Les coups de coeur des équipes de France Culture
En cette fin d'année, les équipes de France Culture vous font part de leurs coups de coeurs de l'année culturelle 2010, dans chaque catégorie :
Roman :
Le Siècle des nuages , Philippe Forest,
Gallimard , juillet 2010
« Ils descendaient depuis l'azur, laissant vers le bas grossir la forme de leur fuselage, traçant doucement leur trait au travers des nuages. Le vrombissement des quatre moteurs, juchés sur le sommet des ailes, enflait, vibrant dans le vide, résonnant jusqu'à terre. Leur ventre touchait enfin la surface de l'eau, projetant à droite et à gauche un panache puissant qui retombait en écume, bousculant tout avec des remous épais qui dérangeaient les barques amarrées et remontaient haut sur le bord des berges.
C'était l'été sans doute. Les vacances étaient déjà commencées. Il avait couché son vélo dans l'herbe toute brûlée par la chaleur du soleil. Peut-être attendait-il allongé sur le sol ou bien se tenait-il assis sur un ponton, les jambes se balançant au-dessus du courant très lent. À perte de vue, le grand ciel bleu du beau temps recouvrait le monde. Il regardait descendre vers lui le signe en forme de croix de la carlingue et des ailes. Lorsque l'avion heurtait l'eau, le choc le ralentissait net. Forant dans le fleuve une tranchée immatérielle, il creusait son sillage entre les rives, rebondissant formidablement d'avant en arrière, basculant sur l'un et puis l'autre de ses flancs, oscillant sur ses deux flotteurs jusqu'à ce qu'il s'arrête enfin : rond avec son ventre vaste comme celui d'une baleine, inexplicable parmi les péniches et les navires de plaisance, immobile comme un paquebot étrange mouillant au beau milieu des terres. »
- présentation éditeur -
Essai :
Les nouvelles frontières de la société française , Didier Fassin
La Découverte , février 2010
« Au cours des dernières décennies, les frontières du territoire français se sont refermées pour celles et ceux, désormais indésirables, en provenance des pays non communautaires, qu'ils soient travailleurs, étudiants, demandeurs d'asile, enfants ou conjoints d'étrangers. Mais parallèlement à ce phénomène d'autant plus manifeste qu'il est devenu objet de surenchère politique, d'autres frontières moins visibles se sont constituées à l'intérieur de l'espace national.
Raciales, ethniques ou religieuses, elles définissent des lignes de partage que la reconnaissance tardive des discriminations et la montée de revendications minoritaires ne permettent plus d'ignorer. Longtemps pensées séparément, les unes à travers la « question immigrée », les autres en termes de « racialisation », ces frontières extérieures et intérieures sont étroitement liées, tant dans les histoires familiales que dans les discours publics.Résultat de quatre années d'enquêtes menées par une équipe de sociologues, anthropologues, historiens, politistes, juristes, psychiatres et psychanalystes, cet ouvrage met au jour les transformations contemporaines des identités et des altérités dans la société française. »
- présentation éditeur -
Bande dessinée : ex aequo,
Quai d’Orsay : chroniques diplomatiques , de Christophe Blain et Abel Lanzac
Dargaud , mai 2010
Gaza 1956, en marge de l’histoire *, * de Joe Sacco
Futuropolis , janvier 2010
Exposition :
Claude Monet. 1840-1926 , du 22 septembre 2010 au 24 janvier 2011, aux Galeries nationales du Grand Palais.
Pendant plus de 60 ans, Claude Monet a peint sans relâche. Son oeuvre, placée sous le signe du réalisme dans les années 1860, incarne ensuite la plus pure expression de l'impressionnisme, puis devient au XXe siècle l'un des fondements de l'art moderne. C'est l'ensemble de ce parcours riche et fécond que l'exposition réinterroge. Réunissant près de deux cents peintures, elle rassemble des prêts exceptionnels du musée d'Orsay et des collections nationales, comme des musées et collections privées du monde entier.
- présentation du site du Grand Palais -
Pour visiter virtuellement l'exposition...
Théâtre : ex aequo,
La casa de la fuerza , par Angelica Lidell, Festival d'Avignon (juillet 2010).
