Tempête sur le Mexique

Logo de Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 2007
Logo de Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 2007 - Wikicommons/Alex Covarrubias
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Depuis l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, le Mexique est la première cible du nouveau président avec les mesures protectionnistes & le projet de mur à la frontière des deux pays. Comment le Mexique peut-il réagir ? Quel avenir pour la zone de libre-échange, États-Unis, Canada & Mexique ?

Avec
  • Éric Chol Directeur de la rédaction de l'Express
  • Gaspard Estrada directeur exécutif de l'OPALC, l’Observatoire politique de l'Amérique latine et des Caraïbes - Sciences Po.
  • Alain Musset Géographe, membre de l'Institut Universitaire de France
  • Pierre Salama Économiste, professeur émérite à Paris-13

Le Mexique est économiquement pieds et poings liés à l'Amérique du Nord, où trouver des marges de manœuvre? Quelles conséquences, quelles réactions, du côté du Canada, l'autre voisin des Etats-Unis, liés par les mêmes traités commerciaux (L'Accord de libre-échange nord-américain, connu sous l'acronyme ALÉNA - en anglais, North American Free Trade Agreement, NAFTA et en espagnol, Tratado de Libre Comercio de América del Norte, TLCAN ?

Autour de Christine Ockrent :

Alain Musset, directeur d'études à l**'EHESS** et membre honoraire de l'Institut universitaire de France. Il a publié le Que Sais-je sur Le Mexique aux PUF et il a coordonné avec Laurent Vidal Les territoires de l'attente : migrations et mobilités dans les Amériques (XIXe-XXIe siècle) aux Presses Universitaires de Rennes en 2015.

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Pierre Salama, Professeur émérite des universités, Centre d'Économie de Paris-Nord. Il a publié Des pays toujours émergents?, à La documentation française en 2014, et avec Antoine Artous, José Luis Solis Gonzalez et Hai Hac Tran, Nature et forme de l'Etat capitaliste; analyses marxistes contemporaines chez Edition Syllepse, en 2015.

Gaspard Estrada, Directeur exécutif de l’Observatoire politique de l’Amérique latine et des Caraïbes (OPALC) , Sciences Po – USPC

et par téléphone, Pierre Martin, Professeur titulaire au Département de science politique de l’ Université de Montréal, directeur de la Chaire d’études politiques et économiques américaines au CÉRIUM (Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal) et chroniqueur au Journal de Montréal. Pour ce journal, il vient de publier, "L'incroyable conférence de presse de Donald Trump" (17 février 2017).

La chronique d'Eric Chol

Le projet de mur de Donald Trump fait beaucoup réagir au Mexique, et certains voient dans la réaction du gouvernement mexicain une tentative de manipulation de l’opinion.

Il y a par exemple cet éditorialiste du journal de gauche Processo, qui estime que le président Peña Nieto est effectivement engagé dans une manœuvre politique. Selon ce journaliste,

"le gouvernement mexicain et la “particratie” se livrent à un lynchage en règle, en désignant Trump comme le responsable de tous les maux de notre pays". "Pourtant, insiste l’auteur, le divorce entre le gouvernement et les Mexicains est tel qu’il rend impossible une prétendue unité".

Pour ce journaliste de Processo, les responsables mexicains sont en train de chercher inutilement des poux dans la tête de Donald Trump.

"J’ai effectué des recherches approfondies dans les traités, conventions internationales et accords bilatéraux, écrit-il, et je peux affirmer que rien, en termes juridiques, n’empêche les États-Unis d’exercer leur souveraineté en construisant ce fameux mur".

Il est vrai, reconnaît toutefois Processo,

"ce mur n’est pas du goût d’une grande partie des Mexicains, ni de leur gouvernement et de leurs partis politiques".

Mais il poursuit et décoche ses flèches :

"ce que M. Peña Nieto et la particratie ne disent pas, écrit-il, c’est que ce mur est la conséquence directe de la corruption, de l’injuste répartition des richesses nationales et du fossé béant entre les plus défavorisés et les plus puissants qui caractérise notre pays depuis des années".

A lire cet éditorial, cette crise que génère le projet de Trump serait même bénéfique pour le pays :

"Pour la première fois, écrit-il, un président américain rend un immense service au Mexique en mettant notre gouvernement sous pression. Une pression qui va grandir si des mesures drastiques ne sont pas prises en termes de distribution des richesses et de respect de l’État de droit".

Le mur, nouveau symbole de la lutte des classes, il fallait y penser, c’est en tout cas la démonstration du journal Processso.

Dans les journaux du Sud des Etats-Unis, le projet de mur ne recueille guère d’adhésions.

On peut même dire que la presse Californienne, Texane ou de l’Arizona n’est pas tendre avec l’initiative de Donald Trump. D’après le quotidien Mercury News, l’idée n’est d’ailleurs pas nouvelle :

"Depuis Ronald Reagan, et l’arrivée aux Etats-Unis d’une première vague de clandestins du Mexique et d’Amérique centrale, toutes les administrations ont envisagé de mettre en place un mur ou une barrière", rappelle l’auteur.

Pour le Los Angeles Times, il s’agit tout simplement de l’une des “pires idées de Trump”. Le quotidien californien souligne que

“le coût de 8 milliards de dollars avancé par Trump est irréaliste”, et évoque de son côté une facture de 38 milliards de dollars.

L’Arizona Daily Star a quant à lui ressorti à la une de son site une enquête datée de l’été 2016, intitulée “Nous n’avons pas besoin de la grande muraille de Trump”.

Dans cet article, le quotidien de l’Arizona souligne qu’à la frontière, côté américain, personne ne pense qu’un mur puisse être la solution : le journaliste de l’Arizona Daily Star conclut son enquête en réclamant :

"de nouvelles mesures pour que les migrants puissent entrer légalement sur le territoire américain et y travailler.”

Même au Texas, un bastion républicain, les « élus sont plutôt réticents à l’idée de la construction d’un mur en dur » . Et pour cause, rapporte le Dallas Morning News : aucun autre État

“ne bénéficie plus du commerce, des investissements et des voyages transfrontaliers entre les États-Unis et le Mexique que le Texas”.

Un grand merci aux équipes de la Documentation d'Actualité de Radio France.