Hélène Frappat : « Le roman, la littérature, la suspension d'incrédulité et la fiction, c'est ça notre Basic Instinct»

Hélène Frappat
Hélène Frappat - Melania Avanzato - oct 2020
Hélène Frappat - Melania Avanzato - oct 2020
Hélène Frappat - Melania Avanzato - oct 2020
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Un court entretien comme une humeur du jour à partir de cette question : À quoi pensez-vous ? l’écrivaine Hélène Frappat, y répond au Micro d'Arnaud Laporte.

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Chaque matin, comme un avant-goût du grand entretien du soir, à 19h dans l'émission Affaires Culturelles, Arnaud Laporte interroge ses invités sur ce qui les occupe, les préoccupe dans l’actualité, leur quotidien ou leur pratique artistique. La question est simple : "À quoi pensez-vous ?" 

Aujourd’hui avec, l’écrivaine Hélène Frappat, à l'occasion de la parution de « Le mont Fuji n’existe pas » aux éditions Actes Sud. A quoi pense-t-elle ce matin ? 

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Je pense au film que j'ai vus hier soir, Basic Instinct de Paul Verhoeven. C’est la première fois que je le revoyais depuis très longtemps. Il y a des films ou des livres dont on prétend qu'ils ont quelque chose à nous dire dans une certaine période. J'avais totalement oublié que le personnage interprété par Sharon Stone dans « Basic Instinct » est écrivaine. Je n'arrête pas de repenser à une scène extraordinaire, l’écrivaine soupçonnée de meurtre est assise à l'arrière d'une voiture de police, elle s'allume une cigarette tandis qu'un des deux flics lui demande ce que ça fait d'être un écrivain. Elle répond : « Écrire, c'est apprendre à mentir, c'est la suspension d'incrédulité de Coleridge ». Je suis totalement d'accord avec ma collègue de Basic Instinct. Suspendre l'incrédulité, c'est ce que fait un écrivain qui travaille chacune de ses phrases pour produire une croyance. A l'arrière de la voiture de police, l'écrivain tend une cigarette au flic interprété par Michael Douglas qui la refuse. Il lui répond : « I quit » (j'ai arrêté de fumer). A quoi l'écrivaine rétorque : « Tu vas replonger ». Replonger pas seulement dans la clope ou la drogue, ni le sexe ou alors au sens de la pulsion amoureuse que constitue tout désir de fiction.  C'est quoi, notre Basic Instinct ? C'est la croyance en un récit qui est pour nous tous, êtres humains, notre instinct, notre besoin vital et essentiel. Ce matin, après avoir revu le chef d'œuvre de Paul Verhoeven c'est à cela que je pense. J'aurais envie d'être une écrivaine qui tend un roman à un dirigeant politique qui a arrêté de croire en la littérature. Alors je lui dirais tu as arrêté, mais toi aussi tu vas replonger, parce que le roman, la littérature, la suspension d'incrédulité et la fiction, c'est ça notre basic instinct, notre instinct primitif d'être humain, notre besoin essentiel. 

🎧 Pour écouter Hélène Frappat dans Affaires Culturelles, c'est par ici ↓

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