Des collégiens invitent les spectateurs de Montpellier à partager leur travail autour de Shakespeare pendant le Printemps des Comédiens. Florence March, professeure des universités en théâtre britannique des 16ème et 17ème siècles, explique ce projet qui lie théâtre et citoyenneté.
- Florence March Professeure des universités en théâtre britannique des 16ème et 17ème siècle, directrice de l'Institut de recherches sur la Renaissance, l'âge classique et les Lumières
Printemps des collégiens : Shakespeare et citoyenneté est une initiative qui propose, dans le cadre du Printemps des comédiens à Montpellier, à des élèves de collège une réflexion sur la citoyenneté par le biais du modèle de théâtre populaire de Shakespeare. Florence March, professeure des universités en théâtre britannique des 16ème et 17ème siècles et directrice de l' IRCL (Institut de recherches sur la Renaissance, l’âge classique et les Lumières) explique au micro de Marie Sorbier en quoi consiste ce projet.
Porté à la fois par le Printemps des comédiens et l'IRCL (qui est sous la double tutelle du CNRS et de l'Université Paul-Valéry), le projet "Printemps des collégiens : Shakespeare et citoyenneté" inclut six collèges de Montpellier qui viennent d'horizons divers, aussi bien des sections internationales que des établissements REP+, des collèges situés en centre ville et d'autres dans la cité gitane de Montpellier. Soutenu par le ministère de la Culture et le CNRS, ainsi que par le Conseil départemental de l'Hérault et la métropole de Montpellier, le projet rassemble des équipes pédagogiques pluridisciplinaires incluant des professeurs d'anglais, de français, d'histoire-géographie, d'éducation morale et civique et tente de faire se rencontrer des élèves de quartiers variés.
En quoi consiste ce projet ? Chaque classe de collégiens choisit une pièce de Shakespeare sur laquelle travailler avec des enseignants, des comédiens et des chercheurs. Ils produisent leur travail dans le festival "Le Printemps des collégiens", programmé au sein du festival Printemps des comédiens, afin de le partager avec le public. Le projet inclut également une "école du spectateur" : la plupart de ces collégiens n'étant jamais allés au théâtre, ils reçoivent un enseignement pratique et culturel en tant que spectateurs. Par ailleurs, ces élèves sont invités à découvrir le laboratoire de l'IRCL, ainsi que le Printemps des comédiens, où ils peuvent rencontrer les différentes équipes (artistique, direction, production, technique, médiation culturelle). Un moyen pour eux de connaître des métiers et secteurs d'activité dont ils ne sont généralement pas familiers. Enfin, les chercheurs de l'IRCL proposent aux enseignants et aux comédiens un stage de formation à la transmission théorique et pratique de Shakespeare.
"Shakespeare et citoyenneté" est une initiative née en 2016, l'année marquant le quadricentenaire de la mort de Shakespeare. C'est aussi une année qui fait suite à un grand débat national sur la citoyenneté, questionnée par la série d'attentats qu'a connus la France en 2015.
Nous avons voulu développer une approche de la citoyenneté auprès des jeunes qui soit différente et complémentaire de leur enseignement en éducation morale et civique. Une approche par la pratique artistique et culturelle.
Florence March
Le projet fonde sa définition de la citoyenneté sur celle de la Direction de l'information légale et administrative, reposant sur trois valeurs : la civilité, le civisme et la solidarité. Nous faisons le postulat qu'il n'y pas de société sans art ni culture, et que faire l'expérience de ces valeurs peut passer par le théâtre, qui est un art collectif et un art du dialogue. C'est une expérience de l'empathie, car jouer un rôle, c'est se rendre suffisamment étranger pour accueillir l'autre.
Florence March
En choisissant l'oeuvre de Shakespeare, le projet fait le choix d'un théâtre exigeant, étudié dans sa langue originale, qui s'est construit à la Renaissance en dehors de la cité de Londres. Pour Florence March, Shakespeare relève de ce que Pierre Bourdieu appelle le capital culturel. Transmettre son travail est en ce sens une manière de garantir aux élèves l'égalité des chances. Le théâtre de Shakespeare est aussi un théâtre de questionnement, où sont posés des problèmes, éclairés de multiples façons sans jamais imposer une unique réponse. C'est un théâtre appelant au débat démocratique, et aussi un théâtre populaire tel que défini par Roland Barthes : le théâtre qui fait confiance à l'homme.
Le théâtre de Shakespeare table sur le spectateur engagé, participant, qui coopère avec les comédiens par son imagination. Par exemple, dans le prologue d'Henri V, il est expliqué aux spectateurs ce qui est attendu d'eux et comment cette pièce de guerre difficile à jouer va pouvoir se construire avec et grâce aux spectateurs. Ce rapport de confiance qui mise sur la curiosité et l'imagination du spectateur font du théâtre de Shakespeare un théâtre inclusif, qui s'adresse à tous. C'est un excellent vecteur de citoyenneté.
Florence March
L'équipe
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