Léonore Moncond'huy : maire de famille

Léonore Moncond'huy dans son bureau de la mairie de Poitiers.
Léonore Moncond'huy dans son bureau de la mairie de Poitiers. ©Radio France - Rosalie Lafarge
Léonore Moncond'huy dans son bureau de la mairie de Poitiers. ©Radio France - Rosalie Lafarge
Léonore Moncond'huy dans son bureau de la mairie de Poitiers. ©Radio France - Rosalie Lafarge
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A seulement 30 ans, l'écologiste Léonore Moncond'huy a mis fin à plus de quarante ans de règne socialiste à Poitiers en devenant maire de la ville, il y a six mois. Mais elle n'y a pas mis fin seule : sa victoire est celle d'un collectif de citoyens. Et elle y tient comme personne, au collectif.

Avec

Elle répond plus facilement par "on" ou "nous" que par "je", Léonore Moncond'huy. Et d'ailleurs, le soir de son élection, ce n'est pas son nom qu'ont scandé ses supporters, mais "collectif, collectif !". "C'était un magnifique moment dans ma mémoire, se souvient l'écologiste de 30 ans élue maire de Poitiers au mois de juin, c'était un tourbillon où j'avais du mal à comprendre ce qui m'arrivait, mais c'était vraiment un immense moment de joie collective"

La mairie de Poitiers, pilotée depuis six mois par l'écologiste Léonore Moncond'huy et son équipe
La mairie de Poitiers, pilotée depuis six mois par l'écologiste Léonore Moncond'huy et son équipe
© Radio France - Rosalie Lafarge

Le collectif, c'est un peu l'histoire de sa vie. Aînée d'une famille nombreuse, Léonore Moncond'huy rejoint le mouvement protestant des scouts Éclaireuses et Éclaireurs unionistes de France à 11 ans. Elle y franchit toutes les étapes, de "louvette" à "administratrice de son groupe" et c'est ce qui, visiblement, l'a forgée. 

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C'est une pédagogie fondée sur la responsabilisation des jeunes très tôt. Dès onze ans j'avais des responsabilités dans le fait de piloter mon équipe, de savoir apprendre aux plus petits à faire des choses. 

"Le scoutisme est très important pour moi, mais plus généralement, l'éducation populaire au sens large. A travers l'éducation populaire, j'ai appris à avoir cet état d'esprit collectif, responsable, j'ai eu la chance qu'on me fasse confiance très jeune", souligne-t-elle, avant d'ajouter que "cette bienveillance et cette confiance" qui l'ont accompagnée tout au long de son parcours éducatif, l'ont suivie lors de son parcours politique. "J'ai eu moins peur d'oser me lancer et m'engager que si j'avais dû faire mes preuves pendant quinze ans", résume Léonore Moncond'huy. 

Du scoutisme à la politique, le parcours de Léonore Moncond'huy

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L'engagement dès le plus jeune âge

Dès le collège, elle rejoint le conseil communal des jeunes de Poitiers. Elle souhaitait alors pouvoir "s'impliquer dans la vie de la ville, avoir accès à des informations, à des contacts avec les élus". "C'était déjà un monde qui m'intéressait", reconnait l'élue. 

Léonore Moncond'huy, ici entre ses parents le soir de l'élection, garde un souvenir ému du jour de sa victoire aux municipales
Léonore Moncond'huy, ici entre ses parents le soir de l'élection, garde un souvenir ému du jour de sa victoire aux municipales
© Radio France - Rosalie Lafarge

Fille d'un universitaire qui lui a transmis, notamment, la valeur de "l'engagement", et d'une documentaliste qui s'est attelée à la sensibiliser, entre autres, à l'écologie, Léonore Moncond'huy choisit naturellement des études littéraires puis de sciences politiques. Elle se spécialise dans les politiques de l'éducation à l'international et travaille pendant cinq ans pour des structures comme l'Unicef, en tant que gestionnaire de projet. Puis, elle renoue avec la politique.

Du conseil régional au conseil municipal

"On m'a proposé d'être candidate aux élections régionales en 2015, j'ai été élue, et j'ai ainsi été la plus jeune conseillère régionale de Nouvelle Aquitaine. Cela m'a mis un pied à l'étrier politique". C'est à ce moment-là que Léonore Moncond'huy réalise à quel point le fossé se creuse entre les citoyens et les politiques. 

Membre d'Europe Écologie Les Verts, elle se lance alors avec d'autres, deux ans avant les municipales, dans la construction d'un mouvement citoyen pour Poitiers, baptisé Poitiers collectif, persuadée là aussi de la nécessité d'introduire du collectif dans un projet politique pour qu'il suscite l'adhésion. C'est le collectif qui construit le programme basé sur trois piliers : l'écologie, la justice sociale et la démocratie. C'est toujours le collectif qui choisit de faire d'elle la tête de liste : elle est désignée par le biais d'une élection sans candidat à l'issue de plus de cinq heures de débat public. Et c'est encore le collectif qui trône aujourd'hui sur son bureau de maire. 

Il n'est pas encore tout à fait "à son image", ce bureau, souligne-t-elle, pointant du doigt les toiles accrochées au mur et destinées à être changées. Elle a tout de même fait remplacer les meubles en verre de son prédécesseur par du mobilier en bois. "J'ai besoin de matière naturelle", précise-t-elle. Et elle a disposé quelques photos. Une photo personnelle : elle, entourée de ses parents le soir de l'élection. Et beaucoup de photos de l'équipe. "J'ai besoin d'avoir la présence des autres élus, de mes colistiers de l'époque, parce que le collectif, c'est ce qui a soutenu ma candidature, c'est par le collectif qu'est né et qu'a été porté notre projet, donc c'est vraiment indissociable de ma manière de faire de la politique", met en avant Léonore Moncond'huy.

