Le « style Rappeneau », du mouvement avant toute chose : épisode 2/5 du podcast Jean-Paul Rappeneau, une vie pour le cinéma

. Première caméra, premier film, Un garçon bien sage (hiver 1949-1950). Jean-Paul Rappeneau est debout, au milieu.
. Première caméra, premier film, Un garçon bien sage (hiver 1949-1950). Jean-Paul Rappeneau est debout, au milieu. - Archives privées Jean-Paul Rappeneau
. Première caméra, premier film, Un garçon bien sage (hiver 1949-1950). Jean-Paul Rappeneau est debout, au milieu. - Archives privées Jean-Paul Rappeneau
. Première caméra, premier film, Un garçon bien sage (hiver 1949-1950). Jean-Paul Rappeneau est debout, au milieu. - Archives privées Jean-Paul Rappeneau
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Adolescent, Jean-Paul Rappeneau, marqué par Citizen Kane, commence à rêver de cinéma…Et même à en faire passionnément, quitte à délaisser ses études…

Avec

Très vite, le lycéen Rappeneau veut s’essayer au cinéma. Chaque jour il admire, devant une vitrine d’Auxerre, de la caméra 16 mm qu’il aimerait tellement avoir entre les mains ! Ses parents la lui promettent en échange du succès au « bachot ». L’examen est réussi, et la promesse tenue.

Je suis fou de joie (…) Le soir même, derrière ce paravent qui est à présent ici, dans mon bureau (…) j’installe une petite table derrière le paravent pour être tranquille et une heure après je commence à écrire le scénario de mon premier film ! Moi qui mets quelques années entre mes longs métrages, deux ans, trois ans, quelquefois quatre (…) ! Le scénario est écrit non pas le soir même mais le lendemain, - la vie d’un lycéen, très simple, et on commence à tourner le film, dont je joue le rôle principal. Donc ça remplit tous mes espoirs : je joue, je dirige. Et toute l’année qui suit – l’année de terminale, qu’on appelait philo à l’époque », je tourne le film.

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Jean-Paul Rappeneau, jeune acteur (à droite) dans Les Fourberies de Scapin, au club théâtre du lycée d’Auxerre
Jean-Paul Rappeneau, jeune acteur (à droite) dans Les Fourberies de Scapin, au club théâtre du lycée d’Auxerre
- Archives privées Jean-Paul Rappeneau

Après quelques déboires scolaires, le jeune Rappeneau arrive à Paris – en principe pour faire du droit - son père exigeait en effet que son fils « fasse des études sérieuses ». Mais la passion est trop forte – A Paris, il tourne aussi un film de moyen métrage, La Maison sur la place,  rate – bien sûr ! – la première année de droit. Met un pied dans le cinéma comme stagiaire, puis second assistant de Raymond Bernard – « L’homme qui a fait Les Croix de Bois… et La Belle de Cadix, où je joue le rôle d’un coiffeur !».

C’est au service militaire que le cinéma le rattrape : son voisin de chambrée n’est autre qu’Alain Cavalier. C’est grâce à lui qu’il intègrera la bande « de tous ceux avec qui j’aurais dû être à l’Idhec »— qui, eux, sortaient de cette école de cinéma.

Nous sommes au début des années 60 à Paris, Rappeneau fréquente Louis Malle, Alain Cavalier, De Broca mais pas seulement :

Les bandes se forment - celle qui s’est fédérée autour des Cahiers du cinéma : Truffaut, Godard, Chabrol et Rohmer – et puis il y a les indépendants, dont je suis, Claude Sautet aussi ; il y a une bande qui se fédère plutôt autour de la revue Positif (…) et chaque semaine, à partir de 1960 sort un nouveau premier film.

Jean-Paul Rappeneau est d’abord assistant ou scénariste – avec Philippe de Broca sur L’Homme de Rio, avec Louis Malle sur Zazie dans le métro, puis se lance dans l’écriture de ce qui sera son premier long métrage, sur l’insistance de ses amis.

J’ai en tête d’écrire une histoire qui se passerait dans une maison non loin de la mer (…) Alain Cavalier, qui m’ a vraiment accompagné toute ma vie, a suggéré que ce qui se passerait dans cette maison aurait à voir avec la guerre (…) quand j’ai commencé à l’écrire, j’ai appelé Alain (Cavalier) et je lui dis — « c’est quand même curieux, tout ce que j’écris, toutes les scènes qui viennent me font rire, et je m’inquiète parce que ce n’est pas comme ça qu’on avait évoqué l’histoire ! — oui mais si c’est comme ça que ça vient, me répond-il, va dans ton sens , c’est le tien ! En fait j’ai inventé la comédie en la faisant, comme monsieur Jourdain fait de la prose sans le savoir.

Le lauréat Jean-Paul Rappeneau filmant la vedette de son film, Catherine Deneuve après la remise du prix Louis Delluc à Paris, France le 15 janvier 1966.
Le lauréat Jean-Paul Rappeneau filmant la vedette de son film, Catherine Deneuve après la remise du prix Louis Delluc à Paris, France le 15 janvier 1966.
© Getty - Keystone-France/Gamma-Rapho

Ce sera donc La Vie de Château, dans lequel l’histoire familiale affleure: un château comme celui du grand-père maternel, un amoureux comme l’oncle Jean-Claude, un résistant comme l’oncle Albert… et un enfant qui pourrait être celui que Jean-Paul Rappeneau était pendant la guerre. Le rythme Rappeneau, fait de mouvement et de vivacité, d’un tempo allegro, apparaît déjà, notamment à travers les personnages de Marie / Catherine Deneuve qui court, pédale, virevolte.

Physiquement, quand je tourne je me balance, non pas comme un métronome (…) parce que je pense qu’il doit y avoir quelque chose qui bat dans un film, dans une scène ; il y a a une basse continue, donc je n’aime pas trop que les comédiens traînent sur les répliques. 

Une série d'entretiens proposée par Odile Conseil, réalisée par Nathalie Salles. Prise de son : Georges Tho. Attachée de production : Daphné Abgrall. Coordination : Sandrine Treiner.

Pour aller plus loin

8 films

  • Belles familles, Jean-Paul Rappeneau / France / 2015 
  • Bon voyage, Jean-Paul Rappeneau / France / 2002 
  • Cyrano de Bergerac, Jean-Paul Rappeneau / France / 1989 
  • Le Hussard sur le toi, Jean-Paul Rappeneau / France / 1994 
  • Les Mariés de l'an II,  Jean-Paul Rappeneau / France-Italie-Roumanie / 1970 
  • Le Sauvage, Jean-Paul Rappeneau / France, Italie / 1975 
  • Tout feu, tout flamme, Jean-Paul Rappeneau / France / 1982 
  • La Vie de château,  Jean-Paul Rappeneau / France / 1966