2016, chaire Économie des institutions, de l'innovation et de la croissance.
- Philippe Aghion Economiste, Professeur au Collège de France.
Comment change-t-on nos modes de pensée ? Aujourd’hui, nous explorons une nouvelle théorie - schumpétérienne - de la croissance, reposant sur l'innovation et la destruction créatrice, en compagnie de Philippe Aghion, dans le cadre de la chaire d'Économie des institutions, de l'innovation et de la croissance.
Cet économiste qui mêle dans ces travaux modélisation et analyse empirique, a enseigné au MIT, à Oxford et à l'université de Harvard. Au micro de Christine Goémé, il raconte comment, jeune étudiant en mathématiques, son intérêt pour la chose publique, pour « la politique » l’a conduit à l’économie. Il voulait comprendre la validité des arguments, trouver des outils, savoir si les programmes proposés étaient réalistes. Ses recherches sur le développement, le lien croissance/inégalité partent de ce questionnement à l’heure de la mondialisation. Résumant son analyse, il explique récemment :
« On est dans un monde de croissance par l’innovation. Il faut donc un marché du travail qui permette aux entreprises de se réorganiser et de fermer une activité pour en ouvrir une autre. » « Tout le problème est de favoriser l’innovation sans pénaliser les employés ». L’éducation et la formation professionnelle doivent être pensées en ce sens pour jouer leur rôle de levier et assurer la « flexisécurité ». La mobilité doit devenir « qualifiante, excitante et non stressante ».
Philippe Aghion introduit la « frontière technologique » :
« Plus un pays se développe, plus c’est l’innovation 'à la frontière' qui devient le moteur de la croissance et prend le relais de l’accumulation du capital et du rattrapage technologique ». « Imaginez qu’un jour, explique-t-il, on fasse entrer un nouvel élève brillant dans une classe. Comment les élèves vont-ils réagir à cet accroissement de la concurrence ? ». « L’arrivée de ce nouvel élément brillant va inciter les meilleurs élèves de la classe à travailler plus dur pour rester les meilleurs » tandis que « cela va décourager les moins bons élèves pour qui rattraper ce retard devient plus difficile qu’auparavant ».
Les travaux de l’économiste abordent les « énigmes de la croissance ». Il en donne quelques exemples révélateurs. La notion d’expérience est fondamentale. Pourquoi l’Argentine décroche-t-elle des Etats-Unis vers 1938 ? Selon Philippe Aghion, ce pays n’a pas su « faire évoluer ses institutions pour devenir une économie innovante ».
L’économiste qui a les oreilles des politiques rappelle que ses « idées appartiennent à tout le monde » et que l’on a moins peur de ce que l’on comprend mieux. Il demande faut-il craindre comme Tocqueville,
« que les hommes n’arrivent à ce point de regarder toute théorie nouvelle comme un péril, toute innovation comme un trouble fâcheux et qu’ils refusent entièrement de se mouvoir de peur qu’on ne les entraîne. »
Et c’est sans peur que nous gagnons le grand amphithéâtre du Collège de France, le 1er octobre 2015, pour la leçon inaugurale de Philippe Aghion, « Repenser la croissance économique »
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