Chantal Thomas : "Il y a mille manières de vivre sa liberté"

La romancière Chantal Thomas en novembre 2002 à Paris, après avoir reçu le prix Femina pour son livre Les Adieux à la reine.
La romancière Chantal Thomas en novembre 2002 à Paris, après avoir reçu le prix Femina pour son livre Les Adieux à la reine. ©AFP - MARTIN BUREAU
La romancière Chantal Thomas en novembre 2002 à Paris, après avoir reçu le prix Femina pour son livre Les Adieux à la reine. ©AFP - MARTIN BUREAU
La romancière Chantal Thomas en novembre 2002 à Paris, après avoir reçu le prix Femina pour son livre Les Adieux à la reine. ©AFP - MARTIN BUREAU
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Intellectuelle touche-à-tout, auteure reconnue, Chantal Thomas est au micro d’Arnaud Laporte alors qu'elle publie un nouveau récit dans lequel elle continue son voyage autour des questions de l'intimité et du bonheur.

Avec

L’accélération de l’histoire, le bonheur, la souffrance ou encore l’enfance sont autant de thèmes sublimés par Chantal Thomas. À travers la pratique de la littérature et de l’histoire, en tutoyant constamment le registre philosophique, l'autrice sonde des sujets qui lui sont chers et qui nous interrogent tous.  Au micro d'Arnaud Laporte, elle nous entraîne dans ses imaginaires et son processus de création. 

Le XVIIIème et Roland Barthes

Officière des Arts et des lettres, de l’ordre national du mérite, directrice de recherche au CNRS, elle a commencé ainsi sa vie d’universitaire : avec une thèse sur Sade sous la direction de Roland Barthes. Le XVIIIème siècle ne l’a pas lâché. Chantal Thomas a publié sur Sade, mais aussi sur Casanova et sur l’esprit du XVIIIème. 

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Le XVIIIème siècle, je l'ai découvert à Bordeaux, en me promenant dans la ville et en lisant les livres de Sade que mon premier amant m'avait offert. A ce moment-là, il m'a paru être l'époque de la liberté, c'est à dire l'époque de la transgression de toutes les règles, du refus de la limitation. 

Comme romancière, elle a campé des fictions historiques à cette période, parmi lesquelles Les Adieux à la reine et L’Échange des princesses, toutes deux adaptées au cinéma. Dans ces deux romans comme dans d’autres, la féminité joue un rôle central.  Chantal Thomas nous explique comment les romans lui permettent de mieux transmettre ses savoirs d'historienne :

Le roman historique permet de jouer avec les fantômes. Ce que j'aime vraiment, c'est le point où l'érudition, qui est vraiment un plaisir pour venir au texte et à la saveur du savoir, ouvre sur des capacités qui vont du côté de l'hallucination.  

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Sa relation avec Barthes est restée spéciale tout du long et en 2015, elle publie un essaie au titre sobre et clair : Pour Roland Barthes. Elle y explique tout ce qu’elle doit à cet enseignant. 

J'avais besoin d'un destinataire. Roland Barthes a été le destinataire idéal parce qu'il était à mes yeux un vrai écrivain et pas seulement un professeur. Il était en même temps assez distant, donc ce n'était pas comme donner une lettre à un ami. Lui-même était à la fois un grand écrivain et un grand lecteur. Il savait que ce qui nous fait écrire, ce sont évidemment les données brutes et existentielles, mais aussi les livres. 

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Écrire sur l'intime 

Certains lecteurs la connaissent aussi pour ses travaux inclassables, à mi-chemin entre le question biographique, l’introspection philosophique et le récit : Comment supporter sa liberté, Souffrir, ou encore le plus récent Souvenirs de la marée basse, dans lequel elle se souvient comment sa mère, dépressive sur le sol sec, exultait dans la pratique du crawl. 

Mon désir depuis toujours est de fixer pour un temps limité, un peu comme une note de musique, quelque chose qui est voué à s'effacer.  

C’est dans cette lignée que s’inscrit son nouvel ouvrage, De sable et de neige qui paraît au début de ce mois de janvier au Mercure de France. Elle y étudie la manière de profiter de l’instant et de la beauté des choses qui nous entourent.

C'est un livre qui s'ouvre sur un retour au Cap-Ferret et dès le départ, Arcachon est vu de l'autre côté.  [...] C'est très important parce que ça réunit le côté Arcachon, le côté du bassin, le côté calme, le côté lisse et l'ouverture sur l'océan, le déchaînements, la violence et l'immaitrisable. Je pense que ces deux éléments structurent le livre, de même que le passé et un regard au présent sont étroitement tissés tout le long du livre.  

J'ai aimé que ce livre, soit fait de substances volatiles. C'est ce en quoi je me reconnais le plus, c'est à dire le contraire de ce qui se fige, de ce qui se fait noyau. 

Son actualité: De sable et de neige, Editions Mercure de France

Présentation:  "De sable et de neige, ou l’art de vivre l’instant. Une splendide fresque pour célébrer la beauté des choses et la puissance de leur silence, de la Grande Dune d’Arcachon et la lumière du Cap Ferret jusqu’à la ville de Kyoto sous la neige, un 31 décembre. Les vagues venant rythmer le récit, comme si l’océan était le résumé de la vie, avec sa dimension tragique, inséparable du sentiment de joie et d’harmonie qu’il sait donner.
Chantal Thomas poursuit ici son voyage dans l’intimité de la mémoire, à travers une langue d’élégance et de grâce, pour exprimer les sensations les plus fugitives et les plus essentielles dont nous sommes tissés. Et pour dire le lien d’amour entre une fille et son père : sa force d’absolu." Ed. Mercure de France

Sons diffusés pendant l'émission : 

  • Leonard Cohen “Chelsea Hotel No2”, sur l'album I'm your man (1974)
  • Un enregistrement de sons de bords de mer avec le bruit des vagues, des oiseaux et d'une pinasse. 
  • Quelques uns des 108 coup de la cloche du Temple de Chion-in, à Kyoto, la nuit du 31 décembre 2019.