Dans le biopic qui leur est consacré, "Stan et Ollie", les stars comiques des années 1930, Laurel et Hardy, sont présentées comme des amis de toujours. Quelle était leur réelle relation ? Comment se sont-ils rencontrés, qui menait l'autre à la baguette ? Leur biographe Roland Lacourbe répond.
Entre Stan Laurel et Oliver Hardy, tout commence en 1926 avec un gigot. Laurel et Hardy jouent ensemble dans une dizaine de films, mais sans scène en commun. Et un jour, l’alchimie du duo se produit… Le biographe de Stan Laurel et Oliver Hardy, Roland Lacourbe, dont l'essai de référence est paru aux éditions de l'Archipel à l'occasion de la sortie du biopic Stan et Ollie, raconte leur véritable histoire.
Naissance d'une alchimie
"Au départ, Laurel était Hardy. C'est-à-dire que Laurel, dans ses courts-métrages burlesques où il était seul, était un personnage dominateur.
Et d'un seul coup, avec Hardy, il se retrouve sous lui, sous la domination de ce personnage imposant par sa stature, par sa grosseur.
Un jour, Hardy, qui aime beaucoup faire la cuisine, se brûle la main en se faisant cuire un gigot. Il est donc obligé d'aller à l'hôpital et ne peut pas tourner le lundi suivant. Il manque donc un acteur pour tourner. On demande à Laurel de reprendre le rôle. Il refuse. On lui donne un cachet supplémentaire. Il finit par accepter. Ils jouent ainsi dans une petite dizaine de films, parfois sans même un plan en commun, côte-à-côte mais pas encore ensemble. Et puis, dans le film Les Deux Détectives, l'alchimie prend et on voit Laurel et Hardy tels qu'on les connaît, le duo comique.
Puis progressivement, les interactions et les ressorts dramatiques vont se développer entre eux, et surtout avec le tournant du parlant qu'ils prennent admirablement, ils jouent avec les dialogues et la mise en scène."
Une stricte répartition des rôles
"Laurel était le cerveau du couple, oui. Laurel était payé pratiquement le double de Hardy. Et Hardy reconnaissait volontiers que Laurel lui était supérieur sur le plan intellectuel.
Hardy était un personnage extrêmement chaleureux qui aimait beaucoup les relations humaines. Alors que Laurel était peut-être parfois un peu difficile à vivre. Laurel, c’est quelqu’un qui ne raisonne pas comme un être humain.
Je me rappelle d’une séquence dans Way Out West où Laurel est enfermé dans un placard et Hardy le cherche partout, ne le trouve pas. Il finit par ouvrir la porte, le trouve dans le placard et lui dit : “Mais pourquoi tu n’as pas appelé ?” Laurel lui dit : “Il faisait tellement noir que j’ai pensé que tu ne m’entendrais pas.” Je trouve ça merveilleux. Ça définit tout à fait la personnalité de Laurel qui est d’un autre monde.
Laurel écrivait ses gags, ses scénarios, et lorsque Hardy arrivait le matin, il discutait avec lui et lui montrait ses trouvailles. Hardy trouvait toujours ça génial. Et finalement, ils répétaient ensemble, et ils tournaient comme ça.
L’un des trucs préférés de Hardy, c’était le regard caméra, un regard d‘exaspération. Laurel savait cela, et profitait de cela pour le soir retarder le plus possible le tournage de ces plans pour que ce soit de vrais regards d’exaspération.
Durant la grande période de leurs tournages, entre 1928 et 1940, ils travaillaient ensemble, s’entendaient parfaitement bien, mais le soir, Laurel, à la fin du tournage, allait derrière sa machine à écrire écrire les gags du jour suivant, alors que Hardy, grand amateur de golf, abandonnait le studio pour aller jouer au golf.
Laurel et Hardy ne se sont vraiment fréquentés qu’après leur carrière. Autour de 1946-47, le cinéma est pratiquement fini pour eux. Un producteur anglais, Bernard Delfond, va leur proposer une tournée théâtrale. Ils vont vivre un an à l’hôtel, et beaucoup mieux se connaître. La naissance véritable de leur amitié date de cette période-là. "
The end
"La fin de Laurel et Hardy est très triste parce qu’ils ont été malades longtemps, et les derniers temps, ils ne se voyaient pratiquement plus. Laurel a terminé sa vie en 1965, et il a continué toute sa vie à écrire pour Laurel et Hardy. Il y a des pages et des pages de gags, de trouvailles, de scénarios, d’échanges de répliques, pour des films qui n’existent pas."