
« L'introduction d'un nouveau genre de musique est une chose dont il faut se garder : ce serait tout compromettre, s'il est vrai comme le prétend Damon, et comme je le crois, qu'on ne peut changer les modes de la musique sans bouleverser les lois fondamentales de l'État. » (Platon, République, IV)
Dans cet extrait de La République, Platon ne parle pas de évidemment Damon Albarn (le chanteur de Blur) mais de Damon d’Athènes. Mais avouez que la citation tombait bien pour parler d’une musique qui a changé le cours de la musique (il y a 50 ans, en prenant quelques libertés avec ses règles) et dont cette interprétation nouvelle est due, en partie, à Damon Albarn.
La musique, c’est celle de Terry Riley «In C», créée à San Francisco en novembre 1964, une œuvre considérée comme la pierre fondatrice de la musique minimaliste interprétée ici par des musiciens maliens et anglais (le projet Africa Express où l’on retrouve à la fois Brian Eno et de jeunes musiciens inconnus). « Terry Riley’s In C Mali » ou la règle musicale portée à un autre niveau.
Une fois n’est pas coutume, explication de ce que vous entendez par la forme. Pour « In C » (en Do), Terry Riley laisse une très grande liberté aux musiciens : la pièce peut durer entre 40 mn et 1h30 selon la manière dont vous la jouez. Au programme 53 petites phrases musicales. Chacun des musiciens doit jouer ces 53 motifs, et le répéter autant de fois qu'il le souhaite avant de passer au motif suivant. Aucune contrainte sur le nombre de répétitions. Résultat la partition tient sur une seule page. Une partition qui contient tout ce que les musiciens jouent, sans reproduire pourtant ce que l'on entend quand la pièce est jouée : ou l'aléatoire créateur de la forme ouverte.
Pas d’instrument imposé non plus : depuis 1964 il y a eu des dizaines des centaines de versions différentes, par un orchestre de 124 musiciens, par des ordinateurs, des instruments traditionnels chinois, et cette première version malienne avec balafon, Ngoni, flute peul, kalimba et forcément kora... Ce qui est assez beau dans cette proposition de la musique de Terry Riley jouée par des musiciens Maliens c’est que tout le plaisir dans In C vient des combinaisons polyrythmiques qui se font et se défont dans les croisements des différentes parties que chacun joue, et qu’il y a quelque chose d’évident à les entendre jouer cette musique, comme un retour des choses. A l’évidence Platon avait raison, il y a quelque chose du manifeste politique dans la forme libre et notamment celle que propose Terry Riley (bientôt 80 ans). « Il est très important que les interprètes s’écoutent très attentivement les uns les autres, et ceci signifie qu’il faut parfois s’arrêter de jouer pour écouter »
Extraits diffusés tirés de :
Africa Express Presents... Terry Riley’s In C Mali (Transgressive Records)
Clip :
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