- Anne Simonin Historienne, chercheuse au CNRS
Retour historique sur une peine définie à la Libération après que la France a sombré dans la honte du régime de Vichy et la collaboration avec l’ennemi nazi.

Lorsque survient la brutalité d’événements tel que celui qui a endeuillé la France entière, celui des assassinats barbares du 7 janvier dernier, le désarroi collectif cherche systématiquement à les désigner et à les punir d’une manière qui puisse paraître adaptée à l’exceptionnalité, au moins apparente, de leur cruauté. Ainsi a surgi de plusieurs côtés l’idée de ressusciter à l’encontre des djihadistes français le crime d’indignité nationale. Un crime qui a été défini à la Libération après qu’a sombré dans la honte du régime de Vichy et la collaboration avec l’ennemi nazi. La peine de dégradation nationale qui a touché quelque cent mille personnes entre 1945 et 1951, une peine à laquelle un député UMP, Philippe Meunier, avait proposé, dès novembre 2014, de redonner vie et entraînant pour tout terroriste la privation des droits civiques, civils et politiques. Après le massacre de Charlie Hebdo la porte-parole du parti socialiste, Annick Lepetit, avait dit que la création renouvelée d’une telle peine aurait, je cite, " la vertu de rappeler que prendre les armes contre son pays est de la même nature que la collaboration avec l’occupant pendant la Seconde Guerre mondiale". Nicolas Sarkozy a opiné dans le même sens au nom de son parti. Le gouvernement, finalement, a renoncé depuis à cette idée, mais le seul fait qu’il ait pu y songer stimule le goût d’aller y voir de plus près ce que furent le sens, la portée, les racines historiques, les conséquences de l’indignité nationale infligée voici soixante-dix ans.
Anne Simonin , historienne au CNRS, a étudié naguère dans un ouvrage majeur, ce moment de notre droit en le replaçant dans une durée pluriséculaire et je me félicite de l’accueillir ce matin à mon micro. Jean-Noël Jeanneney
Programmation sonore :
- Chanson « Les fils de Pétain » de Pierre DAC , enregistrée à Londres le 23 janvier 1944.
- Marcel WILLARD, secrétaire général à la Justice , appel contre les collaborateurs, le 26 août 1944.
- Frédéric POTTECHER , compte-rendu du procès de Xavier VALLAT, décembre 1947.
- Témoignage de Mandoline, tondue à la Libération , interviewée par Claire HAUTER, dans le cadre de l’émission « Là bas, si j’y suis » de Daniel MERMET, sur France Inter, le 7 janvier 2002.
- Extrait d’un débat sur l’amnistie des condamnés politiques , avec Pierre-Henri TEITGEN et Daniel MAYER, dans l’émission « Tribune de Paris », le 25 février 1952.
Bibliographie :
**- Anne SIMONIN, Le Déshonneur dans la République. Une histoire de l’indignité, 1791-1958 ** , Grasset, 2008.
**- Peter NOVIK, L’épuration française ** , Balland, 1985.
**- Marc-Olivier BARUCH, Une poignée de Misérables : L’Epuration (1944-1952) ** , Fayard, 2003.
**- Fabrice VIRGILI, La France virile : des femmes tondues à la Libération ** , Payot, 2004.
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