Nina Childress : "Je n'ai jamais douté de ma nécessité de peindre"

Nina Childress
Nina Childress - Pierre Mouton, courtesy Fondation Pernod Ricard
Nina Childress - Pierre Mouton, courtesy Fondation Pernod Ricard
Nina Childress - Pierre Mouton, courtesy Fondation Pernod Ricard
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L’artiste Nina Childress est au micro d'Arnaud Laporte. Influences, processus de création et imaginaires : Nina Childress nous emmène dans les coulisses d’une peinture inclassable.

Avec

Depuis les années 1980, la peintre Nina Childress produit une œuvre à la fois subversive, hallucinée et nostalgique où la culture populaire s'entrechoque avec les canons de la peinture classique. Rencontre avec une artiste inclassable. 

Du post-punk à la peinture 

Scotchée devant les œuvres du peintre Hockney à seulement douze ans, Nina Childress sait dès ce moment quelle est sa vocation. Sa réalisation connaît toutefois des détours. A l’aube des années 1980, devenue la voix et l’égérie du groupe post-punk Lucrate Milk dès les années 1980, elle plante les Arts Déco, met de côté ses pinceaux, pour briller sur la scène underground sous le nom de Nina Kuss. A la dissolution du groupe, l’artiste s’engage dans une autre aventure collective en intégrant le groupe d’artistes des Frères Ripoulin tourné vers la figuration libre où gravitèrent notamment Pierre Huyghe et Claude Closky. 

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En peinture, le piège c’est de trouver un truc et de s'y limiter parce qu'on vous demande de faire ça et parce que c'est facile. Au tout début de mon travail, je voulais justement trouver ce truc-là qui allait marcher et faire que je serais légitime. Donc je creusais, j'essayais des choses. Et puis un jour, je me suis dit que ça suffisait, qu'il fallait juste peindre. Cette liberté-là, je l'ai acquise après avoir essayé plein de choses.

Le Billet culturel
3 min

Elle est depuis une peintre prolifique, exposée de multiples fois dans des institutions prestigieuses comme en témoigne Lobody Noves Me à la Fondation Pernod Ricard l’année dernière qui marqua la première rétrospective parisienne d'envergure de la peintre. En parallèle de sa pratique, Childress a enseigné à l’École nationale supérieure d’art de Nancy avant d’être nommée professeure de peinture à celle de Paris en octobre 2019. 

Une esthétique versatile

Nina Childress est une artiste qui embrasse ensuite toutes les possibilités de son médium sans les épuiser pour autant et fait cohabiter tous les styles, du pop art à l’hyperréalisme en passant par l’abstraction. Une écriture picturale versatile qui trouve son point d’orgue dans son système d’alternance entre le « good » et le « bad », c’est-à-dire une version bonne et une version mauvaise de la même toile. Sorte de série B picturale, la deuxième version propose une vision irrévérencieuse de son sujet dont l’humour – qu’elle doit notamment à son expérience en tant que caricaturiste à Libération – rappelle parfois les œuvres de Picabia. Elle nous en dis plus sur cette version "bad" de sa peinture ...

C'est aussi une sorte de relâchement parce que je suis quelqu'un d'un peu perfectionniste. Je fais des tableaux assez léchés, mais le "bad" me permet de temps en temps de travailler encore plus vite et plus salement. Faire un tableau rapidement qui tienne est bien plus difficile que de prendre son temps et de réfléchir. J'aime beaucoup les tableaux où l'on sent qu'il y a eu cette énergie. 

Par certains aspects, son esthétique travaille la notion de cliché. D’une part, ses peintures s’appuient de photographies qu’elle collecte dans les magazines et sur internet. D’autre part, l'artiste s’empare d’images iconiques tant du côté de l’histoire de l’art avec L’Enterrement  (une relecture hallucinée de l'œuvre iconique de Gustave Courbet) que du côté des vedettes telles que Vartan mais aussi Beauvoir, ou encore la James Bond Girl Britt Ekland. De ces reprises se dessine en filigrane une véritable interrogation sur le rapport que nous entretenons avec la notion de féminité, qu’elle décline dans des galeries de portraits, toujours reconnaissables pour leur palette criarde et leur peinture fluo.  

Je pense que pour moi, ce sont des sortes de surfaces de projection et j'essaie de raconter des choses à travers.  

La peinture maintenant est devenu un cliché en soi. Comme j'ai dû me construire pendant les dures années de la mort de la peinture, il fallait bien que je trouve une façon de l'accepter avec ses clichés.

Ses actualités :
Exposition _Nina Childress – Phosphorescente_à la Galerie Bernard Jordan. L'exposition ouvrira dès la fin du confinement.
Ouvrage Color me, Semiose éditions, diffusion Les Belles Lettres.  
Drap de bain « Britt Bikini » de Nina Childress co-édité par Profane x WE DO NOT WORK ALONE x Galerie Bernard Jordan, édition limitée. 

Sons diffusés pendant l'émission : 

  • Archive de David Hockney au micro de Laure Adler en 2011, dans l'émission Hors Champs sur France Culture. 
  • Archive de Sylvie Vartan sur France Inter le 17 septembre 1970. 
  • Wild World de Cat Stevens, version album. 
  • Rocket Man de Elton John, version live en 1972 lors d'un concert au Royal Festival Hall, Londres. 

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