
A quoi sert l'Histoire en politique ? A quoi servent les commémorations ? Cinq ans après s'être prêté à ce même exercice dans La Fabrique de l'histoire, François Hollande se confie sur son imaginaire historique mardi 24 mai en direct sur France Culture. A-t-il changé avec l'exercice du pouvoir ?
Le Président de la République François Hollande est l'invité de La Fabrique de l'Histoire (de 9h à 10h) ce mardi 24 mai, en direct, à quelques jours des commémorations du centenaire de la bataille de Verdun. A quoi sert l'Histoire en politique ? Est-il possible de souder la communauté nationale grâce aux commémorations ? Peut-on se mettre d'accord sur une Histoire de France, et comment l'articuler avec des récits concurrents ?
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François Hollande était venu dans cette même émission le 6 mars 2012 pour se confier sur son imaginaire historique. Celui-ci a depuis été confronté à la réalité d'un mandat présidentiel. A-t-il évolué ? Vous pouvez réécouter cette émission de 2012. Il y racontait comment les récits familiaux de guerre avaient nourri son imaginaire de petit garçon, lui faisant apprendre "l'effroi, et l'horreur", mais aussi la "ténacité" : "Je suis issu de ces familles, comme beaucoup de Français, de survivants des guerres. "
"Les récits familiaux étaient des récits de guerre. Mes grands-pères, les deux, maternel et paternel, avaient fait la Première Guerre mondiale. (...) Je leur faisais raconter leur guerre. (...) Je faisais parler mon père sur ce qu'il avait vécu pendant la Seconde Guerre mondiale, ma mère aussi d'ailleurs, mes grands-parents également. De mon père aussi, j'ai appris ce que pouvaient être les sentiments, voire les ressentiments par rapport à une autre guerre, qui était la Guerre d'Algérie." François Hollande
Mais François Hollande disait aussi s'être intéressé aux temps de paix, comme celui de la construction de la IIIe République, pour enrichir son imaginaire avec l'histoire de l'affirmation du progrès et de la conquête des droits :
François Hollande dans La Fabrique de l'Histoire, le 6/03/2012
52 min
"Le conflit fait partie de notre Histoire, il a construit notre nation. La guerre d'Algérie a été une fracture au sein même de la gauche et de la droite. La SFIO n'a pas tenu ses engagements, le gaullisme est venu au pouvoir par l'affirmation de l'Algérie française, puis s'en est écarté. Mon enfance a été considérablement troublée par la guerre d'Algérie." François Hollande
Ecoutez-le également raconter la manière dont il a vécu le conflit entre école publique et école privée, ou encore mai 68. Confier n'avoir jamais été séduit par l'avant-garde (le communisme et le gauchisme), ni par la foule ("La foule n'est pas le peuple, elle peut parfois être emportée par des passions, des excès, des facilités"). Il évoque également son petit panthéon personnel : de ses admirations pour Henri IV, en passant par Victor Hugo ("personnage politique de première dimension" qui obtint l'amnistie pour les communards), Clemenceau ("le tacticien, le cynique", qui écrivit "des textes admirables"), François Mitterrand (l'alternance, et sa "construction d'un grand parti pour permettre le changement"). Ou, hors de la République française, évoquer Gandhi, Mao, Jean-Marie Tjibaou...
"Le peuple mérite d'être organisé, structuré, c'est ma conception de la démocratie et de la République. Il doit être consulté, à chaque fois que nécessaire, mais représenté. Je ne suis pas pour la démocratie directe, une espèce de spontanéisme où, pour reprendre les thèses de Rousseau, chaque représentant doit être d'abord soumis aux vérifications du peuple... Non. Le peuple donne mandat." François Hollande
Un long entretien qui se termine par l'évocation de l'héritage royal et royaliste de la nation française, et un souvenir confié par François Hollande, remontant à l'époque où il était conseiller à l'Elysée (de 1981 à 1983) : « François Mitterrand cherchait un lieu pour accueillir les chefs d'Etat les plus riches de la planète. Mitterrand a dit "Nous allons prendre Versailles" (...) pour prendre possession de ce lieu, à la fois pour impressionner Reagan et Thatcher, (...), et en même temps pour dire que la République dirigée par un Président socialiste prend en compte toute son Histoire. »