

Si les victimes du massacre de Sabra et Chatila restent sans justice ni sépulture, les artistes se sont largement emparés de cet événement. Sandra Barrère, chercheuse à l'université de Bordeaux Montaigne nous raconte comment l'art compense le silence des institutions.
- Sandra Barrère Chercheuse Académie Bordeaux Montaigne
Pendant la guerre civile libanaise, un massacre se produit dans les camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila en septembre 1982 à l’ouest de Beyrouth. Et même si l’ONU a qualifié ce massacre d’"acte de génocide », il n’y a jamais eu d’enquête ni de réparation pour les victimes, ni de tombes pour les morts. Malgré ce silence, on constate un nombre important de productions culturelles ; roman, théâtre, poésie, cinéma, art contemporain… qui tentent de fixer dans une œuvre cet événement historique, comme une résistance au silence. Nous sommes allés demander à Sandra Barrère de nous en dire plus.
Le vide institutionnel
De son séjour prolongé au Liban, entre 2011 et 2014, la chercheuse Sandra Barrère rapporte quelques observations.
« On constate une absence d’historiographie autour de la guerre du Liban en général et plus spécifiquement autour de cet épisode qui se niche dans le cadre de cette guerre comme une espèce de tabou dans le tabou. » Sandra Barrère
Ce qu’elle caractérise comme un « vide institutionnel » entérine le silence autour du massacre de Sabra et Chatila.
« En dépit de la caractérisation onusienne du massacre comme « acte de génocide », il n’y a pas eu d’enquête internationale, pas de processus de réparation, pas même de possibilité de désigner une victime et un coupable. » Sandra Barrère
Les productions culturelles
En menant ses recherches, Sandra Barrère remarque une profusion de productions culturelles autour du massacre, comme si l’art entrait dans un processus de substitution du vide laissé par les institutions.
« Le vide institutionnel ne serait-il pas compensé par les médiations symboliques opérées par la littérature et l'art ? Ceci est le commencement de ma démarche de recherche. » Sandra Barrère
La fonction sépulcrale de l’œuvre
Dans Ecrire une histoire tue. Le massacre de Sabra et Chatila dans la littérature et l'art, Sandra Barrère interroge également la fonction de l’art face à l’histoire, et la possibilité qu’ont les œuvres de participer à un processus de réparation.
« Chacune des quatorze œuvres que j'étudie plus spécifiquement à l'intérieur de ce vaste corpus essaie d'apposer une pierre tombale à l'endroit où il n'y en a pas. » Sandra Barrère

- Sandra Barrère, Ecrire une histoire tue. Le massacre de Sabra et Chatila dans la littérature et l'art Paris, Classiques Garnier, coll. "Littérature, histoire, politique", 2022. Plus d'informations.
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