'Le Mouton Givré' réinvente la glacière écolo, made in France et féministe

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'Le Mouton Givré' réinvente la glacière écolo, made in France et féministe

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Elodie Madebos et Cinthia Born, les deux co-fondatrices du Mouton Givré participent à la tonte et au tri des toisons de laine de mouton
Elodie Madebos et Cinthia Born, les deux co-fondatrices du Mouton Givré participent à la tonte et au tri des toisons de laine de mouton
© Radio France

Demain l'éco. Berthe et Marguerite, ce sont les noms d’un sac isotherme et d’une lunch box créés par deux jeunes couturières lotoises à base de laine de mouton, de lin et de chanvre. Leur atelier installé à Cambes dans le Lot ne salarie pour le moment que des femmes et fonctionne aux horaires de mères de famille.

Tondre un mouton coûte aujourd’hui plus cher que le prix de sa laine. Très mal payée à l’éleveur, 80% de la laine en France est vendu à perte à l’étranger, principalement en Asie, pour revenir tricotée sous forme de pulls et autres vêtements.

Contactée en 2018 par des éleveurs de brebis caussenarde du Lot qui cherchent à valoriser leur laine, Cinthia Born, couturière et enfant du pays se met à confectionner des capes et manteaux dans du drap de laine. Bien sûr, la laine tient chaud mais la jeune femme en étudiant les propriétés de cette matière se souvient qu’elle est un excellent isolant thermique. Elle tient également au frais et voilà comment est arrivée l’idée du sac isotherme en matière naturelle. Une idée d’autant plus géniale que le sac isotherme classique que nous avons l’habitude de voir est souvent produit à l’autre bout du monde en matière plastique et aluminium, non recyclable et particulièrement polluant.

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La laine comme isolant thermique. Reportage d'Annabelle Grelier

3 min

Berthe le sac isotherme en feutrine de laine, toile de lin et chanvre
Berthe le sac isotherme en feutrine de laine, toile de lin et chanvre
© Radio France - Annabelle Grelier

Notre glacière en matière naturelle, durable et biodégradable a tout de suite séduit car elle était une alternative vertueuse à un produit très peu respectueux de l’environnement, explique Élodie Madebos

Responsable de production, l’ancienne costumière avoue qu’elle prend énormément de plaisir à travailler des matières nobles et naturelles.

Il faut admettre que la laine est une matière vivante dont on avait presque oublié les magnifiques performances, elle permet de garder des aliments au frais entre 4 et 6 heures et les produits surgelés pendant 1h30.

Production locale et circuit court

Très impliquées dans le développement rural, Cinthia Born et Élodie Madebos, les deux co-gérantes du Mouton Givré, participent à la tonte avec les éleveurs lotois puis elles trient les toisons. Et pas question de jeter les poils noirs qui sont en général bannis ne pouvant être teints. Les deux jeunes Lotoises, elles, estiment qu’ils donnent une originalité et un aspect unique à tous leurs sacs. Elles ont également décidé de payer le kilo de laine 50 centimes d’euros au lieu des 10 centimes habituellement négociés pour permettre d’apporter un revenu supplémentaire aux éleveurs.

80% de la laine française est vendu à l'étranger pour revenir dans nos magasins sous forme de pulls et autres vêtements
80% de la laine française est vendu à l'étranger pour revenir dans nos magasins sous forme de pulls et autres vêtements
- Lucas Madebos

Cette année, 3 tonnes et demie de laine ont été récoltées et envoyées dans le Gévaudan, à Saugues, pour y être lavées dans la dernière société française qui lessive sans aucun produit chimique mais tout simplement au bicarbonate de soude et au savon de Marseille à l’aide de machines anciennes traditionnelles datant du XIXe siècle. C’est dans le Limousin que la laine sera feutrée selon un procédé breveté par la jeune entreprise.

