une est née à Troyes
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

A voir. La France doit relocaliser 32 000 réfugiés de Syrie, d’Irak et d'Érythrée en 2 ans. Comment les choisir ? Comment les accueillir ? 5e épisode de notre série, qui suit pas à pas l’itinéraire de réfugiés syriens et les coulisses de leur nouvelle vie française, désormais aux environs de Troyes.

En septembre 2015, la France s'est engagée auprès de la Commission européenne à relocaliser 32 000 réfugiés de Syrie, d’Irak et d'Érythrée en deux ans. Comment les choisir ? Comment les accueillir ? Un an et demi après cet engagement, voici le 5e épisode de notre série, qui suit pas à pas l’itinéraire de réfugiés syriens et les coulisses de leur nouvelle vie française. La famille Mousa est, aujourd'hui, installée aux portes de Troyes.

Nous avions laissé la famille Mousa à Bar sur Seine, ce petit village de 3000 âmes dans l'Aube, et ils étaient un peu déprimés. Eux qui venaient de la grande ville, bruissante, d'Alep se sentaient isolés, sans parler la langue, sans bénéficier de cours de français. Les démarches pour obtenir le statut de réfugiés puis le titre de séjour leur semblaient bien longues. En quelques mois, tout a changé. C'est un Alaa Mousa, le fils de la famille, radieux, qui m'a ouvert la porte de son appartement au 7ème étage d'une tour à Saint-André-les-Vergers, à quelques minutes de bus du centre ville de Troyes. Sa famille dispose aujourd'hui de papiers : titre de séjour, carte vitale, livret de famille. Une famille qui s'est agrandie avec la naissance de la petite Dilnaf il y a quatre mois. Quand on voit les progrès accomplis en quelques mois, il semble évident qu'il faudrait amplifier ce programme de relocalisations, qui atteint pourtant à peine 10% de ses promesses.

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Alaa Mousa est désormais heureux à Troyes

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Voilà le nombre de réfugiés arrivés en Italie et en Grèce que les autres Etats européens s'étaient engagés à accueillir en septembre 2015, auprès de la Commission européenne.

Les quotas de relocalisation de réfugiés en Europe prévus par la Commission en septembre 2015
Les quotas de relocalisation de réfugiés en Europe prévus par la Commission en septembre 2015
© Radio France - Camille Renard

Voilà ce à quoi sont aujourd'hui arrivés les Etats européens (et quelques autres hors de l'Union : Suisse, Norvège, Liechtenstein) : 20 869 réfugiés ont été relocalisés en date du 9 juin, soit un an et demi plus tard. Voici leur répartition, avec une ligne de clivage très nette entre l'Est et l'Ouest. Certains pays, comme la Pologne, la Hongrie ou la République tchèque n'ont accueilli au mieux qu'une dizaine de réfugiés depuis un an et demi. La Hongrie et la Slovaquie, appuyés par la Pologne, ont entamé un recours devant la justice européenne pour contester le caractère obligatoire de cette relocalisation. Ce 13 juin, la Commission européenne annonçait qu'elle ouvrait une procédure d’infraction contre les pays qui refusent de participer à ce programme de répartition des demandeurs d’asile.

Les 21 000 relocalisations effectives de réfugiés en Europe
Les 21 000 relocalisations effectives de réfugiés en Europe
© Radio France - Camille Renard

Les Mousa ont conscience de leur chance. L'appartement qu'ils occupent est lumineux et bien équipé : des canapés, une télé, un ordinateur, deux chambres et une cuisine équipée. Tout cela grâce à l'aide de la caisse d'allocations familiales, très active qui avance l'argent. La famille Mousa rembourse chaque mois petit à petit. Les grands parents Mustafa et Sultane habitent quelques étages plus bas. Pour Alaa, le grand fils, il ne saurait en être autrement. Il ne comprend pas cette habitude européenne qui voit les enfants partir travailler au loin et fonder une famille en laissant leurs parents seuls, avec la télé comme seule occupation.

Mustafa Mousa, le père désormais grand-père
Mustafa Mousa, le père désormais grand-père
© Radio France - Marie-Pierre Vérot
Sultane, la désormais grand-mère de deux petites filles
Sultane, la désormais grand-mère de deux petites filles
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

Cet été, Berivan, l'épouse d'Alaa et mère de deux petites filles, dont l'une née en France, à Troyes, se réjouit de partir en Allemagne. Elle va voir pour la première fois depuis deux ans et demi ses parents et frères et sœurs. Tous ont été séparés sur les routes de l'exil. Une partie en Allemagne, une autre partie de la famille est en Suède, d'autres au Danemark, en Turquie. Seuls une sœur de Mustafa et ses deux parents sont restés en Syrie. Mustafa évite de parler d'Alep, qui n'est plus que le fantôme en ruines de la ville qu'il a connue.

Mustafa Mousa préfère aujourd'hui oublier Alep

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Il sait que sa vie est désormais en France aux côtés de ses enfants et petits enfants. Et tous s'accrochent pour apprendre le français, gage d'intégration, tout en regrettant qu'à la différence de l'Allemagne la France ne propose que peu d'heures de cours. Alors ils vont en faire davantage pour maîtriser au mieux cette langue si difficile. A la rentrée, tous prendront le chemin de l'école. La vie en France a enfin commencé.

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Quelques relocalisations heureuses, pour 50 000 exilés en rétention en 2016

Si l'histoire des Moussa est heureuse, celle de la plupart des réfugiés et migrants arrivés en France ne peut se comparer à une telle success story. Errances dans des environnements hostiles, violences subies dans la "jungle" de Calais ou ailleurs, longue attente d'un visa, expulsions... Le rapport annuel de l'association d'aide aux immigrés, la Cimade, paru ce 27 juin, permet de s'attarder sur le cas des exilés retenus dans des centres de rétention administratives. Dans ces bâtiments surveillés, l'administration retient les étrangers en situation irrégulière qui font l'objet d'une procédure d'éloignement et ne peuvent quitter immédiatement la France. C'est l'un des principaux outils des politiques d'expulsion. En 2016, 50 000 personnes exilées, dont des enfants, des Afghans ou des Irakiens, étaient placées en centre ou en local de rétention administrative. En voici la répartition sur le sol métropolitain, l'outre-mer concentrant près de la moitié des enfermements en rétention, et le département de Mayotte, à lui seul, 43% du total :

Les centres et locaux de rétention administrative en France métropolitaine
Les centres et locaux de rétention administrative en France métropolitaine
© Radio France - Camille Renard, Cimade

Selon la Cimade, cette "privation de liberté est banalisée, alors que trop souvent l’enfermement est inutile voire abusif et illégal."

A LIRE les quatre premiers épisodes de notre série de reportages et de données contextuelles sur les relocalisations de réfugiés en France, "L'asile pas à pas" :

" L'asile pas à pas #1 : l'Ofpra prépare sa mission en Grèce"

" L'asile pas à pas #2 : les entretiens avec les réfugiés"

" L'asile pas à pas #3 : l'arrivée en France"

" L'asile pas à pas #4 : les premiers mois en France"