Róisín Murphy et ses jouets imberbes

France Culture
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Roisin Murphy
Roisin Murphy
© Radio France

« * J’ai toujours été attirée par les gens bizarres. Ça a commencé à Manchester, à la fin des années 1980. (...) Et puis j’ai fait partie d’un groupe, j’ai vécu une histoire d’amour, et j’ai injecté tout ce “pour” quoi j’étais et tout ce “contre” quoi j’étais dans ce premier disque, et tout s’est mis en place de façon magique. (...) jusqu’à ce que le fait de vivre à Londres et la pression ne deviennent trop lourds, et qu’il soit temps de grandir et de tout recommencer* »Et elle a tout recommencé Róisín Murphy il y a 10 ans, la chanteuse de Moloko (souvenez vous le tube « Sing It Back » c’était elle, entre autres), tout changer, passant de rousse à blonde, de future star à artiste inclassable. Une sorte d'élève brillante dont tous les critiques se demandent pourquoi elle n'est pas devenue une star. Cela faisait huit ans que Róisín Murphy (vous pouvez prononcer Rosheen puisqu'elle est irlandaise) n’avait pas publié d’album, elle avait surpris ses fans l’année dernière en sortant un mini-album de reprises italiennes au titre génial « Mi Senti » « tu m’écoutes / tu m’entends » (hommage à des chanteuses comme Mina ou Patty Bravo) où l'on entendait notamment ceci : « encore toi » Ancora Tu tube de Lucio Battisti, repris par Róisín Murphy – qui définit sa propre voix « comme celle de Grace Jones essayant d'imiter David Bowie ». Ressemblance formelle qui rejoint leurs préoccupations pour les questions de genre : Róisín Murphy cite Cindy Sherman comme modèle de féminisme, radicalité qu’on peut retrouver dans ses textes : elle parle de rapports de force et de sexe dans « Exploitation », de jouets imberbes « Hairless Toys » titre de l'album, comme un collage electro dada. Et puis le premier titre que vous avez entendu en ouverture du disque, est inspiré lui de « Paris Is Burning » de Jennie Livingston, film document sur un certain NY des années 80, ou comment des minorités rejetées (latino, noir, trans, homosexuels) ont inventé et mis en scène leur valorisation. Matière douce et subversion des genres, qui passe aussi par le son : Róisín Murphy apparaît ici accompagnée des productions d’Eddie Stevens (avec qui elle travaille depuis 20 ans déjà). On retrouve, dans les matières sonores, son goût sur scène pour les créations haute-couture, avec des patrons inhabituels pour la pop (jusqu’à 9 minutes par chanson) et ces paroles aussi brillantes qu’étranges : Agi-magic -la-talagy. (mc) extraits diffusés : Gone FishingAncora Tu (Lucio Battisti) Unputdownable Evil EyesRoisin Murphy « Hairless Toys » (PIAS)