

A l’occasion de la diffusion de son unique documentaire L’Aimée (2006) sur la plateforme Henri de la Cinémathèque Française, le cinéaste Arnaud Desplechin revient au micro d’Arnaud Laporte sur sa vocation, ses méthodes de travail, et les réflexions qui nourrissent son œuvre.
- Arnaud Desplechin Cinéaste
En 2006 sortait L’Aimée, l’unique documentaire d’Arnaud Desplechin. A l’occasion de sa diffusion sur la plateforme Henri de la Cinémathèque Française, le cinéaste revient sur son parcours, ses sources d’inspiration et sa vision du cinéma.
Une vocation
Dès son plus jeune âge, Arnaud Desplechin décide qu’il deviendra cinéaste, "trucman", fabriquant de films. De 1981 à 1984, il étudie à l’Institut des Hautes Etudes Cinématographiques, consacrant surtout son attention à la dimension technique du cinéma. Après avoir participé au tournage ou à l’écriture de films d’autres réalisateurs comme Eric Rochant ou Nico Papatakis, il réalise son premier moyen métrage : La Vie des morts (1991). Très remarqué par la critique, il est également sélectionné à la Semaine de la critique à Cannes et remporte le Prix Jean Vigo du court.
Quand j’étais enfant, j’avais un seul rêve – je ne sais pas d‘où il vient – c’était de faire du cinéma. Et ça me semblait impossible. Donc j’ai vécu mon enfance dans le chagrin en me disant : je n’y arriverai jamais, c’est trop loin. On ne connaissait personne dans ma famille qui était dans le spectacle. Ça semblait une fantaisie. Je pensais beaucoup au cinéma, je lisais des livres. J’essayais de me préparer en me disant : peut être qu'un jour ça va m’arriver.
Je suis sorti de l’école en pensant : je ne suis pas encore rentré dans la question du cinéma. Je crois que le cinéma c’est une question, ce n’est pas une réponse et qu’il faut savoir l’habiter cette question. Je n’avais pas trouvé ma voix. (…) Je ne trouvais pas de singularité. Ce sont les livres qui m’ont aidé.
Une filmographie nourrie de son histoire
Arnaud Desplechin est originaire de Roubaix, un environnement auquel il est resté profondément attaché, et dans lequel il a tourné nombre de ses films, comme Roubaix une lumière (2019), cherchant à sublimer ce territoire déshérité. Il grandit entouré de sa famille qui tient, elle aussi, une place importance dans sa filmographie. Dans L’Aimée (2006) en effet, il retrace - entouré de son père, son frère et ses neveux - l’histoire de sa grand-mère. Par ailleurs, pendant ses études, il se plonge dans l’œuvre de Lacan : une rencontre intellectuelle qui le marque profondément, la psychanalyse ayant depuis toujours tenu une place importante dans sa vie et sa création, comme dans La Sentinelle (1992), son premier long métrage.
Sonder l'âme humaine
Ses films, écrits et construits avec beaucoup de soin, selon une structure bien déterminée, mettent souvent en scène les mêmes acteurs : Emmanuelle Devos, Hippolyte Girardot, Matthieu Amalric, dont il admire la capacité de nuance, de malice et d’autodérision. En effet, il cherche avant tout, à travers son œuvre et ses personnages, à montrer le travail de composition qu’effectue n’importe quel être humain pour ressembler à lui-même.
Au cinéma, il y a ces visages comme des paysages. Vous avez cette montée à l’écran de l’âme derrière un visage quand il est filmé comme un événement météorologique ou sismique (...). Je pense à Emmanuelle Devos dans Tromperie de Philip Roth où elle joue l'un des personnages, et la caméra s’approche, s’approche jusqu’à se noyer dans son visage. Ça c’est le cinéma.
En 2016 il remporte le César du meilleur réalisateur pour Trois Souvenirs de ma jeunesse (2015), considéré comme une préquelle au film Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) (1996).
Il a également mis en scène des pièces de théâtre à la Comédie Française : Père d’après August Strindberg (2015) et Angels in America d’après Tony Kushner (2020).
Les acteurs m’ont tant enseigné. Je pense avec émotion à Angels in America. (…) Ce n’est pas le même temps : le temps au cinéma est très ramassé, ça ressemble à un coup de foudre. Au théâtre, le temps des répétitions permet de créer l’amour et l’amitié. Ces deux pièces m’auront aidé. J’ai appris à ne plus avoir peur des acteurs. (…) Et avoir appris à dire un texte sur une scène de théâtre m’a appris curieusement un art inverse que je n’avais jamais exploré : l’art de l’improvisation.
Son actualité : son documentaire L’Aimée (2006) est diffusé jusqu’au 13 juillet sur la plateforme Henri de la Cinémathèque française.
Sons diffusés pendant l'émission
- Claude Lanzmann dans Apostrophes émission du 5 juillet 1987, archives de l’INA.
- Jean-Pierre Léaud, interrogé par Pierre Tchernia, Le Dernier des Cinq, ORTF, 10 juin 1973.
- Extrait de La Vie des morts, Arnaud Desplechin, 1991.
- J-S. Bach, Musical Offering BWV 1079, dirigé par Pierre Boulez à la Philharmonie de Berlin, 1995, Deutsche Grammophon GmbH.
- "Murder Most Foul", Bob Dylan, Rough and Rowdy Ways, 2020 (Columbia).
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