Où en est le modèle de la sociale démocratie ?

 Protestors demonstrating against Sweden Democrats Jimme Akesson during his campaign visit to Gothenburg, Sweden, 28 August 2018. General elections will be held in Sweden on September 9, 2018
 Protestors demonstrating against Sweden Democrats Jimme Akesson during his campaign visit to Gothenburg, Sweden, 28 August 2018. General elections will be held in Sweden on September 9, 2018 ©Maxppp - Adam Ihse/EPA/Newscom/MaxPPP
Protestors demonstrating against Sweden Democrats Jimme Akesson during his campaign visit to Gothenburg, Sweden, 28 August 2018. General elections will be held in Sweden on September 9, 2018 ©Maxppp - Adam Ihse/EPA/Newscom/MaxPPP
Protestors demonstrating against Sweden Democrats Jimme Akesson during his campaign visit to Gothenburg, Sweden, 28 August 2018. General elections will be held in Sweden on September 9, 2018 ©Maxppp - Adam Ihse/EPA/Newscom/MaxPPP
Publicité

Quels sont les enjeux de l'élection législative en Suède (dimanche 9 septembre) ? Quelle analyse peut-on faire de la crise de la sociale-démocratie dans une Europe déchirée sur la question des migrants dans un contexte de montée des populismes ? Où va le modèle suédois?

- Avec Jenny Andersson, politologue, spécialiste de la sociale démocratie. Directrice de recherche au CNRS, elle est affiliée au Centre d’études européennes de Sciences Po (CEE). Elle dirige depuis 2016 le centre MaxPo à Sciences Po.  Elle a notamment publié « Qu'est ce que c'est ce modèle suédois ? » Débats constitutifs pour comprendre l'histoire de la social-démocratie suédoise, son modèle et son évolution jusqu'aux élections de septembre 2010 », Histoire@Politique 2011/1 (n°13), p. 161-175

- Marc Lazar, professeur d'histoire et de sociologie politique, directeur du Centre d'histoire de Sciences Po et président de la School of government de la Luiss (Rome). Il a co-dirigé avec  Ricardo Brizzi, _La France d'Emmanuel Macron__,_ aux Presses universitaires de Rennes, en 2018.

Publicité

- Wojtek Kalinowski, sociologue, codirecteur de l’Institut Veblen. Il est l’auteur du Modèle suédois. Et si la social-démocratie n’était pas morte ? aux éditions Charles-Léopold Mayer, 2017.

- Et par téléphone depuis Bruxelles, Luuk van Middelaar, philosophe politique et historien. Il a notamment publié Le Passage à l’Europe (Prix du livre européen 2012) chez Gallimard et publie prochainement chez le même éditeur, Quand l’Europe improvise. 

La chronique d'Eric Chol  de Courrier International

A la tête du parti des Démocrates de Suèdes, il y a un homme presque ordinaire :

Cet "homme presque ordinaire", c'est Jimmie Akesson, comme le raconte quotidien Danois Dagens Nyheter, c’est un peu le gendre idéal de la famille suédoise.  Un gendre qui attire les foules: ils étaient près de 4000 à venir l’écouter début août, à l’occasion du rassemblement annuel de son parti.

Cette année, la fête avait lieu à Sölvesborg, la ville natale de Jimmie Akesson dans le sud du pays. 

« Avec sa barbe finement taillée, ses lunettes branchées et son blazer bleu clair, il est le visage de ce parti qui cherche à restaurer son image », raconte le reporter de NBC News.

Fini le temps des accointances néo-nazies de la fin des années 80 : depuis qu’il a pris les rênes du parti en 2005, Jimmie Akesson a su pousser dehors les éléments les plus radicaux. Mais cet ancien web-designer, qui joue du synthé avec son groupe de musique baptisé « Les enfants adorables » reste infréquentable aux yeux des autres responsables politiques suédois.

Mais cette mise à l’écart  ne l’empêche pas de poursuivre son ascension dans les sondages, au point, disent les journaux, d’être  à 39 ans, le « faiseur de rois » de la Suède.  

« L’objectif  de son mouvement, raconte le journal Suisse Le Temps,– devenir un parti comme les autres – est répété de façon subliminale dans certaines affiches qui montrent des Suédois lambda, de face, souriants, sans slogan. Impossible de faire plus neutre, et plus consensuel ».

Ce qui est moins consensuel, ce sont évidemment les slogans politiques de Jimmie Akesson : anti-immigratrion, anti-establishment, et souvent anti-musulman.

Cet été, raconte le Financial Times, il a même suggéré d’envoyer des soldats pour mater les gangs armés dans les banlieues : le premier ministre social démocrate Stefan Lofven s’est dit dans un premier temps ouvert à cette idée, avant de rétropédaler.

Sur l’Europe, Jimmie Akesson réclame un référendum pour quitter l’Union européenne, qu’il qualifie de «  vaste réseau de corruption ». Le leader des Démocrates suédois en est certain : la vague populiste à l’œuvre en Europe de l’Est va bientôt s’étendre à tout le continent. Et celui qui prone le Swexit –un Brexit à la mode suédoise- est convaincu qu’on est proche de la fin de l’Union européenne, comme il l’a dit à un journaliste de Bloomberg.

La Suède n’est pas une exception, l’extrême droite est aussi en bonne position dans d’autres pays nordiques ?

En effet, avec des situations différentes puisqu’en Norvège ou en Finlande, les représentants de ces partis anti-immigration siègent au gouvernement, tandis qu’au Danemark, le Parti du peuple danois dispose, lui,  d’une grande influence au sein du Parlement.

Dans tous les cas, rapporte le Financial Times, ce type de scénarios secoueraient en profondeur la Suède où domine la culture du consensus. Ce choc étant de plus en plus probable, la question est désormais de savoir comment le parti de Jimmie Akesson pourra, s’il réalise un bon score le 10 septembre,  peser sur les décisions gouvernementales?

L’exemple des pays nordiques apporte un début de réponse. Ainsi, rappelle le Financial Times, en Finlande, le parti populiste « Les vrais finlandais » qui avait rejoint le gouvernement en 2015 a chuté dans les sondages et a fini par faire scission l’an dernier .

A l’opposé, poursuit le Financial Times, le Parti du Peuple danois même s’il n’est jamais entré au gouvernement, n’a cessé d’étendre son influence depuis une décennie, en particulier sur l’immigration. C’est peut-être l’exemple que tentera de suivre Jimmie Akesson, croit deviner un éditorialiste du journal Dagens Nyheter

« Son professeur, c’est le parti du peuple danois. Ce sont les Danois qui ont appris aux Suédois de changer la politique et le « climat » de la société sans assumer eux-mêmes la responsabilité du pouvoir ». Et l’éditorialiste conclut : « Il faut donc étudier le Danemark pour avoir une idée de comment la Suède changera ».

L'équipe