Les FRAC ont 40 ans!

Bernar Venet " Gigantisme" mai 2019, collection régionale d'art contemporain au Musée d'Art Moderne à Dunkerque
Bernar Venet " Gigantisme" mai 2019, collection régionale d'art contemporain au Musée d'Art Moderne à Dunkerque ©AFP - Crédits : DENIS CHARLET
Bernar Venet " Gigantisme" mai 2019, collection régionale d'art contemporain au Musée d'Art Moderne à Dunkerque ©AFP - Crédits : DENIS CHARLET
Bernar Venet " Gigantisme" mai 2019, collection régionale d'art contemporain au Musée d'Art Moderne à Dunkerque ©AFP - Crédits : DENIS CHARLET
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1981 - 2021, les FRAC ont 40 ans. Yves-Michel Bernard, chercheur associé à l’université de Bordeaux Montaigne est au micro de Marie Sorbier pour nous raconter l’histoire et les perspectives des collections d’art contemporain en France.

En 1981, Jack Lang et Claude Mollard ont voulu développer la décentralisation artistique et ont fait le choix de miser non sur des institutions muséales, mais sur des collections d’œuvres d’artistes contemporains encore peu connus : c’est la naissance des Frac, les fonds régionaux d’art contemporain.

Les Frac ont modifié le paysage artistique français dans la mesure où ils n’étaient pas constitués par des collections mais par des fonds. En France la notion de collection avait toujours été privilégiée, impliquant une réflexion sur le sens des acquisitions et sur leur orientation. L’idée de Claude Mollard, longtemps qualifiée "d’anti musée" était d’acheter des œuvres d’artistes vivants considérant que l’histoire ferait le tri. Cette idée a duré jusqu’à l’alternance politique de  1986.

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Selon Yves-Michel Bernard, les Frac sont comme un Janus à deux têtes : il y a d’une part les comités de sélection d’œuvres disposant du pouvoir de choisir, sans avoir le pouvoir d’achat. Et d’autre part, le conseil d’administration composé des élus régionaux, des représentants du Ministère de la Culture, lesquels n’ont pas le pouvoir de choisir mais ont les capacités financières. Cette séparation des pouvoirs installée très habilement par Claude Mollard,  a toutefois nécessité la mise en place de mécanismes de collaboration afin de parvenir à des compromis ; cela se traduit par des discussions au cours desquelles les responsables de la culture régionale, les conservateurs de musée étaient amenés à justifier leurs choix. Dès lors, les œuvres dans les Frac jusqu'en 1986 n’avaient rien à voir avec celles que l’on pouvait voir dans les musées à la même époque. Cet art pour autant n’est pas endémique ou régional, il est surtout issu des écoles régionales des Beaux-Arts, écoles qui ont permis l’émergence de la génération des diplômés des années 80. En effet, il y a eu un effacement d'une certaine peinture institutionnelle française au profit de mouvements qui avaient été souvent négligés par les musées parisiens, à savoir des mouvements historiques comme "Supports/Surfaces", qui ont eu une certaine notoriété pendant cette première décennie.  

Aujourd'hui, les Frac constituent de véritables collections.

 La figure du directeur est plus importante qu'elle ne l'était autrefois car ce dernier n’est plus un simple administrateur alors que  les comités de sélection se sont restreints. Dans les années 80, ces comités étaient souvent composés de 10 à 15 personnes qui discutaient pendant des heures. Aujourd’hui le comité se réduit à  trois à quatre membres qui voyagent beaucoup plus, et peuvent ainsi opérer des choix hors des limites  de la région. Les collections se sont donc internationalisées avec une préoccupation pédagogique plus affirmée. 

L'idée au départ avec Claude Mollard, c'était de les mettre dans des bus, de faire des muséobus, et dans les campagnes. Aujourd'hui, les Frac sont reconnus pour la qualité de leurs achats, ce qui n'était pas le cas dans les années 80. Et elles peuvent fournir des expositions de grande qualité. Et puis, surtout, on emprunte énormément d'œuvres pour des expositions collectives d'art contemporain.

Quand les Frac ont été créés, la droite ne donnait pas cher de la longévité de ces institutions. Et on a eu une grande surprise.  Claude Mollard avait dit à partir du moment où la région mettra un sou, on mettra un sous

En 1986, lorsque la droite est revenue au pouvoir, certains conservateurs parisiens se sont imaginés pouvoir liquider les Frac. Dès lors, il y eut un vent de révolte de la part des élus et une prise de conscience qu’il y avait un patrimoine régional à défendre. Les régions étaient alors toutes nouvelles, créées par la loi de décentralisation Defferre. Autant les départements possédaient des musées, avaient un patrimoine, autant les régions avaient tout à construire. Aujourd'hui, l’institution des Frac n’est plus vraiment remise en question et dans l’ensemble, le personnel politique régional ne doute plus de la  nécessité d'accompagner la création. Toutefois, l'extrême droite se montre toujours opposée au soutien apporté à la création dans le domaine de  de l’art contemporain. 

En savoir plus : A quoi sert un Frac ?
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Actualité : L'ouvrage "Origine et création des fonds régionaux d'art contemporain - les années militantes 1981/1986" de Yves-Michel Bernard est disponible aux éditions Ter'la.

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