

Comme chaque semaine deux essais sous les feux de la critique : "Le rocardisme : devoir d'inventaire" d'Alain Bergounioux, Jean-François Merle (Seuil) et " La France d’Emmanuel Macron" sous la direction de Riccardo Brizzi et Marc Lazar (Presses universitaires de Rennes).
- Laurent Etre Journaliste Culture et Savoirs à l’Humanité
- Alexis Lacroix Journaliste et essayiste
Ce soir deux livres politique qui éclaire différemment l’histoire récente de la sociale-démocratie française. Dans Le rocardisme : devoir d’Inventaire, publié au Seuil, Alain Bergougnioux et Jean-François Merle se lancent dans une tentative de définition de la doctrine Rocard, lui dont on a pu dire au moment de sa mort qu’il laissait beaucoup d’orphelins, mais aucun héritier. Puis en seconde partie, on évoquera La France d’Emmanuel Macron, ouvrage collectif sous la direction de Riccardo Brizzi et Marc Lazar, publié aux Presses Universitaires de Rennes. Retour sur le tsunami politique de 2017 et ses conséquences notamment pour la gauche socialiste.
Nous serons, pour en débattre, en compagnie d' Alexis Lacroix et Laurent Etre.
Alain Bergounioux, Jean-François Merle - Le rocardisme : devoir d'inventaire
Procédons par ordre chronologique, je vous propose de commencer par Le Rocardisme : devoir d’inventaire, publié au Seuil et signé de l’historien organique du Parti Socialiste, Alain Bergounioux, qui préside actuellement l’Office universitaire de recherche socialiste, connue sous l’acronyme l’OURS. Un essai coécrit avec Jean-François Merle qui lui est conseiller d’État honoraire, et surtout ancien collaborateur de Michel Rocard. À partir des années 70 il a été successivement son assistant parlementaire, son chef de cabinet en 1981 puis, à Matignon, conseiller technique chargé de l’outre-mer.
L’essai part du constat d’un attachement profond des Français à la figure de l’ancien premier ministre, et ceci tout au long de sa carrière politique. Attachement à l’homme mais aussi à ses idées qu’il a exprimé de manière constante pendant 50 ans, mettant en avant : la vérité, la rigueur, la responsabilité, la générosité et l’inventivité.
Mais peut-on réellement incarner pendant tout ce temps la modernité en politique ? C’est une question qui court tout au long du livre de Bergougnoux et Merle, qui se penchent sur la pensée et l’action de celui qui dirigea le PSU à partir de 1967, avant de diriger le Parti Socialiste en 1993-1994. Une histoire de paradoxe, qui incarne parfaitement la tension dans la gauche française, Michel Rocard se voulant à la fois « porteur d’utopie », et « briseur de rêve » à travers son fameux « parler vrai ».
Autre dimension qui est absolument fondamentale : Rocard c’était un dépassement des apories marxisantes, selon lui, d’une partie de la gauche. C’était surtout un dépassement dans le cadre d’une culture antiautoritaire. S’il faut des parallèles avec aujourd’hui, vous avez un dépassement des apories de la gauche que le macronisme représente. (Alexis Lacroix)
Sur le fond de l’ouvrage, c’est un livre d’hommage écrit par des proches, bien documenté et c’est appréciable. Mais la grande question : pourquoi cet inventaire maintenant ? C’est l’épilogue du livre qui répond à cette question. Ce que veulent les deux auteurs c’est se positionner sur la question d’une éventuelle filiation idéologique entre macronisme et rocardisme. (Laurent Etre)
Sous la direction de Ricardo Brizzi et Marc Lazar - La France d’Emmanuel Macron
Deuxième temps de l’émission, je vous propose maintenant de nous pencher sur La France d’Emmanuel Macron, c’est le titre d’un ouvrage collectif sous la direction de Ricardo Brizzi et de Marc Lazar. Le premier est professeur associé d’histoire contemporaine à l’université de Bologne, le second – connu notamment pour ses travaux sur l’Italie – est professeur d’histoire et de sociologie politique, directeur du Centre d’histoire de Sciences Po, et président de la School of governement de l’Université Luiss (à Rome).
Il y a d’ailleurs un certain nombre d’auteurs italiens parmi les contributeurs de cet ouvrage, c’est l’un de ses principaux intérêts… on compte aussi des signatures connues des auditeurs de France Culture comme le directeur général de Terra Nova, Thierry Pech qui participe à l’Esprit Public. Il s’agit ici rien de moins que de comprendre ce qui s’est passé dans cette année 2017, soit l’un des moments de rupture politique les plus spectaculaires de la Ve République.
À travers une série de chapitres revenant sur la présidence Hollande, les campagnes présidentielles et législatives, les défis enfin qui se posent au nouveau président de la République s’il veut satisfaire les attentes suscitées… l’ouvrage propose d’analyser les raisons et les limites – sans insister beaucoup on va dire sur ce dernier point – de son succès.
On se trouve face à un ouvrage dont le ton m’a semblé très technocratique, très sciences-po, émaillé de prescriptions néolibérales du type : « La France doit s’adapter à une économie mondialisée » (Marc Lazar), « La France doit rompre avec sa préférence pour les dépenses publiques (Thierry Chopin). Le cœur de l’ouvrage c’est la 3e partie intitulée « les défis de la France » mais ce sont surtout les défis d’Emmanuel macron selon les contributeurs du livre. (Laurent Etre)
L’objet de ce livre est un regard croisé transalpin (franco-italien) sur l’émergence d’un centre réformiste qui est au pouvoir en France et qui a été chassé du pouvoir en Italie. […] Sur l’épuisement des clivages fondamentaux il ne nous dit rien, rien de nouveau. En effet nous dire qu’Emmanuel macron c’est une chimère de Rocard-Mendès et de Gaulle, c’est vrai. Cela correspond au réel. (Alexis Lacroix)
L'instant critique
Laurent Etre nous propose un documentaire sur Arte replay " Un homme est mort", librement adapté de la bande dessinée éponyme de Kris et Étienne Davodeau, ce film d'animation rend un vibrant hommage au combat des ouvriers brestois pendant les grèves de 1950 et redonne vie à des événements réels comme la mort d'Édouard Mazé. Alexis Lacroix nous emmène voir une exposition consacrée en France au photographe et cinéaste Helmar Lerski (1871-1956) au musée d'Art et d'Histoire du judaïsme qui fête ses 20 ans. C'est la première rétrospective consacrée en France à ce photographe et cinéaste, grand portraitiste.
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