Les veuves, entre douleur et liberté

Portrait d'une veuve, 1896.
Portrait d'une veuve, 1896. ©Getty
Portrait d'une veuve, 1896. ©Getty
Portrait d'une veuve, 1896. ©Getty
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Terrassées, animées d'un fort sentiment de culpabilité, les veuves d’aujourd’hui sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à rester seules après la disparition de leur compagnon. En fonction des époques, le veuvage est un phénomène perçu de façon plus ou moins importante.

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J'ai revu l'autre jour le beau film de François Truffaut, La Mariée était en noir, qui raconte le parcours d'une jeune femme dont l'époux est tué à ses côtés au sortir de l’église et qui organise avec raffinement sa vengeance à l'égard du petit groupe de camarades qui avait perpétré ce meurtre. Jeanne Moreau l'interprétait superbement. Et l'idée m'est alors venue de consacrer une émission à l'histoire des veuves, à l'histoire de la construction sociale de leur place, de leur rôle, de leur image à travers les âges. 

J'ai donc convié Frédéric Chauvaud, professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Poitiers, qui vient d'organiser sur ce thème, avec Laurent Bihl, un numéro de la revue Sociétés et représentations, publiée aux éditions de la Sorbonne. Cette livraison s'intitule "De la pleureuse à la veuve joyeuse" et on y voit passer en revue les multiples figures qui peuvent se dessiner, selon une gamme qui couvre un champ très large. 

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Un champ qui va de la plus cruelle douleur éprouvée, dans la paix et dans la guerre, jusqu'aux vertiges d'une liberté retrouvée hors des étroitesses de couples qu'enserraient les conventions et les égoïsmes masculins. Cette chronique peut s'alimenter dans la littérature, de Christine de Pizan à La Fontaine, de Molière à Balzac, d'Erckmann-Chatrian à Roger Martin du Gard, dans la peinture et dans la caricature, au théâtre, dans l'opérette et au cinéma, mais aussi dans les archives des tribunaux dont Frédéric Chauvaud se trouve être un spécialiste reconnu. 

L'archétype de la veuve empoisonneuse que meut la cupidité traverse les générations et de multiples faits divers renseignent sur l'intérêt plus ou moins morbide du public pour des êtres dont le mystère le fascine, en le renvoyant peut-être à ses propres angoisses ou à ses frustrations. J'en ai dit assez, peut-être, pour donner le goût d'y aller voir de plus près.

Archives sonores

-      Pastille dans le générique : Agnès Varda à propos des veuves de Noirmoutier en 2005.

-      Interview de Marianne Caron, veuve du photographe Gilles Caron, extrait de l’émission « Surpris par la nuit » d’Alain Veinstein et Fabienne Casta Rosaz, sur France culture, le 28 novembre 2001.

-      Témoignage d’une veuve de guerre, extrait de l’émission « Portraits : 1914-1918 » de Françoise Estèbe, sur France culture, le 3 août 1978.

-      Extrait de l’entretien de Jacques Chancel avec Sonia Delaunay, dans l’émission « Radioscopie », sur France Inter, le 25 décembre 1975.

-      Extrait d’un entretien avec Marie Besnard, interrogée par François Chalais, dans l’émission télévisée « Cinq colonnes à la Une », RTF, le 6 mars 1959.

-      Lecture par Madeleine Renaud de la fable « La jeune veuve » de Jean de La Fontaine, dans l’émission « Des couples et des couleurs » avec Madeleine Renaud et Jean-Louis Barrault, sur France culture, le 9 août 1972.

-      « Je suis veuve de colonel », air de Gabrielle dans « La vie parisienne » de Jacques Offenbach (créé en 1866), par la compagnie Renaud-Barrault, enregistrement de 1959.

-      Musique du générique de fin : chanson « Veuve de guerre » de Barbara.

Bibliographie 

-      Laurent Bihl et Frédéric Chauvaud (dirs), "De la pleureuse à la veuve joyeuse", in : Sociétés et Représentations, n°46, automne 2018.

-      Frédéric Chauvaud, Lydie Bodiou, Ludovic Gaussot, Marie-José Grihom, Laurie Laufer (dirs), On tue une femme. Le féminicide. Histoire et actualité, Hermann, 2019.

-      Frédéric Chauvaud, L’affaire Pranzini : aventurier, Dan Juan… et tueur de femmes ?, Georg éditeur, 2018.