Pierre Rabhi revient dans ce deuxième épisode sur les raisons qui ont motivé son départ d’Oran pour la France. À l’âge de 22 ans, en pleine guerre d’Algérie, il gagne d’abord Paris, puis opère son “retour à la terre” dans les Cévennes ardéchoises.
- Pierre Rabhi Agriculteur, pionnier de l’agroécologie, écrivain français d’origine algérienne
Pierre Rabhi quitte Oran à la fin des années 50 car “les conditions en Algérie n’étaient plus viables, je ne voyais plus d’avenir là-bas alors j’ai migré.” Il gagne Paris et travaille chez un constructeur de machines agricoles à Puteaux en tant que magasinier. C’est là qu’il rencontre sa femme Michèle. Ensemble, ils décident de quitter Paris, la violence de la vie urbaine et de la condition ouvrière : “une condition carcérale, dans laquelle on sert un système qui épuise et méprise les hommes.”
Un être humain ne naît pour servir un système, d'abord il naît pour vivre.
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En plein milieu des Trente Glorieuses, alors que les campagnes sont largement désertées, et que les petites exploitations agricoles disparaissent au profit des grandes, le couple fait le choix marginal d’un projet en agriculture biologique. Ils n’ont alors ni connaissance agricole, ni argent de côté, ni soutien de leur entourage.
J’étais allé voir le Crédit Agricole pour obtenir un prêt. La banque m’a demandé d’abord d’aller me former avant de me prêter de l’argent. Je suis allé apprendre les bases de l’agriculture dans une maison familiale rurale. Je suis devenu ouvrier agricole, en prestation chez les uns, chez les autres. J’ai découvert que l’agriculture était fondée sur les pesticides de synthèse, les engrais chimiques. Ça m’a désespéré. Je ne voulais pas empoisonner la terre qui nous nourrit.
Après trois ans de formation comme ouvrier agricole, Pierre et Michèle Rabhi achètent la ferme de Montchamp dans le Parc National des Cévennes et se lancent dans l’élevage de chèvre. Pour survivre avec cinq enfants à nourrir, sans eau, sans électricité, ils multiplient les emplois complémentaires.
Michèle donnait des cours de secrétariat. Je me suis transformé en maçon, j’ai fait de la fonderie, de la menuiserie dans des résidences secondaires, j’ai réparé des vieilles maisons. Nous étions dans la survie, nous nous demandions si nous allions tenir, si nos enfants approuveraient notre choix de vie, celui de l’isolement_. _
Il leur faudra plus de dix ans pour transformer cette terre de garrigue aride, obtenir l’eau et l’électricité, constituer un troupeau de chèvres et commencer à vendre les fromages.“Dix années pendant lesquelles, j’étais à la fois heureux et inquiet" confie Pierre Rabhi.
Une série produite par Pauline Chanu, réalisée par Christine Robert. Attachée de production : Daphné Abgrall. Prise de son : Eric Audra.
Bibliographie sélective
- L’enfant du désert, avec Claire Eggermont et Marc N’Guessan, éditions Plume de Carotte, 2017.
- J’aimerais tant me tromper, dialogues avec Denis Lafay et illustrations de Pascal Lemaitre, éditions de l’Aube, 2019.
- Vivre mieux sans croissance, avec Juliette Duquesne, collection Carnets d’Alerte, éditions Presses du Châtelet, 2019.
- Du Sahara aux Cévennes ou la Reconquête du songe, Pierre Rabhi , éditions Albin Michel, 2017.
- La planète au pillage, Fairfield Osborne, éditions Actes Sud (réed 2008).
- Manifeste pour la Terre et l'Humanisme : Pour une insurrection des consciences, Pierre Rabhi, éditions Actes Sud, 2011.
- Vers la sobriété heureuse, Arles, Actes Sud, 2010.
- Pierre Rabhi, semeur d'espoirs, entretiens, Olivier Le Naire, éditions Actes Sud, 2013.
- Graines de possibles, regards croisés sur l'écologie, Pierre Rabhi avec Nicolas Hulot, Calmann-Lévy, 2005.
Pour aller plus loin
- Fonds de dotation Pierre Rabhi
- Pierre Rabhi. Au nom de la terre, film réalisé par Marie-Dominique Dhelsing (2013)
- Demain, film réalisé par Cyril Dion ( 2015)
L'équipe
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