

Alors que prend place un nouveau confinement en France le 30 octobre, les artistes de la nuit redoublent d'inquiétude pour leur avenir, après avoir déjà été autant oubliés qu'affectés depuis le début de la crise sanitaire. Vincent Carry, directeur des Nuits Sonores, témoigne de leur situation.
- Vincent Carry Directeur du festival Les Nuits Sonores
Alors qu'un nouveau durcissement des restrictions sanitairesprend effet le 30 octobre avec un reconfinement national, l'avenir déjà mis en péril dès le début de la crise sanitaire de certains milieux artistiques est plus que jamais en question. Parmi eux, le monde de la nuit, dont les portes ont été pour la majeure partie fermées et ses artistes privés d'exercice depuis le printemps 2020. Affaire en cours reçoit Vincent Carry, directeur d'Arty Farty (Les Nuits sonores, Le Sucre, European) qui revient sur une tribune qu'il a publiée lundi 26 octobre dans Libération, dans laquelle il interpelle le gouvernement sur la situation tragique que vivent les acteurs de la nuit.
Dans sa tribune, Vincent Carry rappelle que le milieu de la nuit ne relève pas du ministère de la Culture mais du ministère de l’Intérieur, et « qu’il s’agit d’une erreur historique et d’une immense injustice ».
C'est évidemment une erreur. Cette réaction vient du fait que la ministre de la Culture elle-même a insisté à plusieurs reprises que les clubs et la vie nocturne n'étaient pas sous sa responsabilité, mais sous celle du ministère de l'Intérieur. Quand on regarde l'histoire culturelle que représente la scène de la musique électronique française et mondiale, qui a permis à la France d'avoir une galaxie d'artistes, comme Laurent Garnier, qui a lui-même écrit une lettre à Roselyne Bachelot. Les artistes, nouvelles générations comme pionniers, les festivals, tout un paysage culturel qui selon moi appartient de plein droit à l'espace culturel.
Vincent Carry
Le DJ, compositeur et producteur de musique électronique Laurent Garnier a publié quant à lui sur son site une lettre à l’attention de la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, où il témoigne du passage de « spectacle vivant » à « spectacle mort » au sujet de sa profession.
La nuit, espace démocratique culturel
L’institution, et même l’opinion publique, dénigrent-elles ou méconnaissent-elles le rayonnement international de la culture électronique ?
Reléguer la scène de la nuit aux marges de l'espace culturel, c'est une erreur d'analyse, mais c'est aussi une certaine forme d'agression vis à vis de l'ensemble des gens qui se sont investis dans cette scène culturelle depuis très longtemps pour la faire vivre. Au delà de son rôle artistique qui fait peu débat quant à sa place historique, ce qui est encore plus triste, c'est le manque de perception du rôle social et démocratique de l'espace de la nuit. C'est un des endroits prioritaires, pour la jeunesse en particulier, pour exprimer son envie de constitution citoyenne, son envie de débat, son envie de contradiction.
Vincent Carry
Fermer le monde de la nuit, est-ce exclure tout un pan de la jeunesse du débat public ? Aux yeux de Vincent Carry, il s'agit d'une jeunesse qui ne se retrouve pas dans les lieux consacrés du pouvoir ou les lieux traditionnels de débat public pour s'exprimer. Car l'espace de la nuit est aussi un espace démocratique.
Il est certain que les clubs, mais aussi l'espace de la nuit en général, les lieux de convivialité et de partage, les bistrots aussi bien que les festivals, tout cet espace-là est devenu un espace de démocratie.
Vincent Carry
A titre d'exemple, Vincent Carry cite la création au sein du festival Les Nuits sonores d'un espace de débat nommé Urban Lab, et des lieux comme Ground Control à Paris, espace culturel axé vers le débat public.
Dans ces endroits-là, on retrouve une jeunesse qui avait déserté le débat public, qui n'était plus engagée, qui souvent ne votait pas, qui est dans une relation de défiance avec tout ce qui représente le pouvoir. Il me semble qu'il est de l'intérêt général de la réconcilier avec le débat public et de la réengager dans un processus de contradiction positive. On sent à l'inverse une crainte, qui est selon moi une méconnaissance, d'un secteur très balisé. C'est hallucinant d'être obligé de faire cette tribune aujourd'hui. Ca paraît invraisemblable.
Vincent Carry
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