Escalader la nuit

Notre Dame de Paris par Bernard Hermann
Notre Dame de Paris par Bernard Hermann
Notre Dame de Paris par Bernard Hermann
Notre Dame de Paris par Bernard Hermann
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Ça commence en plein jour face à un baroudeur, qui se la joue aussi barbu et biceps dehors que l’enseigne de son magasin du quartier latin au bonheur non des dames, mais d’un vieux randonneur, au bâton de pèlerin, ayant depuis fait un peu trop fortune.

Et ça commence mal. À la question "où se trouvent les chaussons d’escalade?" La réponse ironise : "ça dépend, vous voulez escalader Fontainebleau ou bien l’Himalaya?" Difficile sur 8 centimètres d’escarpins au sortir d’un taxi de lui rétorquer que c’est Notre Dame que je vise. Pas envie surtout. Pas envie de l’amadouer, ni de l’écouter m’expliquer qu’il me faut prendre deux pointures en dessous, quitte à ne plus pouvoir mettre un pas devant l’autre. Et de dire merci en passant à la caisse. Il ne m’en coûtera pas 77 euros d’avoir les orteils ratatinés. Salut les spécialistes. Une paire de tennis devrait faire l’affaire…

Et ça finit 48 heures plus tard au petit matin en rappel au pied du chevet de Notre Dame, après avoir gravi la plus célèbre et romanesque des cathédrales. Deux ombres en cordée à mains nues et de noir vêtues, chuchotant nuitamment à flanc de contreforts, d’arcs-boutants, de vitraux, de gouttières, de pinacles, de plomb, de fleurons, de gargouilles jusqu’à tutoyer les étoiles… c’est ce que vous ne pourrez pas voir mais écouter pour de vrai, grâce à nos micros à la joue, HF et couleur chair, baptisés Madonna. Mais revenons à Notre Dame et à l’inespéré capté de cette ascension folle. Car je tiens à préciser que hissée par un fabuleux bien qu’anonyme ange gardien, expert en matière de prodige, tout en haut de la flèche qui tangue à plus de 90 mètres, par nuit de pleine lune : mes tennis ont suffi.

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Comment se met-on en tête, me direz-vous (et vous aurez raison), quand on ne connaît pas grand chose à l’escalade et qu’on n’est même pas sûr de ne pas être sujet au vertige, de s’en aller tenter par la face nord la flèche de Notre Dame de Paris ? C’est une longue histoire, de mots, d’amour, de destins funambules et de rêves risqués : s’y mêlent un drapeau tibétain noué il y a des années par une belle alpiniste défunte, un penchant baudelairien pour le pas de plus dans l'inconnu, une confiance totale en certains aventuriers de la poésie vécue, et aussi bien sûr la lecture à Séville, avec des siècles de retard, des centaines de pages de Notre-Dame de Paris  ! Un seul mot gravé sur un mur de pierre, qui plus est imaginaire, et Victor Hugo de prétendre : «C’est sur ce mot qu’on a fait ce livre.»

Aussi, lorsque j’ai proposé à Irène Omélianenko de France Culture de partir Escalader la nuit , "littéralement et dans tous les sens", et qu’elle m’a dit oui, il n’était plus question de se payer de mots.

Notre Dame de Paris vue par Bernard Hermann
Notre Dame de Paris vue par Bernard Hermann

Escalader la nuit  par Sophie Nauleau et Véronik Lamendour, mixage Sébastien Labarre avec la participation amicale et anonyme d’un exceptionnel premier de cordée, prise de son au pied de Notre Dame : Marcos Darras

>>> Pour aller plus loin, une sélection d'Annelise Signoret >>>

le site officiel de Notre-Dame de Paris

Visite virtuelle à 360° des tours de Notre-Dame de Paris 

Dossier sur Notre-Dame de Paris proposée par la Bnf

Don’t look down : Ne regardez pas en bas. Dans ce documentaire, un Britannique et un Ukrainien, tous les deux étoiles montantes de l’urban climbing, se rencontrent pour partager une escalade dangereuse dans la ville de Kiev.

Rediffusion de l'émission du 29/09/2011