Claire Chesnier : "La peinture m'apprend des choses"

Claire Chesnier
Claire Chesnier - Yge Gou
Claire Chesnier - Yge Gou
Claire Chesnier - Yge Gou
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Dans l’art de Claire Chesnier, la peinture est une vocation autant qu’une matière, un sujet et une pure présence. Au micro d’Arnaud Laporte à l’occasion de son exposition "Par espacements et par apparitions" à L’ahah #Griset à Paris, elle nous dévoile ses imaginaires et son processus créatif.

Avec
  • Claire Chesnier Artiste peintre

Certains et certaines y voient des aurores boréales, d’autres de la pure matière vivante, tous et toutes sont envoûté.e.s par le vibrato des couleurs qui irradient les œuvres de Claire Chesnier. Peintre passée par l’école des Beaux-Arts de Paris avant d’être distinguée du Prix agnès b. et de s’exposer dans les galeries de la styliste et collectionneuse, Claire Chesnier creuse inlassablement le sillon de la peinture abstraite depuis près de dix ans. Par espacements et par apparitions est le titre de sa dernière exposition visible jusqu’au 18 décembre à L’ahah #Griset à Paris, une association dont l’artiste est membre depuis janvier 2020. 

La peinture comme expression d'un rapport au monde

Native de Clermont-Ferrand, Claire Chesnier fait ses classes à Paris sur les bancs de l’École des Beaux-Arts de Paris dans l’atelier du peintre Jean-Michel Alberola. À une époque où la figuration faisait son grand retour sur la scène de l’art contemporain, la jeune artiste prend toutefois le parti de l’abstraction, mise sur la voie par les encres de Rodin qui captivent son attention. 

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Je faisais des corps figurés et je parlais toujours du corps de peinture. Donc à un moment donné, ça s'est imposé à moi le fait de vouloir rentrer dans le corps de la peinture, c'est à dire rentrer dans les sensations, le toucher. Quelque chose de plus immersif, qui soit dans le débord de l'image.

J'ai la sensation d'avoir accepté le débord.

Ses études à peine achevées, Claire Chesnier est distinguée du Prix agnès b. des Amis des Beaux-Arts de Paris et est la lauréate du Prix Talents Contemporains de la Fondation François Schneider (Fondation de France). Une belle entrée en matière qui met en lumière son travail singulier et en fait une artiste à suivre. son œuvre a fait l'objet de nombreuses expositions notamment à la Galerie Jocelyn Wolff Paris, à la Maison des Arts de Pékin, mais aussi au FRAC Auvergne, au MAC/VAL, et dernièrement à la Galerie ETC à Paris. 

La peinture est quand même une direction, une adresse vers autrui. Donc, si on n'a pas de retour au sortir de l'école et qu'on arrive dans ce vide, qui est à la fois une foule, on se sent un peu perdu. La présence d'Agnès Troublé a été très marquante pour moi. Faire partie de cette collection est un honneur.

Affaires culturelles
55 min

Une alchimiste de la couleur 

Les peintures de Claire Chesnier, faites de la sédimentation de glacis d’encres et d’eau jusqu’à saturation, procèdent d’une patiente élaboration. Depuis presque dix ans, l’artiste se tient à un même protocole de création :  elle gorge d’eau un papier aquarelle grand format puis y dépose l’encre abondante et procède au "revoilement", c’est-à-dire qu’elle guide les variations de l’encre à l’aide de brosses. Diluée, la couleur se densifie voile après voile. Tout le travail de l’artiste réside dans sa manière d’élaborer les tonalités, leurs dégradés, et de moduler leur irradiation et leur vibrato. 

Je prends la surface dans son entier à chaque fois. Je travaille à la manière de glacis, mais à l'encre, donc chaque pan de transparence qui se pose rejoue la peinture dans son entier.

Dans la droite lignée du Mouvement Support/Surfaces, notamment de Marc Devade, mais aussi des abstraits américains, particulièrement Ellsworth Kelly et Agnès Martin, Claire Chesnier sanctuarise la surface de l'œuvre et laisse place au geste de la couleur.

Je suis très touchée par cette approche de mettre en retrait son propre geste pour que le geste de la couleur arrive. Ce retrait-là est une sorte de marque de confiance, d'abandon, pour que quelque chose se crée dans un dialogue. Se retirer, ce n'est pas ne pas participer, c'est être à l'écoute, être actif mais de manière très silencieuse. 

À la question "quoi peindre", son travail semble rétorquer que le sujet importe peu, seule compte la matérialité picturale. Vivante, soumise au temps et à la gravité, la peinture crée ses propres évènements picturaux. 

J'ai une prédilection pour les matériaux qui m'échappent.

Éminemment poétiques, ses œuvres sont en définitive l'expression sensuelle de son rapport au monde. 

Quand je vois une peinture, je sens l'approche que peut avoir l'artiste par rapport aux autres, au monde, à ce qu'il ressent.

Son actualité : 

  • Son exposition personnelle Par espacements et par apparitions est visible jusqu’au 18 décembre à L’ahah #Griset.

Sons diffusés pendant l'émission : 

  • Agnès B au micro d'Arnaud Laporte dans Affaires Culturelles le 30 juin 2021. 
  • Marc Devade au micro de Gérard Julien Salvy dans « La peinture et après ? », sur France Culture en mai 1976.
  • “Une foule” de Gaspar Claus sur l'album “Tancade” (2021) | Label : Infinite.
  • Jean-Michel Alberola au micro d'Arnaud Laporte dans Affaires Culturelles le 29 juin 2021.
  • Philippe Jaccottet lit un extrait de son oeuvre « Et, néanmoins » dans l’émission Poésie sur parole sur France Culture, première diffusion le 04/06/2001. 

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