Les quatre dossiers prioritaires de Joe Biden, nouveau président des États-Unis
Par Valérie CantiéJoe Biden, élu 46e président des États-Unis, a déjà quatre dossiers prioritaires sur son bureau : mettre en place une politique environnementale, lutter contre la Covid-19 et la crise économique, réinstaurer un plan de couverture santé pour tous. "Obamacare est une affaire personnelle" a-t-il dit.
Après 4 jours de suspense à propos de résultats particulièrement disputés avec Donald Trump, le démocrate Joe Biden a été élu ce samedi à la Maison Blanche. Que souhaite y faire avant tout celui qui sera officiellement investi le 20 janvier prochain ? Climat, crise sanitaire et économique et couverture médicale pour tous, détail de quatre de ses priorités.
Revenir dans l'Accord de Paris sur le climat
Donald Trump avait fait de la sortie des États-Unis de l'Accord de Paris sur le climat une priorité et une annonce tonitruante le 1er juin 2017. Il se trouve que la date effective de cette sortie était arrêtée au mercredi 4 novembre 2020, au lendemain de l'élection présidentielle. L'un des objectifs de l'Accord de Paris, signé en décembre 2015 par 195 pays, est de contenir la hausse des températures à +1,5° C par rapport à l'ère pré-industrielle.
Saisissant cette date symbolique du 4 novembre, Joe Biden s'est empressé d'annoncer que s'il était élu, le pays allait revenir dans l'Accord de Paris. Les États-Unis devront officiellement notifier à l'ONU leur volonté de faire machine arrière.
Dans exactement 77 jours, une administration Biden rejoindra l'Accord de Paris.
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Mais notifier l'ONU ne sera qu'un début. En effet, la première puissance mondiale ne participera pas le 12 décembre à la conférence internationale sur le climat COP 26 au Royaume-Uni, car l'investiture de Joe Biden n'aura lieu que le 20 janvier 2021.
► Le programme de Joe Biden en matière environnementale
De manière plus générale, la politique environnementale des États-Unis devrait radicalement changer. Lors de sa campagne, Joe Biden a présenté un plan de 1 700 milliards de dollars pour que le pays atteigne d'ici 2050 la neutralité carbone.
Donald Trump avait fait de l'industrie des énergies fossiles l'un de ses chevaux de bataille. Il n'avait pas hésité également à mettre en doute les scientifiques sur le changement climatique et avait détricoté plusieurs garde-fous environnementaux, nommant un climato-sceptique à la tête de l'Agence sur le climat par exemple.
Selon le chercheur néerlandais Niklas Höhne, membre du groupe Climate Action Tracker, cité par l'AFP :
Le plan climatique de Biden pourrait permettre à lui seul de réduire la hausse des températures de l'ordre de 0,1°. Chaque dixième de degré compte !
La fracturation hydraulique, qui permet l'extraction de gaz naturel et de pétrole et qui n'a rien d'écologique, est devenue elle aussi un enjeu de campagne. Elle consiste à extraire du pétrole et des gaz emprisonnés dans le sous-sol en injectant des fluides à forte pression, pour fracturer les roches. L'industrie s'est beaucoup développée dans les années 2000 et 2010, faisant des États-Unis depuis 2014 le premier producteur pétrolier au monde. Mais le coût environnemental et sanitaire est important : secousses sismiques, pollution de l'air et de l'eau. Et les fuites de méthane dans l'atmosphère renforcent le réchauffement climatique.
Donald Trump a affirmé régulièrement que son adversaire voulait arrêter le fracturation hydraulique, ce que l'équipe démocrate a dû démentir à plusieurs reprises. La fracturation, est notamment un sujet sensible en Pennsylvanie, État clé. Joe Biden s'en est finalement sorti en affirmant que le gaz naturel serait un "pont" vers les énergies renouvelables. Il s'est donc engagé à ne pas interdire complètement la fracturation hydraulique mais a aussi affirmé, lors du deuxième débat présidentiel notamment, qu'il comptait petit à petit en finir avec le pétrole. D'ailleurs, depuis le soir du scrutin, la perspective d'une présidence Biden était jugée défavorable par les marchés pétroliers, les cours du baril américain étaient en baisse.
Lutter contre le coronavirus
Joe Biden veut tout de suite mettre en place une stratégie nationale sur la Covid-19. Il compte faire voter une loi d'envergure au Congrès pour financer une campagne nationale de tests. Il entend lancer très vite la fabrication aux États-Unis de produits et équipements médicaux, imposer le port du masque dans les bâtiments fédéraux et dans les transports entre États, et la gratuité pour tous du futur vaccin. Il a promis de prendre conseil auprès du Dr Anthony Fauci, membre très respecté (sauf par Donald Trump, qui a laissé entendre qu'il le limogerait dès l'issue du scrutin) de la cellule de crise de la Maison Blanche sur le coronavirus.
