Bordeaux au long cours

Ce fut comme un tremblement de terre, à Bordeaux, lors des dernières élections municipales. Le gaullisme ou la droite y avaient régné sans partage depuis la Libération, incarné pour le premier par Jacques Chaban-Delmas, pour la seconde par Alain Juppé. 

Voici que tout à coup la majorité conservatrice qui semblait vouée à dominer toujours la cité dut céder la place à une liste de gauche emmenée par un chef de file écologiste. Cette emprise semblait pourtant se fonder sur une solide tradition historique, en termes culturels, sociologiques et économiques - du côté en particulier de la prestigieuse richesse viticole. Les observateurs extérieurs s’en montrèrent donc surpris. Fut-ce à tort ? 

Comme toujours, un recul dans la longue durée pousse à remettre en cause les fausses déterminations et à montrer la complexité d’une idiosyncrasie. Après tout, ni Montaigne, ni Montesquieu, ni Mauriac, ces « trois M » chers au Bordelais Jean Lacouture qui en écrivit les biographies, n’incarnent, sur ces terres, un esprit de prudence ou de conformisme. 

Anne-Marie Cocula, mon invitée ce matin, a beaucoup pratiqué ces trois grands hommes. Historienne renommée de l’Aquitaine, spécialiste de l’époque de la Renaissance, elle s’est trouvée promue naguère à la tête de l’Université de Bordeaux III. Comme vice-présidente du Conseil régional dirigé par le socialiste Alain Rousset, elle y a été chargée de la culture et, en somme, de la mémoire. J’ajoute qu’elle préside aujourd’hui le Centre culturel François-Mauriac de Malagar. 

Bref, the right woman in the right place, comme on dira volontiers dans un pays qui a été tellement marqué, d’âge en âge, par l’influence de l’Angleterre. Parler avec Anne-Marie Cocula de Bordeaux au long cours, ce sera, je l’espère, restituer ce que furent la genèse, les déchirements, les continuités et les ressorts de l’une des plus belles villes de France.

ARCHIVES DIFFUSÉES

• Extrait des Mémoires de James de COQUET (célèbre correspondant de guerre au Figaro, puis critique gastronomique), à propos du Bordeaux dans son enfance, lu par Claude Dominique dans l'émission "Le passé singulier" de Michel Winock et Claude Dominique, France Inter, le 30/01/1984.
• Interview de Jean LACOUTURE à propos de l'influence anglaise sur la ville de Bordeaux (promenade dans les rues de Bordeaux), dans le cadre de l'émission "Une ville en tête" de Michèle Enouf et Laurent Juvanon, France Inter, le 04/08/1996.
• Jacques CHABAN-DELMAS, ancien maire de Bordeaux (à propos de Montaigne ; fait le parallèle entre lui et Montaigne), interrogé par Jean de Beer dans le cadre de l'émission "Le monde contemporain" de Jean de Beer et Francis Crémieux, sur France culture, le 08/11/1975.
• Extrait de L'Esprit des lois de MONTESQUIEU (1748), chapitre V livre XI "De l'esclavage des nègres", lu dans le cadre d'une émission intitulée "Abolition de l'esclavage : Anthologie des poèmes et prose anti esclavagistes", diffusée sur la RTF le 16/01/1963. 
• Interview de François MAURIAC, par Jean Amrouche, RTF, 08/11/1952.

BIBLIOGRAPHIE

• Anne-Marie Cocula, Histoire de Bordeaux, Le Pérégrinateur, 2010.
• Anne-Marie Cocula, Montaigne, les années politiques, Editions Confluences, 2011. 
• Anne-Marie Cocula, Étienne de la Boétie et le destin du Discours de la servitude volontaire, Classiques Garnier, 2018.
• Anne-Marie Cocula, Un fleuve et des hommes. Gens de Dordogne suivi de Vies d'antan au bord des rivières, Confluences, 2020.
• Alain Juppé, Dictionnaire amoureux de Bordeaux, Plan, 2018.
• Étienne de la Boétie, Le petit La Boétie illustré, Les éditions du Ruisseau, 2020.