

Patrick Bouchain, constructeur et bâtisseur passé maître dans la réhabilitation de friches industrielles, revient au micro d'Arnaud Laporte sur son parcours personnel et sa conception de l'architecture.
- Patrick Bouchain architecte
L'architecte Patrick Bouchain est au micro d'Arnaud Laporte pour un entretien au long cours, le temps de revenir sur une carrière monumentale, construite sur un artisanat engagé au service de grandes commandes publiques et une conception démocratique de l'architecture, résolument tournée vers les usagers de l'espace.
Directeur technique d’Iggy Pop et des Rolling Stones dans les années 1970, professeur de dessin à l’école Camondo, assistant d’artistes comme Daniel Buren et Antoine Vitez, conseiller du ministre de la Culture Jack Lang, coordinateur d’événements culturels phares comme le réveillon de l'an 2000, et puis plus tard patron de l’agence d'architecture Construire... Patrick Bouchain a revêtu de nombreuses casquettes avant de s’avouer officiellement architecte, lui qui n'a jamais voulu adhéré à l’Ordre des architectes. Il deviendra le bâtisseur de “lieux décalés”, espaces culturels hors du commun et ambitieux conçus dans des matériaux pauvres et authentiques, comme le bois (notamment le pin).
(Dé)constructions et figures modèles
Après une éducation chez les jésuites de Sainte-Croix de Neuilly et un passage aux Beaux-Arts, Patrick Bouchain part en 1967 en Côte d'Ivoire, où il est nommé pour un poste au Centre culturel d'Abidjan. Sur place, les préjugés inculqués par une éducation française des plus traditionnelles se confrontent à une réalité dont la richesse sera fondatrice pour la lecture politique que le futur architecte fait du monde, ainsi que ses orientations professionnelles.
En Afrique, j'ai vu un continent puissant, magnifique. Ce n'était pas ce que j'avais appris à l'école. Non seulement ça a mis en cause la façon dont on m'avait appris l'Histoire, j'ai aussi découvert ce que c'était de vivre, avant d'éventuellement s'enrichir. J'ai découvert une architecture modeste, avec laquelle on vit, on reconstruit et on répare. Une architecture contextuelle, faite de matériaux locaux, et très diverse. Quand je suis revenu en France, j'ai décidé de ne jamais construire et de ne faire qu'un travail modeste sur l'habitation et l'accompagnement de ceux qui voulaient construire sans savoir comment s'y prendre. C'est comme ça que j'ai rencontré le monde artistique, où beaucoup d'artistes utilisaient des friches ou des squats. J'ai été le maillon qui leur permettait de rester dans ces lieux.
Patrick Bouchain
Guidé par les conseils de l'artiste Henri Malvaux à qui il dit devoir "presque l'essentiel de sa vie", Patrick Bouchain devient professeur de dessin à l'école Camondo à l'âge de 22 ans. Avec son cours intitulé "Espace et culture", il découvre le fond théorique de sa pratique. Le faire, le passage à l'acte, est un acte de réunion, où les uns et les autres apprennent des gestes de chacun, à la fois par mimétisme et par expérimentation. Jeune enseignant dénué de formation et de doctrine officielles, Patrick Bouchain transmet à ses élèves comme à ses propres projets un principe structurant : le travail manuel et le travail intellectuel peuvent être rapprochés au moyen d'une architecture simple.
Dessiner à la main, c'est se rapprocher de la main qui construit. C'est pour ça que je suis très méfiant de l'informatique, certes utile pour reproduire, mais qui assure une très grande séparation entre travail manuel et travail intellectuel. On le voit bien aujourd'hui : est-ce possible de construire un bâtiment en télétravail ?
Patrick Bouchain
Si Henri Malvaux est son maître intellectuel, le modèle de Patrick Bouchain en matière d'architecture est Lucien Kroll, avec qui il est toujours en communication aujourd'hui. A l'architecte belge, il doit un autre principe fondamental : "La complexité, c'est la vie". Résolument, Bouchain construit et se construit en simplicité, y compris dans ses raisonnements philosophiques.
Faste carrière de friches
Entre 1967 et 2017, il est à la conception de 150 projets architecturaux, tous plus innovants les uns que les autres, tels que le Théâtre équestre Zingaro à Aubervilliers (1989), la Grange au lac à Evian, le théâtre du Radeau au Mans, le cabaret-volière du cirque Dromesko, la métamorphose des usines Lu de Nantes en paquebot culturel (1999). Grand artisan de la commande publique, Patrick Bouchain a longtemps exprimé une certaine indifférence quant au statut d'architecte.
Ce qui fait la qualité de l'architecture, c'est la qualité de la commande plus que celle de l'architecte. Quand j'ai travaillé sur des endroits avec très peu d'argent pour en faire des lieux culturels, j'avais un commanditaire parfait : un budget si minime qu'on ne parlait même pas d'architecture, et un objectif clair.
Patrick Bouchain
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