La voix de Jacqueline de Romilly s'est éteinte

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La voix de Jacqueline de Romilly s'est éteinte

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"Madame la Grèce" comme certains l'avaient surnommée est morte ce samedi à l'âge de 97 ans. Passionnée notamment par l'historien Thucydide (un des "hommes de sa vie", disait-elle), Jacqueline de Romilly avait passé sa vie à défendre la langue et la culture grecques. En octobre 2005, dans un entretien intégralement rediffusé ce lundi (à 9h05), elle confiait à Emmanuel Laurentin en quoi les lettres classiques étaient "la seule discipline en mesure de former des citoyens capables de penser juste" :

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Jacqueline de Romilly
Jacqueline de Romilly
© Radio France - Brigitte Eymann

Jacqueline de Romilly Brigitte Eymann©Radio France

Nommée ambassadrice de l'hellénisme en 2000, cinq ans après avoir obtenu la nationalité grecque, elle avait déclaré : "Je regrette que l'on n'oeuvre pas suffisamment pour ce qui développe la formation de l'esprit par la culture, par les textes et l'intimité avec les grands auteurs, perdant ainsi un contact précieux avec ce que les autres ont pensé avant nous". Et d’ajouter : "On veut que les enfants sachent ce qui se passe autour d'eux. Mais quelle merveille de découvrir un monde autre pendant une heure. Pourquoi tirerait-on davantage d'une rencontre avec n'importe qui que d'un tête-à-tête avec Andromaque ou Hector ?".

Lauréate du Concours général la première année où les filles pouvaient concourir puis première normalienne intégrant la rue d'Ulm, elle fut aussi la première femme, en 1973, professeur au Collège de France (chaire : La Grèce et la formation de la pensée morale et politique). Et elle ne vit que Marguerite Yourcenar siéger avant elle à l'Académie française, entrée finalement en 1989, après un premier échec. Avec Alain Peyrefitte qui commença par lui répondre citant Thucydide : « Tout ce que l’on peut souhaiter aux femmes, c’est que l’on parle d’elles le moins possible parmi les hommes. »

Grand Croix de la légion d'honneur - seules quelques femmes y ont eu droit -, Jacqueline de Romilly disait avec malice ne pas avoir eu, "bien sûr", la vie qu'elle souhaitait : "Avoir été juive sous l'Occupation, finir seule, presque aveugle, sans enfants et sans famille, est-ce vraiment sensationnel ? Mais ma vie de professeur a été, d'un bout à l'autre, celle que je souhaitais".

Philippe Vallée revient sur le fil de cette vie :


Toutefois, cette grande intellectuelle, docteur honoris causa des universités d'Oxford, d'Athènes, de Dublin, de Heidelberg, de Montréal et de Yale, qui jugeait les années 2000 "inquiétantes et pleines de périls" restait confiante dans la "possibilité humaine de se reprendre, de se redresser et, avec l'aide du passé, d'inventer quelque chose de mieux".

Ecoutez l'évocation d'Erik Orsenna , interrogé par Isabelle Pasquier :


Avec AFP

Découvrez également l'hommage rendu à l'académicienne par La Fabrique de l'Histoire du 20 décembre.

Magnifiques portraits chez elle, entre 2004 et 2007. Par Olivier Roller

"Empreintes : Jacqueline De Romilly. La Vigie Grecque". Vodeo

La célèbre série de France 5 dans un numéro réalisé par Bernard Jourdain. A louer ou acheter sur ce site qui propose un autre documentaire sur Jacqueline De Romilly.

Centre culturel hellénique, à Paris