

À l’occasion de la sortie de son court-métrage "Quizas" mais aussi de sa mini-série "Thanksgiving" et de son ouvrage "Question de cinéma" toujours disponible en librairie, retour, au micro d’Arnaud Laporte, sur l’œuvre et l’imaginaire cinéphilique de Nicolas Saada.
- Nicolas Saada Réalisateur, scénariste, programmateur musical et directeur de la photo
Nicolas Saada, tantôt critique aux Cahiers du Cinéma et producteur à RadioNova, tantôt scénariste mais surtout réalisateur, est un intarissable cinéphile avant toute chose. Récemment, il est passé du côté des séries avec Thanksgiving, une œuvre née de l’envie du producteur Claude Chelli qui lui a proposé de retravailler les thématiques de la cybersécurité, cybercriminalité et de la duplicité dans le couple déjà présentes dans Espion(s). La série se présente comme un thriller d’espionnage en trois épisodes dont les personnages principaux sont mari et femme. Cet automne, il signe également Quizas, un court métrage pensé comme un tour du monde du cinéma depuis la fenêtre grâce à un montage de scènes de films célèbres et de ses propres vidéos. Autant d’œuvres à explorer le temps d’un entretien, au micro d’Arnaud Laporte, durant lequel Nicolas Saada revient sur son parcours, son processus de création et ses imaginaires.
Des Cahiers à son premier ouvrage
Cinéphile dès son adolescence, Nicolas Saada découvre le monde grâce au cinéma en même temps que le cinéma le révèle au monde. A la fin des années 1990 en effet, il intègre les rangs des Cahiers du Cinéma aux côtés de Serge Tubiana. Biberonné aux films d’Hitchcock et de Bergman, il est aujourd’hui considéré comme un éminent spécialiste en matière de cinéma américain mais aussi asiatique.
Il y a eu l'écriture sur le cinéma, qui était moins une volonté de faire une carrière de critique que d'essayer de comprendre ce que j'aimais et pourquoi j'aimais les films que j'aimais, pourquoi ils fonctionnaient sur moi.
Hitchcock, d'une certaine manière, m'a fait comprendre et m'a ouvert les yeux sur l'art de la mise en scène. Je pense que l'art suprême pour un cinéaste, c'est de s'exprimer par la mise en scène plus que par autre chose. Hitchcock, c'est un cinéaste sur lequel je reviens toujours parce que c'est quelqu'un qui me redonne le courage à chaque fois que je le perds. Quand je suis perdu, quand je n'ai plus le courage de rien, il me suffit de voir Hitchcock que j'admire le plus et je reprends goût à cette envie de faire.
De ses années aux Cahiers, Nicolas Saada tire son ouvrage Questions de cinéma : entretiens et conversations (1989-2001) publié en 2019. Comme le titre l’indique, cet ouvrage rassemble vingt-deux interviews qu’il avait mené auprès des virtuoses des différentes professions du septième art telles que la musique, le scénario, la réalisation, mais aussi le montage. Du côté de la réalisation notamment, on se délecte des précieuses paroles de Martin Scorsese, Francis Ford Coppola, James Cameron, David Lynch, les frères Coen, Wong Karwai, Chabrol et d’autres. Avant cela toutefois, pour se mettre dans le bain, on s’immerge d’abord dans l’incroyable rencontre en 1999 entre John Carpenter et Dario Argento qui ouvre le livre.
Saada fait son cinéma
En parallèle de son activité de critique, Nicolas Saada rejoint en 1992 l’unité Fictions d’Arte comme chargé des programmes aux côtés du célèbre producteur Pierre Chevalier. Il intervient dès lors en amont des films, de l’écriture au montage. Il lit les scénarios, soutient des productions (souvent avec des budgets serrés), visionne des rushs, mais travaille aussi avec des réalisateurs et réalisatrices comme Cédric Kahn, Claire Denis ou Jacques Fansten.