Sur le bureau de la maire trônent de nombreuses photos de son équipe
Sur le bureau de la maire trônent de nombreuses photos de son équipe
© Radio France - Rosalie Lafarge

Le collectif avant tout 

Ce sens du collectif passe par la baisse d'un tiers de son indemnité de maire, soit près de 1 500 euros. "Ce qu'a retenu la presse c'est la baisse de mon indemnité, en réalité mon intention n'était pas tant de réduire mon indemnité que de réduire l'écart entre l'indemnité la plus basse et l'indemnité la plus haute. On a souhaité une répartition différente de l'enveloppe, donc une augmentation de l'indemnité des conseillers municipaux délégués et pas seulement une baisse de mon indemnité", explique-t-elle, fière tout de même du "message de sobriété" envoyé à l'occasion. 

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Cela passe aussi par son refus de prendre la présidence de la communauté urbaine Grand Poitiers, pourtant a priori acquise au maire de Poitiers. Mais ce sens du collectif se retrouve un peu mis à mal par l'épidémie de coronavirus. 

Le contexte de crise dans lequel nous sommes arrivés nous a mis directement dans le bain des décisions quotidiennes à prendre. J'imagine que lors d'une arrivée, en début de mandat, on a tout de suite envie de se projeter vers l'avenir, de construire de grands projets structurants, là, depuis six mois on est extrêmement happés par les problématiques du quotidien : les protocoles dans les écoles, les campagnes de dépistage, aujourd'hui la campagne de vaccination.

"Là où c'est un peu frustrant, c'est que cela limite les possibilités de se réunir" - Léonore Moncond'huy

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Elle assure par ailleurs que cela ne met pas à l'arrêt tous les projets de long terme, mais elle regrette particulièrement que cela freine, justement, le collectif. "Là où c'est un peu frustrant, c'est que cela limite les possibilités de se réunir, de faire du commun d'un point de vue humain, on n'a même pas pu faire une photo de groupe entre élus depuis notre élection, on n'a pas pu non plus réunir tous les services, alors que, pour moi, la question du partage du sens est très importante en début de mandat pour qu'on puisse aller collectivement vers le projet politique de changement pour la ville qu'on veut porter"

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Trop jeune ? Incompétente ? Trop lisse ?

Si elle refuse de faire de sa jeunesse un argument politique, ses adversaires en usent. Des procès en illégitimité, voire en incompétence, lui sont régulièrement intentés. "Un nouveau maire doit de toute façon prendre ses marques et se faire à son mandat, qu'il ait 30 ans ou qu'il en ait 60", tranche la maire. 

Léonore Moncond'huy essaie de prendre du recul par rapport à la critique et tente de se tenir loin des débats qui ont pu agiter le début de mandat des maires écologistes, même s'ils la rattrapent parfois. "Par exemple, nous n'avons pas du tout réduit le nombre de sapins de Noël, mais les gens s'imaginent que si, parce qu'on est écolo, on n'aime pas les sapins de Noël. Je ne souhaite pas critiquer mes collègues (ndlr : Pierre Hurmic, maire EELV de Bordeaux critiqué pour sa volonté de ne pas vouloir "d'arbre mort", et Grégory Doucet maire écologiste de Lyon, à l'origine d'une polémique sur le Tour de France) pour les propos qu'ils ont tenus parce que je sais combien l'expression médiatique est difficile, a fortiori en début de mandat, mais effectivement, cela a contribué à donner des marqueurs pas forcément positifs"

Ma manière de faire de la politique n'est pas dans le clivage ni la construction d'opposition".

Décrite comme radicale "sur le fond, pas sur la forme", elle l'assume. "Ma manière de faire de la politique n'est pas dans le clivage, pas dans la construction d'opposition, c'est plutôt d'essayer au maximum de parler à tout le monde, de mettre les gens autour de la table et de comprendre les motivations de chacun, de là où part chacun, pour essayer de le convaincre de la justesse de mes propositions politiques". Trop lisse diront certains. Après avoir lancé la vague verte aux municipales il y a six mois, Léonore Moncond'huy n'en fait pas, de vagues, pour l'instant en tout cas. Et parole de scout, elle en est plutôt fière, madame la maire.

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L'objet qui lui tient à coeur

Le stylo, "symbole de la parole politique écrite ou orale" pour Léonore Moncond'huy
Le stylo, "symbole de la parole politique écrite ou orale" pour Léonore Moncond'huy
© Radio France - Rosalie Lafarge

"Tout ce qui est lié à l'écriture, je le garde" - Léonore Moncond'huy

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Comme objet qui lui tient particulièrement à coeur, Léonore Moncond'huy a choisi un stylo, de belle facture. "Je suis en plein dans les cartes de voeux et cela me demande d'écrire beaucoup", rit l'élue en introduction. Mais au-delà de ça, c'est une référence à son parcours littéraire et au fait qu'il y a certaines choses qu'elle souhaite continuer à faire elle-même : "

Tout ce qui est lié à l'écriture, je le garde, j'écris mes discours, je fais ma communication sur les réseaux sociaux, je continue à écrire à la main de nombreuses lettres aux personnes qui m'écrivent, et c'est vraiment quelque chose que je souhaite garder. 

Ce choix du stylo va aussi un peu plus loin pour Léonore Moncond'huy : "Cette fibre littéraire se manifeste dans le goût pour l'écriture et l'expression littéraire au sens large, mais aussi dans l'importance que j'accorde à la parole politique, c'est très important que la parole écrite ou orale soit fiable. C'est aussi une manière de redonner confiance en la politique d'avoir une écriture ou une parole accessible au citoyen, franche et fiable".