La toile de lin est achetée chez Charvet dans le Nord de la France. Il n’y a que la toile de chanvre dont sont faites les sangles des sacs qui est achetée hors de l’hexagone. Elle vient de Roumanie car seuls les pays de l’Est ont gardé le savoir-faire, nous explique Cinthia Born, qui œuvre pour qu’une production française revienne dans le Lot.

Le chanvre est une plante magnifique. Elle peut être cultivée partout. Elle n’a pas besoin d’eau, elle dépollue les sols et l’air et n’a pas besoin d’engrais et de pesticides. La toile de chanvre est très résistante et dure très longtemps. Mais la transformation de la fibre est un travail, long, fastidieux et coûteux. Alors que la France est la première productrice de chanvre en Europe elle ne sait plus le filer,

déplore Cinthia Born, qui travaille en étroite collaboration avec Virgocoop, une coopérative lotoise pour recréer une filière du chanvre en France.

Une philosophie de femme

Depuis août 2019, le Mouton Givré produit dans un petit atelier de 40 mètres carrés au sein de l’incubateur Quercypôle, à Cambes. Un atelier déjà trop petit pour la jeune pousse qui prendra bientôt son envol en construisant un atelier de fabrication de 160 mètres carrés qu’elle installera dans une grange sur l’exploitation agricole du conjoint de Cinthia Born, éleveur de vaches limousines à Reyrevignes.

" Nous travaillons au rythme de la vie d'une femme " Elodie Madebos co-fondatrice et responsable de production
" Nous travaillons au rythme de la vie d'une femme " Elodie Madebos co-fondatrice et responsable de production
© Radio France - Annabelle Grelier

Plus grand, ne veut pas pour autant dire production à la chaîne. Les deux co-gérantes sont formelles.

Nous ne sommes pas un atelier chinois ou au Bangladesh. L’idée c’est de travailler en conscience, de faire les choses bien et pas forcément se précipiter, de ne pas regarder l’heure. Au contraire, chaque couturière coud son sac de A à Z avec beaucoup d’amour, beaucoup d’intérêt. Le bien être au travail est gage de qualité

assure Elodie Madebos, co-gérante et responsable de production.

D’ailleurs, les horaires sont adaptés aux emplois du temps des femmes pour la plupart mères de famille, des journées qui se terminent à 17h et fermeture tous les mercredis après-midi.

Cinthia Born présente Berthe le sac isotherme et Marguerite la lunch box
Cinthia Born présente Berthe le sac isotherme et Marguerite la lunch box
© Radio France - Annabelle Grelier

Aujourd’hui, le Mouton Givré compte 4 salariées, un effectif exclusivement féminin. Le recrutement va petit à petit s’accélérer et pourquoi pas s’élargir à la gente masculine mais la philosophie de l’entreprise restera la même. Un savant équilibre entre vie privée et vie professionnelle que les deux cheffes d’entreprises comptent bien conserver malgré l’afflux des commandes.

Notre objectif n’est pas de faire du fric, on n’a pas créé une entreprise pour rogner sur tout et pour faire plus de marge. Même si on pourrait se développer plus vite, on préfère prendre notre temps pour conserver notre qualité de vie.

Le Mouton Givré a déjà vendu 3 000 pièces depuis sa création et le succès de leur produit se confirme au fil des mois. C’est le célèbre glacier Berthillon qui a été le premier à leur commander leur sac isotherme, qui d’ailleurs lui a valu le nom de Berthe pour la glacière. Quant à Marguerite, pour la lunch box, c’est un hommage à la grand-mère de Cinthia Born. Car nos produits incarnent le retour aux vraies valeurs et au bon sens paysan, estime-t-elle.

D’autres créations sont dans les cartons : Cinthia Born et Élodie Madebos planchent en ce moment sur des modèles de housses d’instruments de musique, car en plus d’être isotherme, la feutrine de laine est aussi anti-choc. Décidément, une belle matière, source d’inspiration inépuisable !