"L'art de l'amour n'est pas très éloigné de l'art de la guerre" : épisode 6/5 du podcast Pierre Bergé : un temps pour tout

Pierre Bergé en 2014
Pierre Bergé en 2014 ©Sipa -  Philippe Doignon
Pierre Bergé en 2014 ©Sipa - Philippe Doignon
Pierre Bergé en 2014 ©Sipa - Philippe Doignon
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Pierre Bergé n’aime pas regarder en arrière. L’homme d’affaire, collectionneur d’art et passionné de littérature, le compagnon d’Yves Saint-Laurent, le fondateur du Sidaction, nous entraine pourtant à sa suite, dans 85 années d’une vie trépidante où il a toujours su trouver le temps pour tout.

Avec

Rediffusion de l'émission du 29.08.2017.

La première rencontre avec Pierre Bergé, homme d’affaire, mécène, collectionneur d’art, bibliophile, nous amène sur les rives de l’amour. Pour comprendre cet homme aux passions multiples (l’opéra, le théâtre, l’écriture, le Maroc), il faut convoquer le souvenir d’Yves Saint Laurent, son compagnon pendant cinquante ans. Plongée dans l’art de l’amour. Le bâtisseur et le créateur se rencontrent en 1958. Ils s’engagent dans une longue et tumultueuse aventure où l'intime et le professionnel ne seront jamais dissociés. La maison de couture qu’ils fondent en 1961 les soude à jamais l’un à l’autre. Uni, le couple le restera jusqu’au bout, même lorsque Pierre Bergé s’éloigne, épuisé par l’entreprise d’autodestruction à laquelle se voue son compagnon. La mort d’Yves Saint Laurent, en 2008 ne mettra pas plus son terme à l’amour.

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Dans ce premier entretien, Pierre Bergé donne sa définition de l'amour qui "n'est pas égoïste", pour lui, "l'amour c'est aimer l'autre, pas seulement que l'autre vous aime". Il s'interroge aussi sur la fin d'une histoire d'amour, comment il a pu quitter son premier grand amour Bernard Buffet pour vivre une nouvelle histoire avec Yves Saint Laurent, encore maintenant il se demande "comment [il] a pu faire ça", "comment on renonce" pour lui "c'est cela qui est troublant".

Il faut s'engager dans l'amour sans arrière-pensées et sans calculs et puis il faut tout donner dans l'amour, tout. C'est un peu mélo, c'est un peu chanson d'Edith Piaf mais c'est comme ça que ça marche. Si vous ne faites pas ça, ça ne marche pas.

D'Yves Saint Laurent, il raconte le triomphe de son premier défilé pour Dior et évoque sa difficulté à vivre. De toutes façons il estime qu' "un artiste est forcément malheureux". Il dit son regret et sa tristesse de ne pas être arrivé à empêcher Yves Saint-Laurent de s'adonner à la drogue et à l'alcool, "ce sont de faux-amis et ces faux-amis sont plus forts que tout et plus forts que soi". Il reconnaît aussi avoir trouvé "gratifiant" la dépendance d'Yves Saint Laurent à son égard.

A la fin de l'entretien, Pierre Bergé évoque la maladie et la mort d'Yves Saint Laurent. Son cancer au cerveau a duré un an : "Si on aime les gens, on ne peut pas les voir dans un état qui précède la mort qui est un état misérable, pitoyable". Il réclame le droit au suicide assisté et dit ne croire "à rien" et "ne redoute rien".

La première difficulté que rencontre un artiste, c'est de s'affronter, c'est de se confronter à lui-même, autrement ce n'est pas un artiste. Les artistes quels qu'ils soient sont un peu mégalomanes mais il y a deux sortes d'artistes, les mégalomanes heureux et les mégalomanes malheureux. Les heureux il y en a beaucoup et tant mieux pour eux. [...] Un artiste est forcément malheureux.

Par Joëlle Gayot. Réalisation : Anne Perez-Franchini.

Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent