Ecrivaine, scénariste et réalisatrice franco-ivoirienne, Marguerite Abouet est au micro d’Arnaud Laporte. Le temps d’un entretien au long cours, elle nous raconte son enfance à Abidjan, son combat en faveur de l’accès à la lecture, et nous entraîne dans son laboratoire d’écriture.
- Marguerite Abouet Ecrivaine, scénariste de bande dessinée, réalisatrice
L'écrivaine, scénariste et réalisatrice Marguerite Abouet est entrée avec fracas dans le monde de la littérature et de la bande dessinée avec Aya de Yopougon, une série d'albums que l'on peut (re)découvrir grâce à la réédition récente en folio des volumes 5 et 6 de la saga.
Moins d’un an après avoir livré Enfermés dedans, le dixième tome de la série Akissi, l'écrivaine nous offre aujourd’hui une suite au Commissaire Kouamé avec la parution d’un deuxième tome titré Un homme tombe avec son ombre. De quoi nous replonger dans les enquêtes loufoques et burlesques du commissaire, à travers desquelles se tricotent toujours en filigrane des problématiques actuelles en Côte d’Ivoire telles que la prostitution, l’homosexualité, ainsi que la fracture entre la jeunesse et le pouvoir. Immersion, en la présence de l'artiste, dans la fabrique d’une œuvre à l’imaginaire rare et l’engagement toujours intact.
La Côte d’Ivoire comme pays d’enfance et territoire d'imaginaire
Comme Aya, l’héroïne qui l'a fait connaître, Marguerite Abouet a grandi dans le quartier du Yopougon à Abidjan en Côte d’Ivoire. Une enfance rythmée par des courses endiablées dans les rues du quartier et les histoires captivantes de ses grands-parents. Forcée de quitter ce décor pour la France aux portes de l’adolescence, Marguerite Abouet ne cessera toutefois d’y revenir par l’écriture pour ressusciter ses souvenirs.
"J’ai eu de la chance d’avoir un grand-père qui nous racontait des histoires pendant les vacances. Notre télévision, c’était notre grand père. J’étais la plus turbulente, alors il me faisait écouter le bruit des feuilles, la rivière. Avant, je trouvais qu’il radotait beaucoup, aujourd’hui ça m’aide à raconter des histoires. Je n'ai pas baigné dans les livres, mais dans ses histoires."
Au tournant des années 2000, après des années de lutte pour obtenir une situation en France, l’écrivaine parvient à vivre de sa plume grâce au succès que rencontre Aya de Yopougon, une série de bandes dessinées récompensées en 2006 au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême.
"J’avais 17 ans, dans ma première chambre de bonne dans un immeuble parisien. La famille dont je gardais les triplets m’avait donné une petite télévision, mais un soir, elle explose ! Donc après les cours et les triplets, j’ai commencé à écrire. Ce n’est pas une passion l’écriture, ce n’est pas ce que j’aime faire, c’est une thérapie. J’ai commencé à écrire pour ne pas devenir folle. Il fallait que j’écrive pour ne pas oublier d’où je venais, j’ai commencé à raconter mes histoires d’enfances."
Les talents de conteuse de Marguerite Abouet se confirment ensuite avec Akissi, une série d’albums avec Mathieu Sapin aux dessins qui raconte à hauteur d’enfant les souvenirs et les bêtises d’enfance de l'autrice. Loin du misérabilisme avec lequel le continent est fréquemment dépeint, elle prend le parti dans ces deux sagas de montrer un visage plus heureux de son pays, tout en abordant des sujets sensibles tels que le mariage forcé ou les pères absents.
La littérature sans frontières
Chez Marguerite Abouet, la littérature est affaire d’exploration. L’écrivaine s’est en effet aventurée aussi bien du côté de la bande dessinée que du côté du livre de cuisine avec Délices d'Afrique, ou encore du côté du livre de coloriage animé avec Essi dans la forêt des monstres, mais aussi du polar avec Commissaire Kouamé. Elle a également porté avec Clément Oubrerie les aventures d'Aya de Yopougon sur grand écran en 2013, celles d’Akissi sur le petit écran, et s’est illustrée entre 2015 et 2019 en tant que scénariste de la série télévisée sénégalaise C’est la vie !.
"Je suis la porte-parole de ceux qu’on ne voit pas et qu'on n'entend pas. Mes personnages me servent de faire valoir pour qu’ils parlent à ma place de tout ce qui me touche, me mets en colère, me fait sourire, s’ils peuvent briser quelques clichés, tant mieux."
Engagée dans la lutte contre l’illettrisme, Marguerite Abouet a fondé l’association "Des livres pour tous" en 2008 grâce à laquelle elle est parvenue à créer trois bibliothèques jeunesse de quartier en Afrique, plus précisément à Abidjan et à Dakar.
Ses actualités :
- BD : "Un homme tombe avec son ombre", deuxième volume de "Commissaire Kouamé" de Marguerite Abouet et Donatien Mary, paru le 13/10/2021 chez
Gallimard. Résumé de l'éditeur :
"Abidjan. La fille d'un grand patron de l'industrie française disparaît en plein jour. Le commissaire Kouamé est mis sur le coup, avec un ultimatum: s'il ne parvient pas à la retrouver au plus vite, la police hexagonale prendra la relève. L'adolescente est albinos... Y aurait-il un lien avec de sordides affaires de sorcellerie? Une enquête trépidante dans une Afrique authentique et excentrique, un polar déjanté relevé par la verve ivoirienne de Marguerite Abouet". - BD: "Enfermés dedans", dixième tome de "Akissi" de Marguerite Abouet et Mathieu Sapin paru le 04/11/2020 chez Gallimard.
- Réédition BD : Les volumes 5 et 6 de "Aya de Yopougon" de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie ont paru en Folio le 11/11/2021.
Sons diffusés pendant l'émission
- Générique de la série “Dallas”, Les Texans, 1981
- Bande Annonce du film "Aya de Yopougon", 2013
- Extrait du premier épisode de la série "C’est la vie !" scénarisée par Marguerite Abouet
- “SITYA LOSS”, Eddy Kenzo, 2014
- Entretien de Philippe Lacôte. Affaire à suivre du 7 septembre 2021
L'équipe
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