

Quatrième temps de la série où l'auteur Frankétienne raconte son retour aux sources de la culture haïtienne grâce à sa langue maternelle, le créole. L'écriture dramatique est aussi une nouvelle porte d'entrée vers un public plus populaire.
- Frankétienne poète et dramaturge
Pour ouvrir ce quatrième entretien d'"A voix nue", Frankétienne s'explique sur son choix d'écrire un roman en créole, Dézafi, au mi-temps des années 1970. Il rappelle que sa langue maternelle est le créole : "Ma mère ne parlait pas le français, dans le quartier, on ne parlait pas le français."
Je suis allé à l'écriture créole, créolophone, pas pour illustrer quoi que ce soit. Il y a toujours des écrivains militants d'une langue qui disent qu'ils vont illustrer, défendre la langue maternelle. Tout chez moi est pulsionnel.
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Il raconte avec humilité la difficulté qu'il a éprouvée pour écrire en créole. N'y parvenant pas au bout d'un mois d'essai infructueux, il se décide à commettre un acte "exceptionnel", "extraordinaire" qui le débarrasserait de cette "aliénation" qui le paralysait : brûler 800 pages de textes en français représentant deux romans à venir. Comme par magie, le lendemain Frankétienne a enfin pu se mettre à l'écriture du premier roman en créole : "Il y a des choses qui fonctionnent pour moi que je ne recommande pas aux autres. C'est l'autodafé de deux textes qui m'a libéré." Mais ce roman n'atteint pas le public espéré par Frankétienne qui reconnaît avoir oublié "qu'un peuple analphabète ne lit et n'écrit dans aucune langue, même pas dans sa propre langue !" C'est alors qu'il se tourne vers le théâtre qui lui offre "une communication directe" avec son peuple. La pièce Pèlin-Tèt écrite en 1978 est censurée : "C'était un aveu clair de militantisme et de militance face à la dictature féroce de Duvalier."
Le théâtre représente pour moi la voie royale au niveau de la communication, au niveau de l'exposition, au niveau du discours à la fois politique et du discours idéologique, du discours quotidien. On a un peuple qui écoute son vécu, qui revit son quotidien à travers le théâtre. Et la communication est immédiate.
Par Delphine Japhet. Réalisation : Luc-Jean Reynaud. Prise de son : Pierre Quintard. Attachée de production : Claire Poinsignon.
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