Petit à petit, il y a une autre expérience qu'a été la radio ou là ça a été une bascule vers quelque chose qui était en fait plus créatif. J'ai fait des bandes sons de films imaginaires à Radio Nova et ensuite, il y a eu le travail avec Pierre Chevalier, qui a été un travail beaucoup plus concret parce que ça m'a permis de comprendre comment on fabrique des films, comment on les finance et surtout, comment un producteur réalisateur travaille.
Jusqu’en 2007, Nicolas Saada est également producteur au sein de Radio Nova où il anime « Nova fait son cinéma » consacrée la musique de films intitulée. Une véritable antichambre de la mise en scène car l’homme de cinéma réalise ses émissions comme des petits films sonores.
Enfin cinéaste
Le besoin d’images se faisant pressant, Nicolas Saada se met progressivement à écrire non plus sur mais pour le cinéma. Il coécrit son premier scénario en 1999 pour Le Détour de Pierre Salvadori, un téléfilm adapté au cinéma sous le titre de Les Marchands de sable. Suivront cinq autres collaborations avec Saada aux scénarios, notamment pour Arnaud Desplechin et Jérôme Comuau.
Un scénario, c'est comme un bleu en architecture, c'est une projection mais ce n'est pas une œuvre. Il faut se méfier de ce que les gens appellent "un très beau scénario" parce qu'un ce n'est pas forcément un film et ce n'est pas une œuvre finie. Au mieux c'est une promesse et au pire, c'est quelque chose qu'il faut dépouiller et décrypter pour en faire un film.
C’est en 2004 que Nicolas Saada accomplit sa mue en cinéaste lorsqu’il signe son premier court-métrage Les Parallèles avec au casting Géraldine Pailhas et Mathieu Almaric. Son passage à la réalisation rencontre un grand succès et l’emmène jusqu’à Cannes. On retrouve l'actrice en 2009 face à Guillaume Canet dans son premier long-métrage Espion(s). Au carrefour du récit d’espionnage et de l’histoire d’amour, le film met en scène, sous tension, un jeune homme qui se retrouve contraint d’infiltrer un réseau terroriste et de lutter contre l’amour que lui inspire une de ses cibles. Un scénario qui rappelle les histoires d'espionnages mais aussi d'amours tourmentés des films d'Alfred Hitchcock qui passionnent tant Saada.
Ce qui est agréable avec le cinéma de genre, c'est que les codes qu'il nous impose sont là pour être bousculés. Et pour moi, la question du genre n'est pas intéressante. C'est la question du style qui m’intéresse.
Je cherche le point commun entre des choses que j'aime et comment les relier à l'intérieur d'une forme qui serait celle que j'essaie de créer depuis mon premier court métrage.
Après les deux courts métrages La Quarantième Marche (2011) et Aujourd’hui (2012), le réalisateur revient au long et se réempare de la problématique du terrorisme dans Taj Mahal en 2015 qui met en scène l’histoire d’une jeune fille coincée dans un hôtel de Bombay en pleine attaque terroriste.
Le mixage c'est un moment absolument sublime de la fabrication d'un film
Ses actualités :
- "Thanksgiving", la mini-série réalisée par Nicolas Saada avec Grégoire Colin, Evelyne Brochu, Hippolyte Girardot, est disponible sur Arte.tv.
- Son livre « Question de cinéma » aux éditions Carlotta est disponible en librairie.
- Son court métrage « Quizas » réalisé pendant le confinement est disponible sur le compte Vimeo de la Cinémathèque.
Sons diffusés pendant l'émission:
- Pierre Chevalier avec Mathilde Wagman sur France Culture en 2017
- Montage dans lequel on peut entendre Boulez évoquer le Sacre du Printemps, de Stravinsky, puis un mix des musiques préférées de Nicolas Saada.
- François Truffaut, au micro de Claude-Jean Philippe, sur France Culture en 1976.
- Trailer de la mini-série Thanksgiving de Nicolas Saada.
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