► Le programme de Joe Biden dans la lutte contre le coronavirus
Il veut "ôter les muselières [des experts américains] pour que le public ait les informations qu'il mérite et dont il a besoin". Il compte aussi stopper la procédure de retrait des États-Unis de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), lancée par Donald Trump en juillet dernier.
Enrayer la crise économique
Le vote d'un vaste plan d'aide pour la relance de l'économie est l'autre priorité de Joe Biden. Il compte sur sa capacité à convaincre les élus républicains pour sortir de l'impasse actuelle au Congrès, où aucun texte n'a été finalement voté.
Dans son plan de relance de la production américaine après la crise du coronavirus, il prévoit 700 milliards de dollars. Pour le financer, il augmentera les impôts des Américains les plus riches et des grosses entreprises, notamment en doublant la taxe sur les bénéfices des entreprises réalisés à l'étranger. Joe Biden veut aussi que les recettes fiscales soient réinvesties dans des programmes sociaux, dans l'éducation, et dans la modernisation des infrastructures.
► Le programme de Joe Biden en matière économique
Joe Biden veut créer cinq millions d'emplois à travers son plan "Buy American" (acheter américain). Dans ce plan, le gouvernement prévoit de dépenser 400 milliards de dollars pour acheter des produits et des services. 300 milliards de dollars seraient également destinés à la recherche et au développement, dont la moitié destinée aux industries renouvelables.
Les travailleurs en première ligne sur la crise de la Covid recevraient une augmentation de salaires et jusqu'à 14 jours d'arrêt de travail payés s'ils sont malades de la Covid ou s'ils doivent rester chez eux pour s'occuper d'un de leurs proches malade du virus. Et le gouvernement rembourserait les employeurs ayant fait l'avance de l'arrêt de travail.
Joe Biden prévoit aussi de doubler le salaire minimum, le passant à 15 dollars de l'heure au niveau fédéral. Certains États (comme New York et la Californie) ont déjà mis en place sur leur territoire un salaire minimum supérieur au salaire minimum fédéral actuel qui n'atteint pas les 8 dollars de l'heure.
Restaurer une couverture médicale pour tous
Donald Trump a passé les quatre années de son mandat à détricoter plusieurs actions de Barack Obama. L'une des plus significatives est "Obamacare" (Patient Protection and Affordable Care Act), la couverture médicale pour tous, qui impose notamment à toutes les entreprises de financer une assurance santé de base pour leurs salariés. Obamacare empêche aussi les assurances santé de faire d'une maladie préexistante une condition d'adhésion. Obamacare a également étendu le programme d'aide médicale aux plus pauvres, Medicaid. 15 millions d'Américains de plus ont une couverture santé.
Mais de nombreux États ont porté Obamacare devant les tribunaux. Dans ces États (comme le Texas), le programme n'est pas appliqué. Les républicains tentent régulièrement de faire abroger la loi. Le texte est passé plus d'une cinquantaine de fois devant le Congrès.
Pour l'instant, les élus ont détricoté certaines parties du texte, surtout les principaux articles. La Cour suprême fédérale doit réexaminer la constitutionnalité de la loi. La nomination par l'administration Trump de la juge conservatrice Amy Coney Barrett pour remplacer Ruth Bader Ginsburg donne la majorité aux juges conservateurs, qui pourraient bien abroger le texte, comme l'a toujours souhaité Donald Trump.
Ce qui a fait dire à Joe Biden :
Les soins de santé sont pour moi une affaire personnelle. Obamacare est une affaire personnelle. Quand je vois le président essayer de le démolir, je le prends personnellement. Nous devons nous appuyer sur ce que nous avons fait parce que chaque Américain mérite des soins de santé accessibles.
Par conséquent, le gouvernement fédéral ne régulant plus la couverture santé, et l'obligation de souscrire une couverture ayant été ôtée du texte, 30 millions d'Américains sont sans assurance médicale, car depuis que l'état ne contrôle plus les prix, les polices d'assurance ne cessent d'augmenter.
► Le programme de Joe Biden en matière de couverture médicale
Joe Biden étendrait Obamacare à plus de familles de classe moyenne. Toute personne ne paierait pas plus de 8,5% de ses revenus pour son assurance santé gouvernementale. Il veut permettre aux salariés de choisir la couverture santé publique si celle de leur employeur ne leur convient pas.