« *La Maison de la force * est le lieu de tous les contrastes. La fillette qui, au début, traverse le plateau à bord de son petit avion rose donne le ton lorsqu'elle lit ces quelques mots : « Aucune montagne, aucune forêt, aucun désert ne nous délivrera du mal que les autres trament à notre intention. » La dernière création d'Angélica Liddell est un spectacle en rose et noir, où le rose est aussi la couleur du deuil. Six femmes (trois d'abord, puis trois autres) habitent la scène pour dire la difficulté d'être femme quand la relation à l'autre devient rapport de force, humiliation quotidienne, cruauté. Les trois femmes - ou les trois sœurs - rêvent de partir pour le Mexique. Mais là-bas, la violence est horreur à grande échelle. On y a même adopté un mot pour désigner les meurtres de femmes qui, depuis le début des années 90, se comptent par centaines dans la ville de Ciudad Juárez, dans l'État du Chihuahua, à la frontière avec les États-Unis : le « féminicide ». Alors quand elles boivent, fument, chantent et dansent, on devine la souffrance intérieure qui est la leur. Les mariachis s'éclipsent au profit d'un violoncelliste entonnant le *Cum dederit * de Vivaldi. La danse laisse place à d'autres pratiques physiques qui épuisent le corps, le convulsent, le marquent, le saignent, au propre et au figuré. Ces femmes se racontent, elles livrent sans masque leurs propres histoires. Et les confessions intimes alternent avec les hurlements de douleur ou de colère. « Dans La Maison de la force , le défi est de me survivre à moi-même, explique Angélica Liddell. Pas de médiation, pas de personnage. Rien que la pornographie de l'âme ». Et la solitude, encore et toujours, quel que soit l'interlocuteur. CV »
- présentation du site du Grand Palais -
Les naufragés du fol espoir , par Ariane Mnouchkine, La Cartoucherie (15 septembre au 31 décembre 2010).
« Les Naufragés du Fol Espoir se veut une comédie épique et romanesque, plongée dans une époque qui fut le berceau tumultueux de la nôtre. Une histoire édifiante, un voyage, un bateau, un naufrage, une île déserte, des émigrants, un fol espoir…
Et si nous y allions ? Si nous cherchions la lune sur la terre ? De quoi aurait-elle l’air ? Elle serait blanche, brillante et vierge. Ce serait une île. Imaginons. On pourrait y tracer le modèle de l’humanité future. On dessinerait la démocratie idéale trois mille ans après Eschyle (…) »
Hélène Cixous
Les chaises , par Luc Bondy, Théâtre Nanterre-Amandiers (29 au 30 septembre / 1er au 23 octobre 2010).
« Deux vieux, âgés de 94 et 95 ans, vivent isolés dans une maison située sur une île battue par les flots. Pour égayer leur solitude et leur amour désuet, ils remâchent inlassablement les mêmes histoires. Mais le vieil homme, auteur et penseur, détient un message universel qu’il souhaite révéler à l’humanité. Il a réuni pour ce grand jour d’éminentes personnalités du monde entier. Un orateur professionnel aura la charge de traduire ses pensées. Les invités, invisibles pour le spectateur, arrivent tels des fantômes et prennent place sur des chaises qui envahissent peu à peu l’espace jusqu’à le saturer. Le couple se retire et laisse soin à l’orateur d’éclairer l’humanité. Mais, comble de l’ironie, l’orateur est en fait sourd-muet. Comme souvent chez Ionesco, la pièce repose sur une ambivalence déroutante : elle oscille en permanence entre comique et tragique, le rêve et le cauchemar. Le maître du théâtre de l’absurde, pour qui« le comique est tragique et la tragédie de l’homme, dérisoire », voyait cette pièce comme une « farce tragique ».
- présentation du site du Théâtre Nanterre-Amandiers -
**Danse : ** *En Atendant, * d’Anne Teresa de Keersmaecker, Festival d'Avignon (juillet 2010).
Disque : ex aequo,
Tango 3.0 , Gotan Project
Barclay , avril 2010
Where the oceans end , CocoonBarclay , octobre 2010
Cinéma long métrage :
Des hommes et des dieux , Xavier Beauvois
Mars Distribution , septembre 2010
« Un monastère perché dans les montagnes du Maghreb, dans les années 1990. Huit moines chrétiens français vivent en harmonie avec leurs frères musulmans. Quand une équipe de travailleurs étrangers est massacrée par un groupe islamiste, la terreur s’installe dans la région. L'armée propose une protection aux moines, mais ceux-ci refusent. Doivent-ils partir ? Malgré les menaces grandissantes qui les entourent, la décision des moines de rester coûte que coûte, se concrétise jour après jour…
Ce film s’inspire librement de la vie des Moines Cisterciens de Tibhirine en Algérie de 1993 jusqu’à leur enlèvement en 1996. »
- synopsis -
**Film documentaire : **
Les rêves dansants, sur les pas de Pina Bausch , Anne Linsel et Rainer Hoffman
Jour2fête , octobre 2010« En 2008, Pina Bausch, quelques mois avant sa mort, décide de reprendre son fameux spectacle Kontakthof, non plus avec sa troupe, mais avec des adolescents de 14 à 18 ans qui ne sont jamais montés sur scène et n'ont jamais dansé. Ce documentaire est leur histoire... »
- synopsis -
Site Internet :
Mediapart, « Journal en ligne d'information généraliste, s'adressant à une clientèle que ni l'offre papier existante ni l'offre en ligne ne satisfont aujourd'hui. »
**Production télévisée : **
Carlos , Olivier Assayas
MK2 Diffusion , juillet 2010